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Commentaires des ACVM sur l’information fournie par les émetteurs assujettis au sujet de l’IA et du changement climatique

10 décembre 2024

Le 7 novembre 2024, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (les « ACVM ») ont publié l’Avis 51-365 du personnel des ACVM, Activités du programme d’examen de l’information continue pour les exercices terminés les 31 mars 2024 et 31 mars 2023 (l’« Avis »), lequel résume les conclusions tirées du programme d’examen de l’information continue (le « PEIC ») des ACVM. L’Avis souligne également des lacunes courantes en matière d’information et, dans certains cas, donne des exemples pour aider les émetteurs assujettis (ci-après, les « émetteurs » ou l’« émetteur », selon le cas) à y remédier effectivement.

Comme toujours, les ACVM veillent particulièrement à exiger que les émetteurs fournissent de l’information qui est exacte et impartiale, et qui n’induit pas les investisseurs en erreur. Récemment, l’« IA-blanchiment » et l’« écoblanchiment » se sont révélés des questions de grande importance à l’égard desquelles les émetteurs doivent faire preuve de vigilance, car des affirmations importantes exagérément promotionnelles ou infondées risquent de faire en sorte que des mesures réglementaires soient prises et que la responsabilité des investisseurs soit engagée.

IA-blanchiment

Dans l’Avis, les ACVM définissent un système d’intelligence artificielle (« IA ») comme étant un système automatisé qui, pour des objectifs explicites ou implicites, fait des déductions à partir d’entrées qu’il reçoit afin de générer des résultats tels que des prévisions, des contenus, des recommandations ou des décisions qui peuvent influer sur des environnements physiques ou virtuels.

Bien que l’IA existe depuis un certain temps, les formes les plus récentes et de pointe de celle-ci pourraient transformer de nombreux aspects des activités des sociétés ouvertes. Cependant, l’enthousiasme associé à l’IA peut donner lieu à des affirmations qui sont exagérées intentionnellement ou imprudemment. De telles affirmations présenteraient de manière inexacte les capacités et les perspectives réelles d’un émetteur et promouvraient artificiellement l’intérêt pour les titres de ce dernier.

Principaux éléments soulevés :

  1. Classement : Dans l’Avis, les ACVM soulignent l’importance pour les émetteurs de définir l’IA dans le contexte de leur offre de produits et de services. Le fait de fournir un tel contexte s’avère essentiel compte tenu de la vaste portée du terme « IA », lequel englobe divers niveaux de complexité technologique.
  2. Information complète : Les ACVM s’attendent à ce que les investisseurs considèrent généralement comme importante l’information sur les sources et les fournisseurs dont proviennent les données qu’utilise chaque système d’IA pour exécuter ses fonctions; le fait que ce système soit développé par l’émetteur ou fourni par un tiers; l’effet que l’utilisation ou le développement des systèmes d’IA, ou la dépendance envers ceux-ci, est susceptible d’avoir sur les activités, les résultats d’exploitation et la situation financière de l’émetteur; le fait que le système d’IA ait entraîné ou non des incidents soulevant des problèmes d’ordre réglementaire, éthique ou juridique; et tout autre enjeu se rattachant à l’adoption de ces systèmes.
  3. Fondement des déclarations : Les émetteurs doivent faire des déclarations qui sont étayées par des faits et qui se fondent sur les activités et la performance réelles de la société.
  4. Partialité : Les émetteurs doivent présenter de l’information qui, dans le contexte de leurs activités, rend compte des avantages et des risques découlant de l’utilisation de l’IA.
  5. Gouvernance : Les émetteurs doivent se doter de structures de gouvernance claires qui comprennent notamment des processus de reddition de comptes, de gestion des risques et de surveillance concernant le recours à l’IA dans l’exercice de leurs activités.

Dans l’Avis, les ACVM précisent par ailleurs que les indications qui y sont fournies se fondent sur les exigences actuellement prévues à la réglementation sur les valeurs mobilières, mais ne sauraient modifier ces exigences ni en créer de nouvelles.

Écoblanchiment

Dans l’Avis, les ACVM notent qu’elles ont observé, au cours des dernières années, une tendance croissante en matière de divulgation d’information relative aux facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (« ESG ») et à la durabilité, ainsi qu’une tendance correspondante selon laquelle les affirmations formulées en la matière pourraient être trompeuses, infondées ou incomplètes. Les ACVM soulignent l’importance pour les émetteurs de fournir de l’information impartiale, soutenue par suffisamment de détails, afin d’éviter d’induire les investisseurs en erreur.

