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Création de fonds 101 : Enjeux liés à la création de fonds de capital-investissement – Partie 2 : Considérations d’ordre commercial

Par Mike Stevenson et Tamara Nachmani
19 décembre 2023

Ceci est la deuxième partie de notre série sur les fonds de capital-investissement (les « fonds »). Comme nous l’avons mentionné dans notre Bulletin Blakes intitulé Création de fonds 101 : Enjeux liés à la création de fonds de capital-investissement - Partie 1 : Structuration, de nombreux facteurs et enjeux entrent en ligne de compte au moment de créer un fonds, et les enjeux peuvent différer d’un fonds à l’autre en fonction de leur structure, des résultats obtenus par le promoteur à l’égard de fonds antérieurs, du type d’investissement et du secteur ciblés, ainsi que de l’expérience des investisseurs et de leurs conseillers juridiques. Cette semaine, nous étudions les principales considérations d’ordre commercial qui touchent la création de fonds :

  1. Destitution du commandité ou du gestionnaire. Presque toutes les conventions de société en commandite contiennent des dispositions relatives à la destitution du commandité ou du gestionnaire. Étant donné que c’est le commandité qui crée le fonds, il n’y a rien d’étonnant à ce que celui-ci veuille négocier un nombre très limité de circonstances dans lesquelles lui-même ou le gestionnaire peut être destitué. La plupart des commandités tentent de limiter les événements pouvant donner lieu à une destitution aux événements constituant un « motif valable » non susceptible d’être corrigé (comme une violation continue de la convention de société en commandite, le défaut d’exercer ses fonctions ou le fait d’être trouvé coupable d’une infraction criminelle importante) ou pour lesquels les commanditaires autorisent la destitution suivant un vote relativement élevé des commanditaires (aux deux tiers des commanditaires ou plus). Il peut également arriver que la convention de société en commandite prévoie la destitution du commandité sans motif valable avec l’approbation des commanditaires suivant un vote relativement élevé dans ce cas aussi. Habituellement, les promoteurs ne souhaitent pas jouer un rôle passif en tant qu’investisseurs dans un fonds sur lequel ils n’exerceraient aucun contrôle. Lorsque le commandité est destitué, le commanditaire apparenté à celui-ci aura donc souvent le droit de faire racheter ses parts et de faire destituer le gestionnaire du fonds. La convention de société en commandite énonce les modalités économiques précises de la façon dont les participations du commandité (et celles des entités apparentées à celui-ci) dans le fonds, tant les droits à la participation reportée que les participations directes de celui-ci, seront traitées, selon que la destitution est fondée sur un motif valable ou sur des raisons de commodité. La convention de société en commandite doit inclure des dispositions sur la façon d’évaluer les parts du commanditaire apparenté dans de telles circonstances.

  2. Dispositions relatives aux personnes clés. La plupart des fonds prévoient des dispositions sur les personnes clés, qui stipulent que certains particuliers (chacun, une « personne clé ») sont tenus de consacrer une certaine quantité de temps et un certain niveau d’attention au fonds pendant toute la période visée par les engagements. Le temps et l’attention requis peuvent différer d’une personne clé à une autre, selon leur rôle au sein du fonds. Par exemple, le directeur général d’une importante plateforme qui est un promoteur du fonds pourrait faire partie des personnes clés. Le temps et l’attention de celui-ci pourraient être consacrés à la stratégie axée sur les capitaux propres du promoteur, plutôt qu’au fonds spécifiquement, alors que dans le cas d’autres personnes clés, celles-ci pourraient être appelées à consacrer leur temps et leur attention au fonds (et peut-être aux fonds précédents de ce dernier).

    Un événement concernant des personnes clés (un « événement concernant des personnes clés ») se produit lorsqu’une personne clé précise ou de multiples personnes clés précises ne consacrent plus le temps et l’attention requis, soit parce qu’elles ne travaillent plus pour le promoteur, soit parce qu’elles conseillent dorénavant une nouvelle partie de la plateforme. Si un tel événement se produit, la période visée par les engagements est généralement suspendue pendant un certain temps jusqu’à ce que le comité consultatif des commanditaires du fonds (le « CCC ») ou un pourcentage précis des commanditaires votent en vue de remplacer la ou les personnes clés absentes ou de permettre que la période visée par les engagements se poursuive sans une ou plusieurs personnes clés remplaçantes. Si ni l’une ni l’autre des options n’est approuvée, la période visée par les engagements prend fin automatiquement après un délai déterminé.

    Un événement concernant des personnes clés peut se produire si un particulier précis se retire, particulièrement dans le cas d’un promoteur plus récent, ou, ce qui arrive plus souvent lorsqu’il s’agit de promoteurs plus expérimentés, si un certain nombre de particuliers précis quittent le fonds. Il existe également une tendance de plus en plus populaire consistant à utiliser un système de points selon lequel chaque personne clé se voit attribuer des points (se situant habituellement entre ½ point et 2 points). Si le nombre total de points attribués aux personnes clés tombe sous un nombre précis, un événement concernant des personnes clés se produit (p. ex. un fonds compte au départ 13 points relatifs aux personnes clés; si ce nombre baisse et représente moins de 7 points relatifs aux personnes clés, un événement relatif aux personnes clés se produit). Ceci procure une souplesse accrue au promoteur.

    Récemment, des promoteurs expérimentés ont supprimé toutes les dispositions sur les événements concernant des personnes clés de leur convention de société en commandite, en invoquant le fait que la réussite du fonds dépend de l’intégralité de la plateforme du promoteur, et non sur l’expertise de quelques particuliers. Cette approche est cependant moins couramment utilisée et les commanditaires continuent d’insister sur l’inclusion de dispositions prévoyant le recours à des personnes clés.

