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Élection de 2025 en Ontario : Considérations commerciales et juridiques

4 février 2025

À la suite de l’annonce par le premier ministre Doug Ford d’une élection provinciale anticipée en Ontario, les entreprises qui participent ou prévoient de participer au processus politique doivent tenir compte du régime rigoureux relatif à la publicité politique de tiers, des plafonds de contribution prévus à la Loi sur le financement des élections de l’Ontario (la « LFE »), ainsi que des règles relatives au lobbying et aux conflits d’intérêts énoncées dans la Loi de 1998 sur l’enregistrement des lobbyistes de l’Ontario (la « LEL »).

Règles relatives au financement électoral et aux contributions électorales

Obligations des tiers

Lorsqu’une élection est déclenchée à l’improviste, des plafonds sont appliqués aux dépenses des tiers entre la date de l’avis d’élection et la date de fin du vote (la « période électorale »). Pendant cette période, les tiers ne peuvent dépenser plus de 5 028 $ CA par circonscription et 125 700 $ CA au total en publicité politique.

La « publicité politique » comprend un large éventail de types de publicité liés aux questions d’intérêt public et ne se limite pas aux publicités partisanes visant spécifiquement à mettre en valeur un candidat ou un parti ou à s’y opposer. Elle comprend notamment la « publicité liée à un enjeu particulier », laquelle peut s’appliquer à une vaste gamme de questions d’intérêt public étroitement associées à un dirigeant politique, à un candidat ou à un parti. Aux termes des lignes directrices émises par Élections Ontario, « [pour] établir si une question donnée est « étroitement associée » à un parti, à son chef ou à un candidat, il y a lieu d’examiner les questions susceptibles d’être abordées au cours de la campagne électorale à venir, ou celles qui sont clairement associées à un parti, à un chef ou à un candidat en particulier dans le discours public ».

Par conséquent, les tiers devraient porter une attention particulière aux questions d’intérêt public sur lesquelles prendront position les dirigeants politiques, les candidats et les partis durant la période électorale. Les publicités portant sur des questions d’intérêt public pourraient ne pas être visées initialement par la LFE, mais pourraient subséquemment être considérées comme des publicités liées à un enjeu particulier au fil de la période électorale. La LFE prévoit des critères détaillés permettant de déterminer si une publicité liée à un enjeu particulier constitue une publicité politique.

Un tiers qui engage des dépenses de 500 $ CA ou plus à des fins de publicité politique durant la période électorale doit s’inscrire auprès d’Élections Ontario et, dans certains cas, produire des rapports provisoires.

De plus, les tiers ne peuvent ni esquiver ni tenter d’esquiver le plafond de dépenses électorales, notamment en se divisant eux-mêmes en plusieurs tiers dans ce but, ou en agissant de concert avec un autre tiers de sorte que le total de leurs dépenses électorales dépasse ce plafond.

La violation de la LFE peut entraîner de lourdes amendes et donner lieu à des conséquences sur le plan de la réputation.

Contestations de la constitutionnalité de la LFE : non pertinentes pour cette élection

Les plafonds applicables aux dépenses des tiers pendant la période électorale ne sont pas visés par la contestation constitutionnelle en cours. Comme nous l’avons mentionné dans un Bulletin Blakes, la Cour d’appel de l’Ontario a jugé inconstitutionnelles les limites relatives à la publicité faite par des tiers pendant une période préélectorale (c.-à-d. la période de 12 mois précédant le dépôt d’un décret prévu). La Cour suprême du Canada a entendu l’appel de cette décision en mai 2024. Le plus haut tribunal a pris le jugement en délibéré et n’a pas, en date du présent bulletin, rendu sa décision.

De toute façon, la contestation constitutionnelle ne porte que sur les dépenses faites par des tiers pendant la période préélectorale et n’a pas d’incidence sur les dépenses pendant la période électorale elle-même.

