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Il est important pour bon nombre d’entités qui exercent des activités au Canada de bien comprendre le droit des Autochtones et son histoire. L’établissement de relations respectueuses avec les peuples autochtones est un facteur clé pour éviter des retards importants, une augmentation des coûts, des litiges et, finalement, l’annulation de projets.
1. Bref historique
Depuis des millénaires, les peuples autochtones vivent en sociétés distinctes sur le territoire qui est aujourd’hui le Canada. Les premiers contacts entre les Européens et les peuples autochtones ont été marqués à divers degrés par de la collaboration et du commerce entre nations, des conflits, des déplacements et de l’assimilation. Vers la fin du 19e siècle, des politiques gouvernementales interventionnistes ont été imposées aux peuples autochtones, ce qui a entraîné des relocalisations forcées, l’interdiction des pratiques traditionnelles et la création du Programme des pensionnats indiens. Les pensionnats ont séparé les enfants autochtones de leurs familles pendant plus de 100 ans.
Vers la fin du 20e siècle, la société canadienne a commencé à reconnaître l’échec de ses politiques antérieures et à déployer des efforts lents, quoiqu’importants, pour rétablir et réconcilier les relations entre les peuples autochtones et non autochtones. Ces efforts sont toujours en cours.
2. Qui sont les peuples autochtones du Canada?
Au Canada, le terme « Autochtone » désigne trois groupes de personnes : les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Les Premières Nations et les Inuits habitaient au Canada avant l’arrivée des Européens. Les Métis sont un peuple qui est issu des contacts entre les Européens et les Premières Nations et qui a donné naissance à des collectivités distinctes.
Auparavant, le terme « Indien » était utilisé pour désigner les Premières Nations. Ce terme n’est plus acceptable dans la langue courante de nos jours, mais il a encore un sens juridique. Par exemple, aux termes de la loi fédérale intitulée Loi sur les Indiens, le terme « Indien » désigne toute personne qui, conformément à cette loi, est inscrite à titre d’Indien ou a droit de l’être. La Loi sur les Indiens désigne également certaines « bandes » (collectivités), dont les personnes qui en font partie sont des membres inscrits.
En 2016, il y avait environ 1,67 million d’Autochtones au Canada, soit quelque 5 % de la population totale.
3. Qui a compétence sur les peuples autochtones?
Le gouvernement fédéral a le pouvoir exclusif de légiférer en matière de peuples autochtones, ainsi qu’à l’égard des terres, appelées « réserves », désignées pour les peuples autochtones. La Loi sur les Indiens est la principale loi fédérale en la matière. Elle régit notamment la gouvernance des bandes, le statut juridique des personnes autochtones et l’utilisation des terres.
Les lois provinciales d’application générale (c.-à-d. les lois qui s’appliquent à tout le monde dans la province) s’appliquent également aux peuples autochtones, pourvu qu’elles ne portent pas atteinte aux domaines ou aux questions qui sont exclusivement de compétence fédérale.
Les peuples autochtones peuvent également avoir compétence sur leurs propres terres et ressources. Des traités modernes et de récentes décisions rendues par des tribunaux ont accordé à certains peuples autochtones le droit à l’autonomie gouvernementale. Au fil du temps, de nombreuses ententes intergouvernementales ont été conclues (entre les peuples autochtones et les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral) et de nombreuses autres dispositions législatives ont été adoptées afin de reconnaître le contrôle accru qu’exercent les gouvernements autochtones sur les terres et les ressources de leur territoire.
4. Droits ancestraux
Les droits ancestraux sont les droits collectifs des sociétés autochtones distinctes qui découlent de leur statut préexistant au Canada. Ils portent sur les coutumes, les pratiques et les traditions qui faisaient autrefois partie de la culture d’une collectivité autochtone et de son mode de vie avant l’arrivée des Européens, et qui continuent aujourd’hui de faire partie intégrante de leur culture dans la modernité.
