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Éléments clés à surveiller dans le domaine des prêts de capital de risque

25 février 2025

Introduction

Les prêts de capital de risque jouent un rôle de premier plan sur le marché canadien du capital de risque, et la taille du marché des prêts de capital de risque continue de croître.

Selon l’Association canadienne du capital de risque et d’investissement, en 2024, le marché canadien des prêts de capital de risque a totalisé 881 M$ CA, dépassant de 99 % les niveaux de 2023. Les investissements de 2024 ont surtout eu lieu pendant le deuxième semestre de l’année. En effet, aux troisième et quatrième trimestres, les opérations ont représenté 75 % du marché canadien des prêts de capital de risque déployés. En 2024, 35 opérations de prêt de capital de risque ont été conclues, soit une baisse de 33 % par rapport à 2023. La vigueur du marché canadien des prêts de capital de risque a été semblable à celle du marché américain en 2024. Selon Pitchbook, aux États-Unis, les prêts de capital de risque ont totalisé 53,3 G$ US, en hausse de 94,5 % par rapport à 27,4 G$ US en 2023.

Alors que les niveaux d’activité sur le marché des prêts de capital de risque au Canada en 2023 ont été inférieurs à ceux de 2022, notamment en raison des faillites de Silicon Valley Bank et de Signature Bank, la reprise enregistrée en 2024 dans le domaine du financement par capital de risque indique que les prêts de capital de risque continuent de représenter une option vitale pour les entreprises en démarrage canadiennes qui peinent à mobiliser des capitaux ou dont les paramètres d’évaluation ne les avantagent pas, et qui cherchent des solutions de rechange en matière de financement.

Dans quels cas devrait-on avoir recours à un prêt de capital de risque?

Les prêts de capital de risque sont des produits spécialisés qui peuvent être utiles aux entreprises en démarrage dans certains cas stratégiques. Leur utilité la plus évidente est de permettre à l’entreprise de poursuivre son exploitation jusqu’à la prochaine ronde de financement ou jusqu’à une éventuelle sortie. Il est essentiel que l’entreprise atteigne certains objectifs pour accroître sa valeur avant de procéder à une nouvelle ronde de financement. Si le lancement du produit de l’entreprise est retardé pour quelque raison que ce soit, un prêt de capital de risque peut procurer à l’entreprise les ressources nécessaires à l’atteinte de l’objectif qui lui permettra de procéder à la prochaine émission d’actions. Sans le prêt de capital de risque, l’entreprise pourrait devoir mobiliser des fonds à une valeur inférieure (parce qu’elle n’a pas encore lancé son produit, par exemple), ce qui pourrait avoir un effet très dilutif pour les actionnaires existants. Dans le pire des cas, l’entreprise pourrait arriver au bout de ses ressources et être incapable de mobiliser des fonds sans avoir atteint l’objectif.

D’un point de vue stratégique, les prêts de capital de risque peuvent être utilisés comme levier en parallèle avec une émission d’actions. Prenons le cas d’une entreprise en démarrage qui a réuni 10 M$ CA dans le cadre d’un financement de série A et qui projette un taux de croissance annualisé de 5 M$ CA. L’entreprise serait alors en mesure de réunir cinq fois ses produits lors de sa ronde de série B, mais si elle obtenait un prêt de capital de risque de 2,5 M$ CA tout de suite après son financement de série A, elle pourrait utiliser ces fonds supplémentaires pour propulser sa croissance. En augmentant ainsi son taux de croissance annualisé, elle accroîtrait la valeur de sa ronde de série B, ce qui réduirait l’effet dilutif pour les actionnaires existants.

Dans chaque cas, les prêts de capital de risque peuvent servir de point de départ ou de source de financement pour les entreprises en démarrage qui ne sont pas encore prêtes à obtenir du financement auprès de prêteurs conventionnels, ou celles qui ne souhaitent pas réunir des capitaux propres, parce qu’elles sont financées par des investisseurs providentiels, des amis, des membres de la famille ou des sources de capitaux propres semblables. 

Qu’est-ce qu’un prêt de capital de risque?

Un prêt de capital de risque est un type de financement adapté aux entreprises en démarrage, compte tenu spécialement des risques inhérents à celles-ci, de leur capacité limitée d’assurer le service de la dette à court terme et de leur besoin de liquidité. Le prêt de capital de risque vient compléter le financement par capital de risque et vise à soutenir la croissance et l’expansion d’une entreprise en démarrage. Le texte qui suit décrit certaines des principales caractéristiques des prêts de capital de risque. 