  3. Conflits d’intérêts et fonds concurrents. De nombreux promoteurs de fonds ayant fait leurs preuves ont mis en place différents fonds ou d’autres structures d’investissement, y compris des coentreprises avec d’autres parties à l’extérieur d’une structure de fonds et avec des comptes gérés distincts. Les parties ont intérêt à négocier entre elles la meilleure façon de traiter les possibilités de conflit d’intérêts. Le promoteur voudra s’assurer que ses autres activités d’investissement ne font pas l’objet de restrictions, tandis que les commanditaires voudront s’assurer que le commandité se consacre à la réussite du fonds dans lequel ils ont investi et qu’ils se voient offrir en premier les occasions qui répondent aux lignes directrices du fonds en matière d’investissement. Les commandités feraient bien de se pencher sur les lignes directrices en matière d’investissement pour veiller à ce que celles-ci soient claires quant aux types d’investissement que le fonds peut faire. Certains fonds ont conclu des ententes intergroupes ou ont mis en place une politique de répartition formelle qui établissent clairement que le fonds, en tant que membre d’un tel groupe, aura un droit de premier refus à l’égard des occasions applicables. Dans le cas de fonds qui font partie d’une série de fonds lancés par un promoteur dans une même catégorie d’actifs (p. ex., un fonds d’infrastructure I, un fonds d’infrastructure II, etc.), la convention de société en commandite inclura normalement une interdiction pour le promoteur de lancer ultérieurement un fonds similaire ou concurrent avant la fin de la période d’investissement du fonds ou avant qu’un pourcentage important (p. ex. 80 %) du capital engagé du fonds ait été investi.

  4. Coinvestissements. Bon nombre de commanditaires demanderont, à titre de condition pour investir dans le fonds, d’avoir le droit de « coinvestir » avec le fonds dans le cadre d’investissements qui requièrent du capital en sus du montant que le fonds est en mesure d’investir. La possibilité de coinvestir est souvent accordée aux investisseurs piliers ou à d’autres grands investisseurs afin de leur permettre d’engager du capital au-delà d’un certain seuil. Différents éléments clés seront pris en considération, à savoir, si le commanditaire a le droit de participer à toutes les occasions de coinvestissement ou si ces occasions sont laissées uniquement à l’appréciation du commandité, et le montant des honoraires, le cas échéant, que le commanditaire coinvestisseur devra payer au gestionnaire outre ceux qui sont indirectement payables par le biais de la participation du commanditaire dans le fonds. Les coinvestissements peuvent constituer d’importants outils de commercialisation pour les promoteurs, car les commanditaires souhaitent de plus en plus faire des investissements directs. Depuis peu, en raison de défis liés à la levée de fonds, les investisseurs intéressés à coinvestir avec le promoteur peuvent se voir offrir une telle occasion pourvu qu’ils investissent également dans le fonds du promoteur ou en guise d’incitatif à investir dans le fonds.

  5. Utilisation de lettres d’accompagnement. Parmi les principales décisions que le fonds doit prendre, il y a celle qui concerne le fait de permettre, ou non, l’utilisation de « lettres d’accompagnement ». Une lettre d’accompagnement est une entente entre le commandité et un commanditaire, laquelle entente ne fait pas partie de la convention de société en commandite et confère des droits additionnels au commanditaire en ce qui a trait au fonds. D’après ce que nous avons constaté, la majorité des fonds autorisent la conclusion de lettres d’accompagnement, tout particulièrement dans le cadre d’efforts de commercialisation auprès d’investisseurs institutionnels. Bon nombre d’investisseurs avertis possèdent leur propre modèle de lettre d’accompagnement et s’attendent à ce que le commandité accepte celle-ci dans le cours normal, ou qu’il adapte celle-ci pour la rendre conforme au libellé standard utilisé par le fonds. Bien que le présent bulletin ne présente pas un examen détaillé des différents types de dispositions figurant souvent dans les lettres d’accompagnement, mentionnons que les dispositions les plus courantes portent notamment sur des restrictions quant à l’utilisation du nom de la société en commandite, le droit de recevoir des rapports plus détaillés, les consentement préalables à l’égard des cessions de parts, les nominations au conseil consultatif (le cas échéant) et des dispositions relatives aux préoccupations particulières d’investisseurs institutionnels en matière de réglementation (p. ex., les régimes de retraite réglementés). De nombreuses lettres d’accompagnement comprennent également une clause relative à la « nation la plus favorisée » (« NPF »), laquelle oblige le commandité à offrir à un commanditaire les mêmes droits prévus dans une lettre d’accompagnement qui sont accordés à tout autre investisseur dont l’engagement est égal ou inférieur à celui du commanditaire. Il est conseillé aux commandités d’étudier soigneusement les demandes figurant dans une lettre d’accompagnement afin de s’assurer qu’ils ont le pouvoir d’accorder de tels droits, et que les droits accordés le sont de manière uniforme dans le but de faciliter le processus relatif à la NFP. Le commandité ne peut toutefois pas accepter une disposition d’une lettre d’accompagnement ayant pour effet de modifier (voire, de violer) une disposition de la convention de société en commandite, même si cela ne concerne que le commanditaire qui en a fait la demande.

Vos conseillers juridiques sont en mesure de vous aider à bien comprendre les différents facteurs qui doivent être pris en considération au moment de créer un fonds de capital-investissement ou d’investir dans un tel fonds. Vous serez alors en mesure de déterminer la meilleure façon de traiter ces facteurs dans le cadre de votre propre fonds ou de votre investissement dans un fonds de capital-investissement.

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