Les droits ancestraux comprennent un éventail de droits culturels, sociaux, politiques et économiques, notamment les titres ancestraux (expliqués ci-après), le droit d’exploiter une ressource en particulier (comme le poisson, le jeu ou les arbres à un endroit déterminé) ainsi que d’autres droits culturels et sociaux. Des tribunaux canadiens ont également reconnu des droits ancestraux à l’égard de l’adoption coutumière, du mariage coutumier et du droit d’utiliser le tabac à des fins spirituelles, religieuses ou cérémoniales et aux fins de guérison. Les droits ancestraux diffèrent d’une collectivité à l’autre en fonction des coutumes, des pratiques et des traditions inhérentes à leurs cultures distinctives.
Les droits ancestraux sont détenus collectivement par les membres d’un peuple autochtone donné et n’appartiennent pas à une personne en particulier. De plus, ils peuvent exister et existent indépendamment de tout titre ancestral sur des terres. Ainsi, une collectivité autochtone peut avoir des droits ancestraux dans une région donnée, même si elle ne détient pas de titres ancestraux sur cette région.
5. Titres ancestraux
Un titre ancestral est un droit ancestral permettant d’utiliser et d’occuper exclusivement les terres visées par celui-ci. Ce droit découle de l’occupation et de la possession exclusives des terres par les peuples autochtones avant l’affirmation de la souveraineté par des gouvernements non autochtones. Il confère des droits de propriété similaires à ceux qui se rapportent aux terres privées, mais il est détenu collectivement par la collectivité autochtone.
Une fois prouvé, le titre ancestral confère le droit exclusif d’occuper et d’utiliser les terres visées à diverses fins, y compris le pouvoir d’exclure d’autres personnes de ces terres. Les titulaires de titres ancestraux ont le droit exclusif de décider comment la terre sera utilisée. Ils ont également le droit de tirer des avantages de ces utilisations, tant que cela est fait en conformité avec le caractère collectif du droit et l’exercice continu de ce dernier par des générations futures. Il peut notamment s’agir d’utilisations modernes qui ne sont pas nécessairement ancrées dans les pratiques culturelles passées.
Bien que les tribunaux canadiens reconnaissent la validité juridique du titre ancestral depuis un certain temps déjà, ce n’est qu’en 2014 que la Cour suprême du Canada a confirmé pour la première fois qu’un peuple autochtone détenait un titre ancestral. Bon nombre de peuples autochtones (si ce n’est pas la plupart d’entre eux) font valoir des titres ancestraux, bien qu’aucune autre revendication n’ait obtenu gain de cause devant les tribunaux.
6. Traités
Les traités sont des ententes entre le gouvernement et des peuples autochtones qui définissent les obligations et les droits permanents des parties. Il peut s’agir de traités historiques ou de traités modernes (certains étant appelés des ententes sur les revendications territoriales globales).
Les droits issus de traités varient d’une entente à l’autre. Les droits protégés dans un traité ne peuvent être exercés que par le peuple autochtone qui a signé le traité, et alors seulement dans les régions prévues dans le traité. À l’instar des droits ancestraux, les droits issus de traités sont des droits collectifs qui n’appartiennent pas à une personne en particulier.
6.1 - Traités historiques
À partir de 1701, la Couronne britannique a conclu des traités avec des peuples autochtones pour soutenir des relations économiques et militaires. Ces traités prévoyaient des relations pacifiques, le commerce, le soutien militaire et des alliances stratégiques, mais, en règle générale, ils n’octroyaient pas de terres ou d’autres droits.
Entre 1871 et 1921, le nouveau gouvernement du Canada (le Canada ayant été créé en 1867) a conclu de nombreux traités de cession de terres. Ces traités visaient de vastes territoires occupés ou contrôlés par des nations autochtones. Les plus importants d’entre eux sont les 11 « traités numérotés », qui concernent le nord de l’Ontario, le Manitoba, la Saskatchewan, l’Alberta, ainsi que des parties du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et de la Colombie-Britannique. Au total, il existe environ 70 traités historiques qui concernent près de 50 % du Canada.
