Le 16 avril 2024, le gouvernement fédéral a déposé son budget de 2024 (le « Budget 2024 »), lequel renferme un certain nombre de dispositions concernant les régimes de retraite, les avantages sociaux et la rémunération des hauts dirigeants que nous résumons ci-après.
Voici les principaux thèmes qui sont abordés dans les dispositions du Budget 2024, ainsi que les mesures fiscales supplémentaires connexes, lesquelles sont étudiées plus en détail aux présentes :
- Déduction pour option d’achat d’actions
- Groupe de travail sur les moyens de catalyser de plus importantes possibilités d’investissement intérieur pour les fonds de pension canadiens
- Publication de renseignements sur les placements des fonds de pension
- Améliorations au Régime d’accession à la propriété
- Modifications possibles des placements admissibles pour les régimes enregistrés
- Mesures annoncées antérieurement
Déduction pour option d’achat d’actions
Proposition du Budget 2024
Le Budget 2024 propose des modifications au taux d’inclusion des gains en capital, ce qui entraînera des changements corrélatifs à la déduction pour option d’achat d’actions accordées aux employés de 50 % en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la « LIR »).
Les gains en capital sont actuellement assujettis à l’impôt à un taux d’inclusion de 50 % (soit la moitié). Pour les particuliers, le Budget 2024 propose d’augmenter le taux d’inclusion des gains en capital à 66,6 % (soit les deux tiers) sur la portion des gains en capital réalisés au cours de l’année excédant 250 000 $ CA. Il est proposé que le taux d’inclusion des gains en capital accru s’applique aux gains en capital réalisés à compter du 25 juin 2024. Pour en savoir davantage sur la proposition relative au taux d’inclusion des gains en capital, consultez notre Bulletin Blakes d’avril 2024 intitulé Budget fédéral 2024 : Présentation de certaines mesures fiscales.
En ce qui concerne les options d’achat d’actions, lorsqu’un employé acquiert des actions par suite de l’exercice d’une option à laquelle l’article 7 de la LIR s’applique et que certaines autres conditions sont remplies, cet employé peut actuellement demander une déduction de 50 % sur le montant de l’avantage découlant de l’option d’achat d’actions. Donc, le montant qui serait par ailleurs inclus dans le revenu d’emploi imposable de l’employé sera ainsi réduit de 50 %, ce qui applique effectivement un taux d’inclusion des gains en capital à l’avantage lié à l’option d’achat d’actions. Compte tenu du taux d’inclusion des gains en capital accru proposé, pour les options qui donnent droit à la déduction de 50 %, le Budget 2024 propose de réduire cette déduction à 33,33 % pour tout avantage relatif à une option excédant 250 000 $ CA au cours d’une année donnée (cumulé avec les gains en capital réalisés au cours de cette année). Une option qui n’est pas admissible à la déduction de 50 % pour d’autres raisons ne sera pas touchée par ces nouvelles règles.
Il reste à voir si ces nouvelles règles s’appliqueront uniquement aux options accordées après l’entrée en vigueur des nouvelles règles, qui est actuellement prévue pour le 25 juin 2024, ou à toutes les options exercées après cette date, peu importe la date d’octroi de l’option applicable.
Incidence future et enjeux pratiques éventuels
Les nouvelles limites proposées sur la disponibilité de la déduction pour options d’achat d’actions de 50 % s’appliqueront en plus des restrictions existantes applicables aux options d’achat d’actions accordées après le 30 juin 2021. Pour ces options (sous réserve des exceptions décrites ci-dessous), la déduction d’impôt de 50 % peut être limitée en fonction de la juste valeur marchande (« JVM ») totale des actions sous-jacentes qui doivent être acquises au cours d’une année donnée, telle que déterminée à la date de l’octroi. La déduction de 50 % n’est disponible que pour la première tranche de 200 000 $ CA d’actions, selon la valeur à la date d’attribution, sous-jacente à une option pouvant être acquise au cours d’une année donnée; toute action sous-jacente à l’option qui peut être acquise au cours d’une année d’acquisition et dont la valeur dépasse cette limite d’acquisition ne sera pas admissible à la déduction de 50 % à l’exercice de l’option (et sera un « titre non admissible » aux fins du paragraphe 110(1.31) de la LIR). Cette restriction ne s’applique pas actuellement aux options accordées par des sociétés privées sous contrôle canadien (« SPCC ») et des sociétés qui ne sont pas des SPCC dont les revenus annuels bruts ne dépassent pas 500 M$ CA (soit individuellement ou avec un groupe qui prépare des états financiers consolidés).