Plafond des contributions

Toute personne souhaitant effectuer une contribution à un parti politique, à une association de circonscription ou à un candidat au cours de cette période électorale doit tenir compte des règles limitant les contributions.

Une contribution peut être pécuniaire ou sous forme d’un large éventail de biens ou de services, y compris en nature. Sont exclus de la définition d’une contribution effectuée à un parti politique, à une association de circonscription, à un candidat, à un candidat à l’investiture ou à un candidat à la direction d’un parti :

  1. les articles fabriqués, ou les services fournis, dans le cadre d’un travail bénévole;
  2. les contributions pécuniaires et les contributions sous forme de biens ou de services qui sont inscrites aux termes de la LFE.

En vertu de la LFE, une contribution ne peut être faite que par un particulier. Ni une personne morale ni un syndicat ne peut effectuer une contribution. De plus, un particulier ne peut effectuer une contribution si les fonds en question ne lui appartiennent pas, ou si les fonds lui ont été donnés par un autre particulier, une personne morale ou un syndicat aux fins d’effectuer une contribution. Par conséquent, les employés d’une société ne peuvent pas effectuer une contribution dans le but d’en demander le remboursement (à titre de dépense) auprès de la société.

À noter également, une contribution ne peut être effectuée par un particulier qui réside habituellement à l’extérieur de l’Ontario.

Les contributions effectuées par un particulier au cours de l’année civile 2025 ne doivent pas dépasser les seuils suivants :

  1. une contribution totale de 3 400 $ CA, au cours d’une année civile, à un parti inscrit;
  2. une contribution totale de 3 400 $ CA, au cours d’une année civile, à des associations de circonscription inscrites et aux candidats à l’investiture inscrits d’un parti inscrit;
  3. une contribution totale de 3 400 $ CA, au cours d’une année civile, aux candidats inscrits d’un parti inscrit;
  4. une contribution totale de 3 400 $ CA, au cours d’une année civile, à tout candidat inscrit qui n’est pas parrainé par un parti inscrit;
  5. une contribution totale de 3 400 $ CA, au cours d’une année civile, à tout candidat à la direction inscrit d’un parti inscrit au cours d’une année civile dans laquelle se situe une période de campagne de désignation du chef d’un parti ou pendant laquelle ce candidat est tenu de s’inscrire.

Les contributions anonymes ne sont permises qu’à concurrence de 10 $ CA par personne si elles sont recueillies lors d’une assemblée tenue au nom d’un candidat, d’un parti politique ou d’une association de circonscription inscrit, ou d’une assemblée tenue dans le cadre des affaires d’un candidat, d’un parti politique ou d’une association de circonscription inscrit.

Règles relatives au lobbying et aux conflits d’intérêts

Au rythme effréné des campagnes électorales, lesquelles peuvent parfois aussi tourner au drame, il est souvent trop facile d’oublier que les règles sur le lobbying et les conflits d’intérêts continuent de s’appliquer. Ces règles régissent strictement la façon dont les particuliers et les entreprises interagissent avec les décideurs au sein des gouvernements. Par prudence, les entreprises devraient continuer de respecter les obligations d’enregistrement qui s’appliquent aux lobbyistes, ainsi que les restrictions relatives aux dons offerts aux titulaires de charge publique.

Enregistrement à titre de lobbyiste

Si vous ou un membre de votre entreprise ou organisation communiquez avec le titulaire d’une charge publique pour tenter d’influencer certaines décisions du gouvernement de l’Ontario, vous pourriez être considéré comme un lobbyiste et devez donc enregistrer vos activités à ce titre en vertu de la LEL.

Un titulaire d’une charge publique s’entend des personnes suivantes :

  • les ministres, fonctionnaires et employés de la Couronne;
  • les députés à l’Assemblée législative et les membres de leur personnel (mais pas les candidats à une élection);
  • les personnes nommées à des charges ou à des organismes par le lieutenant-gouverneur en conseil ou un ministre de la Couronne, ou avec son approbation, à l’exclusion des juges et des juges de paix;
  • les dirigeants, administrateurs et employés de tout organisme, conseil ou commission de la Couronne;
  • les membres de la Police provinciale de l’Ontario;
  • les dirigeants, administrateurs et employés d’Ontario Power Generation Inc. et de chacune de ses filiales, ainsi que de la Société indépendante d’exploitation du réseau d’électricité.