En échange du transfert du droit de propriété des terres et des ressources visées par le traité en faveur de la Couronne, les traités prévoyaient généralement ce qui suit :
- des paiements annuels (annuités);
- des terres réservées à l’usage exclusif des Premières Nations (réserves);
- des droits de pêche, de chasse et de trappe sur les terres inoccupées de la Couronne;
- des avantages ponctuels (comme de l’équipement agricole, des munitions et des vêtements).
Les traités historiques étaient généralement fondés sur un échange de promesses faites verbalement et consignées par écrit par la Couronne, dans une langue que bon nombre de peuples autochtones ne comprenaient pas. Pour cette raison, les versions écrites des traités historiques n’énoncent pas nécessairement avec une exactitude absolue toutes les modalités de ces ententes, et le gouvernement et les Premières Nations ont souvent des points de vue divergents quant à l’interprétation et à l’application de ces traités. Ces points de vue divergents ont donné lieu à des litiges, lesquels se poursuivent.
7. Traités modernes
Les traités historiques n’ont abordé qu’une partie des droits ancestraux sur les terres au Canada. Des négociations entourant des traités modernes sont donc toujours en cours dans des régions du pays.
Contrairement aux traités historiques, les traités modernes sont le fruit de longues négociations (s’étalant parfois sur des décennies) entre des parties bien informées et pleines de ressources. Les traités modernes visent à favoriser la réconciliation et à assurer une relation à long terme positive entre les collectivités autochtones et les collectivités non autochtones.
Les droits et les avantages des peuples autochtones qui sont prévus dans les traités modernes comprennent souvent (mais pas toujours) ce qui suit :
- la propriété de terres;
- l’autonomie gouvernementale;
- des obligations en matière de consultation et de participation;
- des droits d’exploitation des ressources fauniques;
- des règlements financiers;
- la participation à l’aménagement du territoire et à la gestion des terres;
- le partage des recettes tirées des ressources et des mesures pour participer à l’économie canadienne.
Depuis 1975, le Canada a signé au moins 25 traités modernes avec des peuples autochtones dans diverses régions du pays.
8. Protection constitutionnelle
Les droits ancestraux et les droits issus de traités jouissent d’une protection constitutionnelle (soit la plus haute protection en droit canadien). L’article 35 de la Constitution du Canada indique, en partie, que « [l]es droits existants — ancestraux ou issus de traités — des peuples autochtones du Canada sont reconnus et confirmés ».
Cette disposition protège les droits ancestraux et les droits issus de traités qui existaient en 1982 et ceux qui ont pris effet ultérieurement. Cependant, l’article 35 ne présente pas une liste exhaustive des droits qu’il protège. Il y a donc eu beaucoup de litiges dans ce domaine du droit au cours des 40 dernières années.
Les droits ancestraux et les droits issus de traités ne peuvent s’éteindre sans le consentement des peuples autochtones. Toutefois, dans certaines circonstances, la Couronne peut tout de même contrevenir à l’exercice ou restreindre l’exercice de ces droits sans le consentement des peuples autochtones. C’est là qu’entre en scène l’obligation de consulter et d’accommoder.
9. Obligation de consulter et d’accommoder
Lorsque le gouvernement envisage de prendre une décision susceptible de toucher des droits ancestraux reconnus ou établis, il a l’obligation de consulter et, au besoin, d’accommoder les peuples autochtones. Cette obligation découle du principe de l’honneur de la Couronne, qui tire son origine de l’affirmation par la Couronne de sa souveraineté sur les peuples autochtones et par l’exercice de son autorité sur des terres et des ressources qui étaient jusque-là sous l’autorité des peuples autochtones.