Rien dans le Budget 2024 n’indique que les règles introduites en 2021 seront modifiées à la lumière des nouvelles restrictions. Cela signifie que pour les options octroyées après le 30 juin 2021, à moins que l’une des exceptions décrites ci-dessus ne s’applique, il y aura un double critère concernant la disponibilité de la déduction de 50 % : l’un relativement à la date de l’octroi en fonction du plafond annuel d’acquisition de 200 000 $ CA; l’autre relativement à la date à laquelle l’option est exercée ou autrement réglée en fonction du plafond annuel combiné des gains en capital et des avantages liés aux options de 250 000 $ CA. Si le plafond annuel de 250 000 $ CA est dépassé, les options qui satisfont au premier critère et qui sont admissibles à la déduction ne seront assujetties qu’à une déduction de 33,33 %. Il y a lieu de noter que ces deux critères reposent sur des méthodes distinctes d’évaluation et ne sont pas interchangeables. Le critère du « titre non admissible » est fondé sur la valeur des actions sous-jacentes à l’option au moment de l’octroi de cette dernière, tandis que l’avantage découlant de l’option est déterminé en fonction de la différence entre la JVM de l’action sous-jacente au moment de l’exercice de l’option et le prix d’exercice.
Il pourrait y avoir des questions pratiques liées à ces nouvelles règles qui ne sont pas abordées dans le Budget 2024 et que seul le projet de loi connexe éclaircira, ce qui permettra de connaitre l’incidence complète de ces propositions. En voici quelques exemples :
- Comme il est décrit ci-dessus, le plafond de 250 000 $ CA est un plafond total qui regroupe les avantages découlant des options et les gains en capital réalisés au cours de la même année. Aux fins de la retenue et du versement d’impôt, il n’est pas clair actuellement comment l’employeur pourra s’assurer de retenir et de verser le montant juste de l’impôt sur l’avantage découlant de l’option lorsque l’employé a déjà réalisé, ou réalisera à la fin de l’année, des gains en capital qui réduiraient la valeur de l’avantage découlant de l’option donnant droit à la déduction de 50 %. Une approche possible pourrait être que les employés titulaires d’options d’achat d’actions soient tenus, à l’exercice de l’option, d’attester à l’employeur qu’ils n’ont pas encore atteint le plafond annuel de 250 000 $ CA, attestation sur laquelle l’employeur pourrait alors s’appuyer pour déterminer la retenue d’impôt juste à ce moment.
- Une question semblable peut se poser lorsque plusieurs employeurs octroient des options d’achat d’actions à un même particulier et qu’au cours d’une année civile, cet employé exerce de telles options qui lui ont été octroyées par deux employeurs ou plus, de sorte que la valeur totale de l’avantage découlant de ces options dépasse 250 000 $ CA. Si chaque employeur appliquait le seuil de façon indépendante, le bénéficiaire de l’option pourrait avoir une retenue d’impôt moins élevée que si la retenue était calculée en fonction de l’avantage total découlant de l’option, et ainsi avoir un impôt dû.
- Les employeurs devront également tenir compte des gains en capital réalisés au cours d’une année par les employés dans le cadre de régimes d’achat d’actions des employés ou d’autres régimes de rémunération de l’employeur qui peuvent ne pas être admissibles à la déduction de 50 % pour options d’achat d’actions et qui ne sont pas assujettis aux retenues salariales ou à des obligations de déclaration, mais qui peuvent réduire le montant de l’avantage découlant de l’option reçu par ces employés au cours de la même année qui peut donner droit à cette déduction.