Aux termes de la LEL, il existe deux types de lobbyistes : 1) le lobbyiste salarié qui, seul ou avec d’autres membres de l’entreprise ou l’organisation dont il est à l’emploi, consacre au moins 50 heures par année à exercer des activités de lobbying pour le compte de ladite entreprise ou organisation; et 2) le lobbyiste-conseil qui, moyennant paiement, s’engage à exercer des activités de lobbying pour le compte d’un client.

Une activité de lobbying (ou, « exercer des pressions », soit le terme utilisé dans la LEL) se veut toute communication avec le titulaire d’une charge publique afin d’influencer des décisions concernant :

  • l’élaboration de propositions législatives par le gouvernement de l’Ontario ou par un député à l’Assemblée législative;
  • le dépôt d’un projet de loi ou d’une résolution devant l’Assemblée législative, ou sa modification, son adoption ou son rejet par celle-ci;
  • la prise ou la modification d’un règlement;
  • l’élaboration, la mise en œuvre, la modification ou la cessation d’un programme, d’une politique, d’une directive ou d’une ligne directrice du gouvernement de l’Ontario;
  • l’octroi d’une subvention ou d’un autre avantage financier par le gouvernement de l’Ontario ou pour son compte;
  • le transfert d’un intérêt du gouvernement de l’Ontario dans une entreprise qui fournit des biens ou des services à la Couronne ou au public;
  • la privatisation de la fourniture de biens ou de services au gouvernement de l’Ontario.

Pour les lobbyistes-conseils, deux autres activités sont considérées comme des activités de lobbying : organiser une entrevue avec un titulaire d’une charge publique, ainsi que communiquer avec le titulaire d’une charge publique afin de tenter d’influencer l’octroi d’un contrat. Les lobbyistes salariés peuvent communiquer avec des titulaires de charge publique au sujet de l’octroi de contrats sans que cela soit considéré comme étant une activité de lobbying.

Certaines activités ne sont pas considérées comme des activités de lobbying, notamment la présentation d’observations dans le cadre de procédures publiques devant un comité législatif, ainsi que la présentation d’observations par un particulier au titulaire d’une charge publique à l’égard de l’exécution, de l’interprétation ou de l’application d’une loi, ou encore de la mise en œuvre ou de l’application, par le titulaire de la charge publique, d’une politique, d’un programme, d’une directive ou d’une ligne directrice.

Tout manquement aux obligations en matière d’enregistrement à titre de lobbyiste conformément à la LEL peut entraîner des amendes et l’interdiction d’exercer des activités de lobbyiste pendant une période de deux ans. Toute personne ayant manqué à ces obligations pourrait également s’exposer au risque d’une atteinte à sa réputation.

Règles relatives aux conflits d’intérêts

Un lobbyiste ne doit pas placer sciemment un titulaire d’une charge publique en situation de conflit d’intérêts réel ou possible. Ce serait le cas, par exemple, si un tel titulaire acceptait un don ou un avantage personnel.

Le Bureau du commissaire à l’intégrité de l’Ontario (le « Bureau ») a publié un bulletin d’interprétation, lequel précise qu’un « don » peut prendre la forme d’un repas, d’un billet pour un événement, d’un voyage, de fleurs ou d’un panier-cadeau. De petites marques de gratitude peuvent être offertes ou données à des titulaires de charge publique. Les lobbyistes devraient consulter le Bureau avant d’offrir un cadeau afin de s’assurer de leur conformité à la LEL.

Pour en savoir davantage, communiquez avec l’un des auteurs du présent bulletin ou un autre membre de notre groupe Secteur public, crise et conformité.

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