Montant

Les prêts de capital de risque représentent généralement entre 20 % et 40 % de la dernière ronde de financement par capitaux propres d’une entreprise en démarrage. Ce montant est habituellement suffisant pour procurer à l’entreprise des ressources de trésorerie pouvant durer jusqu’à six mois.

Durée

En raison de l’avenir imprévisible des entreprises en démarrage, les prêts de capital de risque sont généralement offerts à court terme, habituellement sur trois ans, contrairement à un prêt conventionnel qui a souvent une durée de cinq ans. La durée du prêt peut être structurée de façon à comprendre à la fois une « période de prélèvement » et une « période de paiement des intérêts seulement ». La période de prélèvement est la période pendant laquelle des avances peuvent être consenties à l’emprunteur et la période de paiement des intérêts seulement est la période qui précède le moment où l’emprunteur doit commencer à effectuer des remboursements de capital pour amortir la dette.

Tarification

Divers éléments, notamment les intérêts et d’autres frais, entrent dans la tarification des prêts de capital de risque pour compenser les risques auxquels s’exposent les prêteurs.

Le taux d’intérêt imputé sur les prêts de capital de risque est habituellement supérieur au taux préférentiel; historiquement situé dans une fourchette de 7 % à 12 %, il a augmenté dans le contexte du marché actuel. En règle générale, les emprunteurs ne doivent payer que les intérêts sur le capital prélevé chaque mois. Les intérêts peuvent être payables (1) « en espèces », auquel cas ils sont payés à raison d’un pourcentage du prêt; (2) « en nature », auquel cas ils sont ajoutés au solde du capital et sont payés à la fin de la durée du prêt pour éviter les problèmes de trésorerie; ou (3) en une combinaison des deux.

Un prêteur peut également obtenir compensation en exigeant divers autres frais, notamment des frais de montage ou d’administration. Certains prêteurs offrent une structure de tarification dans laquelle des « frais reportés » sont payables à l’échéance ou au refinancement du prêt. Les frais reportés permettent à l’emprunteur de payer au moyen des bénéfices futurs au lieu d’utiliser ses liquidités actuelles.

Bons de souscription

Les bons de souscription sont un autre élément qui entre souvent dans la tarification des prêts de capital de risque et qui diffère du marché des prêts conventionnels. Les bons de souscription constituent une solution de rechange à certains frais initiaux ou à des taux d’intérêt excessivement élevés, ce qui, pour bon nombre d’entreprises en démarrage, nécessiterait trop de liquidités. Un bon de souscription donne au prêteur le droit de souscrire des actions de l’entreprise en démarrage à un prix convenu et de participer ainsi à la croissance de l’entreprise. Bien que les bons de souscription soient des titres, leurs porteurs n’ont pas de priorité en cas de liquidation et sont donc exposés au risque que l’entreprise fasse faillite avant l’exercice des bons de souscription. 

Un bon de souscription comporte quatre caractéristiques principales : (1) la couverture, (2) le prix d’exercice, (3) la date d’expiration et (4) le titre sous-jacent. 

  • La couverture s’entend du nombre d’actions que le porteur du bon de souscription a le droit de souscrire et est exprimée en pourcentage du montant du prêt. Les bons de souscription représentent généralement entre 5 % et 20 % de la valeur du prêt.
  • Le prix d’exercice est le prix fixe auquel les bons de souscription peuvent être exercés. Il correspond habituellement à la juste valeur marchande au moment de l’émission; cependant, les parties peuvent négocier un autre prix.
  • La date d’expiration est la date limite à laquelle le bon de souscription peut être exercé. Cet exercice peut avoir lieu jusqu’à 15 ans après l’émission.
  • Le titre sous-jacent s’entend des actions que le porteur du bon de souscription a le droit de souscrire. Comme il est peu probable que les prêteurs exercent un bon de souscription avant un cas de liquidation, ceux-ci n’ont pas avantage à recevoir des actions privilégiées. Les bons de souscription exercés permettent habituellement d’obtenir une participation d’au plus 2 % dans la société.

Clauses restrictives

Les contrats de prêt contiennent généralement des clauses restrictives qui empêchent l’emprunteur de prendre certaines mesures susceptibles de nuire à sa capacité de rembourser le prêteur. Ces clauses sont habituellement rattachées à des cas de défaut, de sorte que si l’emprunteur ne respecte pas une clause, le prêt devra être remboursé immédiatement. 

Les contrats de prêt de capital de risque contiennent souvent des clauses adaptées aux activités sur lesquelles l’entreprise en démarrage a un contrôle et peuvent prévoir des restrictions sur la capacité de l’emprunteur de contracter de nouvelles dettes, de rembourser ses dettes existantes, de transférer sa propriété intellectuelle et d’aliéner ses actifs. Ces clauses sont semblables à celles des contrats de prêt conventionnel, mais offrent une plus grande souplesse. 