Groupe de travail sur les moyens de catalyser de plus importantes possibilités d’investissement intérieur pour les fonds de pension canadiens
Le Budget 2024 annonce que le gouvernement, en collaboration avec les régimes de retraite, mettra sur pied un groupe de travail, dirigé par Stephen Poloz, ancien gouverneur de la Banque du Canada, et appuyé par la vice-première ministre et ministre des Finances. Les efforts de ce groupe de travail porteront principalement sur les aspects suivants :
- l’infrastructure numérique et l’investissement en intelligence artificielle (« IA »);
- l’infrastructure physique;
- les installations aéroportuaires;
- les investissements en capital de risque;
- la construction d’un plus grand nombre de maisons, y compris sur des terrains publics;
- l’élimination de la règle des 30 % pour les investissements intérieurs.
Cette annonce fait suite à celle du gouvernement dans l’Énoncé économique de l’automne 2023 (l’« ÉÉA 2023 »), selon laquelle celui-ci envisage de supprimer la règle des 30 %, comme nous l’avons mentionné dans notre publication Cinq points, 5 minutes de janvier 2024 intitulée Paysage de l’investissement des régimes de pension en 2024 : ce qu’il faut savoir.
Publication de renseignements sur les placements des fonds de pension
Pour donner suite à l’ÉÉA 2023, le gouvernement propose dans le Budget 2024 des modifications additionnelles à la Loi de 1985 sur les normes de prestation de pension. Ces modifications permettraient au Bureau du surintendant des institutions financières de publier des renseignements sur les placements des grands régimes de pension sous réglementation fédérale et d’exiger qu’il le fasse. Les renseignements à communiquer seront énoncés dans les règlements et comprendraient la répartition des placements des régimes par province ou territoire et, au sein de chaque province ou territoire, par catégorie d’actifs.
Le Budget 2024 précise que le gouvernement continuera de collaborer avec les provinces et les territoires pour s’assurer que la communication de renseignements analogues par les grands régimes de pension du Canada est dans un format simple et uniforme.
Améliorations au Régime d’accession à la propriété
Le Budget 2024 a également annoncé que le gouvernement fédéral compte modifier la LIR pour augmenter la limite des retraits permis au titre du Régime d’accession à la propriété. À l’heure actuelle, la LIR permet les retraits libres d’impôt des régimes enregistrés d’épargne-retraite (« REER ») si ces retraits sont effectués en vue de l’achat ou de la construction d’une habitation admissible (sous réserve d’exigences de remboursement). Après le 16 avril 2024, les acheteurs d’une première habitation pourront retirer un montant libre d’impôt pouvant aller jusqu’à 60 000 $ CA de leur REER; il s’agit d’une hausse par rapport au plafond précédent de 35 000 $ CA.
De plus, le Budget 2024 annonce que le gouvernement fédéral entend modifier la LIR afin de prolonger temporairement, de trois années supplémentaires, la période de grâce pendant laquelle les propriétaires ne sont pas tenus de rembourser les sommes retirées de leur REER dans le cadre du Régime d’accession à la propriété. Cette prolongation du délai de grâce s’appliquera aux participants au Régime d’accession à la propriété qui ont fait ou qui feront un premier retrait entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025. Ces participants pourront désormais commencer à rembourser leurs retraits dans le cadre du Régime d’accession à la propriété seulement à partir de la cinquième année suivant le retrait.
Modifications possibles des placements admissibles pour les régimes enregistrés
Le Budget 2024 invite les intervenants à fournir des suggestions sur la modernisation des règles régissant les placements admissibles pour les régimes enregistrés de manière prospective, et ce, dans un souci d’amélioration de la cohérence et de la clarté du cadre régissant les régimes enregistrés. La date limite pour soumettre des commentaires est le 15 juillet 2024. Pour en savoir davantage sur les modifications proposées, consultez Bulletin Blakes d’avril 2024 intitulé Budget fédéral 2024 : Présentation de certaines mesures fiscales.