Pour de nombreux peuples autochtones, l’obligation de consulter est devenue un moyen important de protéger leurs droits et de les exercer. En tant que solution de rechange peu coûteuse aux litiges et à la négociation de traité, la consultation favorise l’établissement d’une relation sans l’abandon de droits. Un processus de consultation fructueux peut aussi être avantageux pour les promoteurs d’un projet et le gouvernement en facilitant la conclusion d’une entente avant la survenance ou l’escalade de conflits. En règle générale, le gouvernement et (dans une large mesure) les promoteurs du projet prennent en charge les coûts de la consultation. Ces coûts doivent être prévus et peuvent éviter des dépenses et des retards imprévus plus tard au cours du processus de développement du projet.
L’obligation de consulter les peuples autochtones revient au gouvernement (souvent désigné comme étant la « Couronne » dans ce contexte). Sauf dans les cas individuels où le processus réglementaire le prévoit autrement, les tiers (comme les entreprises) n’ont aucune obligation légale générale de consulter. Les gouvernements peuvent toutefois déléguer les aspects procéduraux de l’obligation de consulter aux promoteurs d’un projet, ce qu’ils font souvent. Même s’il délègue cette obligation, le gouvernement doit tout de même s’assurer que le processus de consultation entrepris par le promoteur d’un projet atteint le seuil établi par les tribunaux.
Si un peuple autochtone s’oppose au développement d’un projet sur le fondement d’une violation de ses droits ou d’une absence de consultation ou d’accommodement, le recours principal dont il dispose (en plus de la négociation) est de se tourner vers les tribunaux pour obtenir réparation. Bien que bon nombre de promoteurs de projet aient mené à bien les processus réglementaires et négocié des ententes mutuellement profitables avec des peuples autochtones, d’autres ont subi des retards importants ou une augmentation des coûts ou ont vu leur projet annulé.
Il est donc essentiel de déterminer les droits ancestraux tôt dans le processus et de toujours dialoguer avec les collectivités autochtones. Un tel dialogue peut se faire au moyen d’un processus de consultation et d’accommodement, plus particulièrement en concluant des ententes commerciales avec les collectivités autochtones.
9.1 - Teneur de l’obligation de consulter
L’obligation de consulter prend naissance lorsque la Couronne a connaissance de l’existence de droits ancestraux ou de droits issus de traités potentiels ou établis et envisage des mesures susceptibles d’avoir un effet préjudiciable sur ceux-ci. Le droit ou l’effet sur celui-ci ne doit pas nécessairement être prouvé en définitive et peut être simplement invoqué (moyennant un certain degré de légitimité apparente). Ce seuil est donc bas et peut facilement être déclenché. La plupart des projets de développement des ressources au Canada, ainsi que certaines autres activités commerciales, déclenchent l’obligation de consulter.
Le degré de consultation nécessaire varie d’une situation à l’autre. Il dépend de l’évaluation préliminaire de la solidité de la preuve étayant l’existence du droit ou du titre, ainsi que de la gravité de l’effet préjudiciable potentiel sur le droit ou le titre revendiqué.
Un processus de consultation moins rigoureux est nécessaire dans les cas où la revendication du droit ou du titre ancestral est peu solide, où le droit ancestral est limité et où le risque de violation est faible. Dans de telles circonstances, il suffit pour le gouvernement d’aviser le peuple autochtone de la violation possible, de lui communiquer de l’information et de discuter des questions soulevées par suite de l’avis.
En revanche, dans les cas où la revendication du droit ou du titre ancestral repose sur une preuve à première vue solide, où le droit et l’atteinte potentielle sont d’une haute importance pour les peuples autochtones et où le risque de préjudice non indemnisable est élevé, le gouvernement pourrait devoir tenir une consultation plus approfondie.
Une fois le degré de consultation déterminé, le gouvernement doit consulter chaque nation autochtone dans l’intention de tenir compte réellement des préoccupations de celui-ci. Étant donné que la consultation vise à faciliter le dialogue avec les peuples autochtones, le gouvernement doit leur fournir de l’information utile au processus décisionnel.