Dans le contexte des prêts de capital de risque, il est souvent inapproprié d’imposer des clauses restrictives très contraignantes puisque les entreprises en démarrage doivent par nature se consacrer énergiquement à la poursuite d’occasions de croissance, ce que les clauses restrictives les empêcheraient de faire. Par conséquent, les contrats de prêt de capital de risque contiennent souvent des clauses limitées qui laissent à l’emprunteur une plus grande marge de manœuvre pour exploiter son entreprise.

Clauses financières

Les contrats de prêt de capital de risque comportent souvent des clauses financières limitées. En particulier, on y retrouve rarement des clauses relatives au levier financier, au service de la dette ou au ratio de couverture de la dette ou des charges fixes, mais ces contrats peuvent contenir des clauses en matière de produits mensuels récurrents et de croissance. 

Les contrats de prêt de capital de risque peuvent stipuler qu’un changement défavorable important dans l’entreprise ou le soutien des investisseurs constitue un cas de défaut. Bien que de tels cas de défaut remplissent un objectif semblable à celui des clauses financières, le prêteur dispose d’une plus grande latitude pour décider si un manquement s’est produit et s’il y a lieu de mettre fin à l’octroi de financement supplémentaire.

Garantie

Les prêts conventionnels sont habituellement garantis par des flux de trésorerie positifs et des biens matériels, tandis que les prêts de capital de risque sont garantis principalement par la propriété intellectuelle. En règle générale, les prêteurs qui consentent des prêts de capital de risque n’exigent pas de garantie personnelle. Bien que les prêts de capital de risque soient le plus souvent structurés comme des prêts garantis de rang supérieur, certains prêteurs accepteront une position de rang inférieur dans certaines circonstances et augmenteront le prix à payer en conséquence. De plus, certains prêteurs peuvent accepter de subordonner des prêts de capital de risque à des prêts de rang supérieur conventionnels consentis par des banques ou d’autres prêteurs conventionnels à un coût du capital sensiblement inférieur, qu’ils considèrent comme avantageux pour l’entreprise en démarrage.

Pourquoi une entreprise en démarrage devrait-elle opter pour un prêt de capital de risque plutôt que pour un financement par capitaux propres conventionnel?

Bien que les prêts de capital de risque soient souvent utilisés en complément des financements par capitaux propres, il y a des distinctions à faire entre les deux et les prêts de capital de risque comportent des avantages uniques. Par exemple, puisque les bons de souscription représentent habituellement des participations de moins de 2 % dans l’entreprise, l’effet dilutif d’un prêt de capital de risque est relativement faible. Par conséquent, malgré les coûts plus élevés qui y sont associés, les prêts de capital de risque représentent souvent une option moins coûteuse que les capitaux propres, particulièrement sur le plan du coût en capital. Malgré les nombreux avantages que présentent les prêts de capital de risque, les entreprises en démarrage doivent faire preuve de prudence, car elles devront rembourser les fonds à la fin de la durée du prêt quelle que soit leur situation financière, ce qui peut soumettre l’emprunteur à une pression considérable.

À qui s’adressent les prêts de capital de risque et quand une entreprise en démarrage devrait-elle envisager d’obtenir ce type de prêt?

Les prêts de capital de risque sont offerts à la fois par des banques et par des prêteurs non bancaires qui privilégient les emprunteurs ayant réuni des capitaux auprès de sources institutionnelles telles que des sociétés de capital de risque plutôt qu’auprès d’investisseurs privés. Avant de décider de consentir un prêt de capital de risque à un emprunteur qui est une entreprise en démarrage, les prêteurs examineront le rendement antérieur et la réputation de la société de capital de risque participante. Les prêteurs préfèrent les entreprises en démarrage évolutives dont le taux de croissance actuel ou prévu est élevé.

Le meilleur moment pour qu’une entreprise en démarrage soit en mesure d’obtenir un prêt de capital de risque est celui où elle dispose de ressources de trésorerie (par exemple, peu après un financement par capitaux propres). C’est à ce moment-là que l’entreprise en démarrage est la plus solvable et a le pouvoir de négociation le plus fort.

Avant de contracter un prêt de capital de risque, une société en démarrage doit tenir compte des caractéristiques et des risques uniques associés à ce type de prêt. Si l’entreprise en démarrage décide que cette solution lui convient, plusieurs options s’offrent à elle pour demander un prêt de capital de risque au Canada. 

Pour en savoir davantage, communiquez avec l’un des auteurs ou un autre membre de notre groupe Entreprises émergentes et capital de risque

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