Mesures annoncées antérieurement
Le Budget 2024 confirme l’intention du gouvernement d’aller de l’avant avec diverses mesures fiscales et connexes annoncées antérieurement et décrites ci-après, tel qu’elles ont été modifiées afin de tenir compte des consultations, des délibérations et des développements législatifs qui ont eu lieu depuis leur publication. Parmi ces mesures, mentionnons les suivantes :
- Conventions de retraite : Le Budget 2023 proposait de modifier la LIR de sorte que les frais ou primes payés aux fins de garantie ou de renouvellement d’une lettre de crédit (ou d’un cautionnement) d’une convention de retraite (« CR ») qui est complémentaire à un régime de pension agréé (« RPA ») ne soient pas assujettis à l’impôt remboursable. Les propositions législatives publiées en août 2023 ont élargi le champ d’application de cette proposition pour y inclure les frais ou primes payés aux fins de garantie ou de renouvellement d’une lettre de crédit (ou d’un cautionnement) d’une CR (i) qui est complémentaire à un RPA, à un régime de participation différée aux bénéfices, à un régime de pension agréé collectif, ou à toute combinaison de ces régimes; ou (ii) qui est aux termes d’un arrangement satisfaisant la totalité ou la presque totalité des critères pour être enregistré en tant que RPA (à l’exception des limites applicables au facteur d’équivalence et des prestations maximales pour les régimes de retraite à prestations déterminées prescrites par la LIR et le règlement s’y rapportant). Ce changement s’appliquerait aux frais ou primes payés à compter du 28 mars 2023. Le Budget 2023 proposait aussi de permettre aux employeurs de demander un remboursement d’impôts remboursables déjà versés relativement aux frais ou primes payés pour des lettres de crédit (ou des cautionnements) par les fiducies d’une CR, en fonction des prestations de retraite qui sont versées à partir des revenus de sociétés de l’employeur aux employés qui touchaient des prestations d’une CR garanties par des lettres de crédit (ou des cautionnements). Ce changement s’appliquerait aux prestations de retraite payées après 2023. Pour de plus amples renseignements au sujet des propositions relatives aux CR, consultez notre Bulletin Blakes de mars 2023 intitulé Budget fédéral 2023 : Mesures visant les régimes de retraite, les avantages sociaux et la rémunération des hauts dirigeants, ainsi que notre Bulletin Blakes d’août 2023 intitulé Le point sur le Budget 2023 et les modifications proposées visant les conventions de retraite et autres régimes de revenu différé.
- Fiducies collectives des employés : Le Budget 2023 proposait des règles fiscales pour faciliter la création de fiducies collectives des employés (« FCE »). Un projet de loi déposé en août 2023 comportait des modifications techniques visant le projet de loi accompagnant le Budget 2023, tandis que l’ÉÉA 2023 proposait une exonération d’impôt sur les 10 premiers millions de dollars en gains en capital réalisés sur la vente d’une entreprise à une FCE. Le Budget 2024 fournit d’autres renseignements sur l’exemption et les conditions proposées. Ces mesures s’appliqueraient aux dispositions admissibles d’actions effectuées entre le 1er janvier 2024 et le 31 décembre 2026. Pour de plus amples renseignements au sujet de la proposition relative aux FCE, consultez notre Bulletin Blakes d’avril 2024 intitulé Budget fédéral 2024 : Présentation de certaines mesures fiscales. Pour de plus amples renseignements au sujet des projets de loi antérieurs, consultez notre Bulletin Blakes de mars 2023 intitulé Budget fédéral 2023 : Mesures visant les régimes de retraite, les avantages sociaux et la rémunération des hauts dirigeants, ainsi que notre Bulletin Blakes d’août 2023 intitulé Le point sur le Budget 2023 et les modifications proposées visant les conventions de retraite et autres régimes de revenu différé.
Pour en savoir davantage, communiquez avec un membre de notre groupe Régimes de retraite, avantages sociaux et rémunération des hauts dirigeants.
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