L’obligation de consulter ne confère pas au peuple autochtone un droit de veto et ne nécessite pas le consentement de celui-ci (à moins que la nation autochtone ne détienne un titre ancestral, ou qu’elle n’ait conclu une entente avec le gouvernement qui reconnaît que la nation possède un pouvoir décisionnel). Cependant, il doit y avoir un processus de consultation véritable et raisonnable. La consultation ne peut pas exclure dès le départ la possibilité d’accommodement ni simplement avoir pour but d’offrir une occasion de « se défouler ».
Les peuples autochtones sont également liés par des obligations réciproques les obligeant à énoncer clairement leurs revendications et à participer de bonne foi au processus de consultation. Les peuples autochtones ne peuvent pas contrecarrer les efforts que fait la Couronne pour les consulter (p. ex., en refusant de donner suite à la correspondance ou d’assister aux réunions).
En définitive, les tribunaux sont chargés de déterminer si le processus de consultation et d’accommodement du gouvernement est suffisant lorsqu’un conflit survient.
10. Ententes commerciales
Dans le cadre de leur dialogue avec des peuples autochtones, il n’est pas rare que des entreprises concluent des ententes commerciales afin d’obtenir le consentement et l’aval des peuples concernés à l’égard d’une activité ou d’un projet proposé.
Les ententes sur les répercussions et les avantages (« ERA ») sont le type d’ententes le plus souvent conclues au Canada entre les promoteurs d’un projet et les peuples autochtones. Les ERA sont des ententes exécutoires conclues entre des promoteurs et des collectivités autochtones qui visent à réduire les répercussions d’un projet proposé et à énoncer les avantages que l’entreprise procurera au peuple autochtone. Les ententes de cette nature peuvent prendre diverses formes et correspondent rarement à un modèle standard.
Bien qu’une certaine forme de paiement monétaire fasse généralement partie d’une ERA, les collectivités autochtones exigent habituellement des engagements supplémentaires dans une telle entente. Ces engagements peuvent comprendre la participation aux processus réglementaires, notamment des obligations continues d’atténuation, de surveillance ou de remise en état ou la prise en compte des connaissances autochtones. De plus, les ERA contiennent souvent des clauses concernant les occasions de développement économique, l’éducation, la formation et l’emploi. Le promoteur d’un projet reçoit en contrepartie l’aval (ou le consentement) de la collectivité, ce qui peut grandement améliorer l’échéancier réglementaire et les calendriers de réalisation du projet, de même que réduire les coûts imprévus et les incertitudes.
Bien souvent, le promoteur d’un projet offre un soutien financier à une collectivité autochtone afin de lui permettre d’obtenir les conseils juridiques et techniques dont elle a besoin pour négocier une ERA.
De façon générale, d’autres types d’ententes commerciales sont conclues avant une ERA ou complètent une ERA. Par exemple, on peut négocier tôt dans le processus de dialogue un protocole d’entente qui favorise l’établissement d’une relation et prévoit peu d’engagements juridiques formels. De même, des ententes d’exploration et de développement, d’usage courant dans le secteur minier, facilitent l’établissement des priorités propres à un secteur et mènent souvent à une ERA.
Une entente de coentreprise peut être négociée entre un entrepreneur expérimenté et un groupe collectivité ou entreprise autochtone. La question de savoir si la coentreprise qui en résultera se verra directement confier des travaux par un promoteur de projet ou soumissionnera pour obtenir des contrats avec un traitement préférentiel dépendra du projet.
En définitive, les entreprises devraient négocier des ententes commerciales qui favorisent l’obtention de résultats clairs et prévisibles, dans le but d’obtenir le consentement des autochtones à l’égard de leurs activités.