Principaux éléments soulevés :

  1. Affirmations infondées / prospectives relativement aux facteurs ESG : Les affirmations faites par les émetteurs doivent être étayées par des données, et comporter des échéanciers ainsi que des explications sur la façon dont les objectifs seront atteints. Pour ce faire, les émetteurs peuvent établir des objectifs en lien avec les facteurs ESG et décrire comment ils comptent atteindre ces objectifs à l’aide de plans détaillés et crédibles. Les ACVM rappellent aux émetteurs que l’information sur les facteurs ESG peut constituer une information prospective. Par conséquent, dans le contexte de la divulgation de telle information, les émetteurs doivent appuyer leurs affirmations concernant leurs cibles ou plans sur un fondement valable. Ils doivent également présenter les hypothèses ou les facteurs importants qui sous-tendent ces affirmations, ainsi que les risques importants associés à l’atteinte de ces cibles ou à la réalisation de ces plans.
  2. Libellé trompeur : L’information voulant qu’un produit ou un service important soit « respectueux » des facteurs ESG ou « conforme » aux normes du secteur en la matière peut être trompeuse si elle n’est pas accompagnée du détail des normes pertinentes, des facteurs pris en considération et de la façon dont ils sont évalués.
  3. Absence de transparence dans la méthodologie utilisée : Les notes relatives aux facteurs ESG doivent être accompagnées d’une explication de la méthodologie utilisée (c.-à-d., la note réelle et les critères précis sur lesquels elle repose, le caractère quantitatif ou qualitatif des données, l’identité du tiers attestant la note, et la date de la publication de la note). Dans l’Avis, les ACVM invitent les émetteurs à indiquer clairement les données et les paramètres qu’ils ont utilisés afin que les investisseurs puissent prendre connaissance de toutes les hypothèses et limitations prises en compte. Selon les ACVM, il n’est pas suffisant pour l’émetteur d’affirmer, par exemple, qu’il a obtenu une « note élevée » dans une « enquête nationale sur la gouvernance ».
  4. Terminologie trompeuse : L’utilisation de termes non définis ou vagues peut donner une fausse impression de l’information que fournissent les émetteurs au chapitre des facteurs ESG. Les ACVM rappellent aux émetteurs que les termes qu’ils utilisent doivent être bien définis et s’appuyer sur des résultats mesurables et une preuve objective.

Autres lacunes soulevées

Dans l’Avis, les ACVM présentent le sommaire des examens de l’information continue fournie par 425 émetteurs. Les conclusions de ces examens sont classées selon quatre catégories : 1) application de la loi / interdiction d’opérations / liste des émetteurs en défaut; 2) nouveau dépôt; 3) modifications prospectives; et 4) aucune mesure à prendre.

Pour l’exercice 2024, 58 % des conclusions ont donné lieu à des observations sur des questions de fond nécessitant la modification de l’information fournie, le nouveau dépôt de documents ou le dépôt de documents manquants. De plus, dans 8 % des cas, les émetteurs ont fait l’objet de mesures d’application de la loi, se sont vu imposer des interdictions d’opérations ou ont été inscrits à la liste des émetteurs en défaut. Dans plusieurs cas, les examens ont donné lieu à de multiples conclusions, nécessitant de la part des émetteurs concernés le nouveau dépôt de documents et un engagement à améliorer l’information à fournir à l’avenir. Dans 34 % des cas, aucune mesure ne devait être prise. Il s’agit d’une diminution considérable par rapport à l’exercice 2023 (44 %).

Outre l’IA-blanchiment et l’écoblanchiment, les ACVM présentent, dans l’Avis, les lacunes qu’elles ont relevées relativement à diverses autres obligations d’information, y compris les suivantes :

  • États financiers : L’Avis comporte une analyse plus détaillée qu’à l’habitude de questions liées aux états financiers et à la comptabilité, notamment en ce qui concerne la dépréciation d’actifs, les regroupements d’entreprises, l’acquisition d’actifs, les pertes de crédit attendues et les produits des activités ordinaires.
  • Rapports de gestion : Outre les questions qui ont été soulevées ci-dessus au chapitre des états financiers et qui touchent également les obligations d’information relatives aux rapports de gestion, l’Avis présente également les commentaires des ACVM au sujet des attentes de ces dernières à l’égard de divers éléments devant figurer dans les rapports de gestion, à savoir notamment l’information prospective et l’information financière prospective, ainsi que l’analyse des activités liées à la situation de trésorerie et aux sources de financement de la société. Les ACVM réitèrent par ailleurs dans l’Avis que, dans bon nombre de cas, la période pour laquelle l’information financière prospective peut faire l’objet d’estimations raisonnables ne s’étend pas au-delà de la date de clôture de l’exercice suivant de l’émetteur.
  • Obligations réglementaires : Dans l’Avis, les ACVM soulèvent des lacunes courantes au chapitre du dépôt et du caviardage des contrats importants. Pour en savoir davantage sur ce sujet, consultez notre Bulletin Blakes de novembre 2024 intitulé Introduction au droit canadien des valeurs mobilières relatif au dépôt des contrats importants.
  • Obligations d’information concernant les projets miniers : Les ACVM ont relevé des lacunes en ce qui a trait à la conformité au Règlement 43-101 sur l’information concernant les projets miniers, y compris aux exigences relatives aux personnes qualifiées et aux rapports techniques.



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