11. Lutte contre la corruption
La loi fédérale intitulée Loi sur les mesures de transparence dans le secteur extractif (« LMTSE ») impose de nouvelles obligations relatives à la transparence et aux rapports visant à lutter contre la corruption. Les entreprises qui s’adonnent à l’exploitation commerciale de pétrole, de gaz ou de minéraux doivent déclarer les paiements versés à tous les paliers de gouvernement qui totalisent au moins 100 000 $ CA. Ces obligations correspondent de manière générale aux dispositions similaires d’autres pays.
La LMTSE vise les paiements versés aux gouvernements autochtones. Elle n’aborde pas précisément les ERA et les autres ententes commerciales conclues avec des peuples autochtones, mais ces ententes peuvent prévoir certains paiements à déclarer. Les clauses de confidentialité qui limitent la transparence et l’échange d’information concernant le dédommagement dans le cadre d’une ERA ne remplacent pas les obligations établies par la LMTSE. Tout manquement, que ce soit omettre d’effectuer une déclaration, fournir de l’information trompeuse ou structurer des paiements de manière à éviter de devoir les déclarer, peut entraîner des sanctions en vertu de la législation.
En règle générale, le fait d’offrir un soutien financier à des peuples autochtones ou de négocier des ententes avec eux ne contrevient pas aux principes qui sous-tendent la législation en matière de transparence et de lutte contre la corruption. Toutefois, il est important de savoir que cette législation existe et qu’elle pourrait s’appliquer pendant le processus de dialogue ou de négociation.
12. Évolution du droit des autochtones au Canada
Le droit des Autochtones au Canada est en constante évolution. Il sera intéressant de surveiller la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, également appelée « DNUDPA ».
La DNUDPA est un instrument international adopté par les Nations Unies visant à reconnaître les droits qui « constituent les normes minimales nécessaires à la survie, à la dignité et au bien-être des peuples autochtones du monde ». Malgré l’étendue des sujets qui y sont traités, la DNUDPA est une déclaration d’aspirations et non une convention internationale contraignante. Depuis quelques années, la DNUDPA exerce une influence grandissante sur le discours juridique et politique au Canada.
La DNUDPA reconnaît divers droits, notamment le droit à l’autodétermination et le droit d’être autonome pour tout ce qui touche les affaires intérieures, le droit de ne faire l’objet d’aucune forme de discrimination et le droit de donner son consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.
Le Canada a appuyé la DNUDPA en 2010 en réitérant son engagement à promouvoir et à protéger les droits des peuples autochtones, aussi bien au pays que dans le monde entier.
En 2019, le gouvernement de la Colombie-Britannique a adopté la Declaration on the Rights of Indigenous Peoples Act, qui établit la DNUDPA comme cadre en Colombie-Britannique au chapitre de la réconciliation avec les peuples autochtones. En 2021, le gouvernement fédéral a adopté la Loi concernant la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, laquelle confirme que la DNUDPA constitue un instrument universel garantissant des droits internationaux de la personne pouvant aider à interpréter et à appliquer le droit canadien.
Un certain nombre d’enjeux importants liés à la mise en œuvre de la DNUDPA n’ont pas encore été abordés en profondeur. Par exemple, il est difficile d’établir comment les gouvernements régleront les désaccords quant à la signification de certains articles de la DNUDPA en pratique. Plus particulièrement, les articles concernant le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause devront faire l’objet d’éclaircissements.
L’obtention du consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, vise essentiellement à s’assurer que les peuples autochtones participent à la prise de décisions sur des questions qui peuvent concerner leurs terres et leurs intérêts. Ce consentement doit être donné « librement », c’est-à-dire sans contrainte, intimidation ou manipulation, être « préalable » à l’autorisation ou au début d’activités et être donné « en connaissance de cause », à la lumière de tous les renseignements pertinents. La mesure dans laquelle un consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause est requis (en ce sens que l’absence de consentement des peuples autochtones concernés pourrait empêcher un projet de recevoir toutes les approbations gouvernementales nécessaires) évolue à un rythme différent au sein des différents gouvernements au Canada.