Le 21 novembre 2023, la ministre fédérale des Finances (la « ministre ») a publié l’Énoncé économique de l’automne de 2023 (l’« ÉÉA ») du Canada. L’ÉÉA porte principalement sur diverses mesures d’abordabilité à l’intention des Canadiens et l’augmentation du nombre de logements au pays, notamment le nombre de logements à prix abordables. Bien que l’ÉÉA comporte relativement peu de mesures fiscales, il présente tout de même certains éléments d’intérêt aux contribuables, particulièrement aux entreprises qui ont recours à des prêts gouvernementaux pour obtenir du financement et aux entreprises du secteur de l’énergie propre.
Faits saillants
Plusieurs mesures fiscales annoncées dans l’ÉÉA constituent de bonnes nouvelles pour les contribuables. Les contribuables qui obtiennent un financement sous forme de prêt gouvernemental remboursable seront heureux de constater les changements apportés au traitement de tels prêts en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (« LIR ») par suite de la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire CAE Inc. c. La Reine (l’« affaire CAE »). Les propriétaires d’immeubles résidentiels canadiens seront également heureux de constater les modifications apportées aux exigences relatives à la taxe sur les logements sous-utilisés. Ces modifications viendront réduire considérablement le fardeau administratif des contribuables qui sont exonérés de cette taxe.
L’ÉÉA comprend également des renseignements supplémentaires et des lignes directrices additionnelles au sujet du crédit d’impôt à l’investissement pour l’hydrogène propre (le « CII pour l’hydrogène propre »), du crédit d’impôt à l’investissement pour les technologies propres (le « CII pour les pour les technologies propres ») et du crédit d’impôt à l’investissement pour l’électricité propre (le « CII pour l’électricité propre »). Des changements attendus depuis longtemps apportés au choix visant une coentreprise en vertu de la Loi sur la taxe d’accise (la « LTA ») sont également inclus dans l’ÉÉA.
Table des matières
Mesures visant l’impôt sur le revenu des sociétés
Déduction des dividendes reçus par des institutions financières
CII pour les technologies propres et CII pour l’électricité propre
Mesures visant les taxes de vente
Mesures visant l’impôt sur le revenu des sociétés
Prêts concessionnels
L’ÉÉA propose de modifier la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») afin de prévoir que les prêts remboursables de bonne foi qui sont émis par des administrations publiques, qui ne portent pas intérêt ou qui porte intérêt à des taux inférieurs au marché (c’est-à-dire des prêts concessionnels) et dont les modalités de remboursement sont raisonnables, ne soient pas, de façon générale, considérés comme de l’« aide gouvernementale » aux fins de l’impôt sur le revenu.
Il pourrait y avoir plusieurs incidences fiscales dans les circonstances où un contribuable reçoit un montant considéré comme de l’aide gouvernementale, notamment la réduction du montant d’une dépense connexe ou du coût en capital d’un bien connexe, ou l’inclusion d’un tel montant au revenu du contribuable, ou encore la réduction du montant d’une dépense à laquelle se rapporte un crédit d’impôt à l’investissement.
L’ÉÉA tient compte du fait que, dans le passé, les prêts concessionnels n’étaient pas considérés comme de l’aide gouvernementale aux fins de la LIR. Or, dans les décisions de la Cour canadienne de l’impôt et de la Cour d’appel fédérale qui ont été rendues dans le cadre de l’affaire CAE, il a été statué que le montant complet du principal d’un prêt concessionnel représentait de l’aide gouvernementale. Cette nouvelle interprétation pourrait entrainer des incidences fiscales imprévues, incertaines et possiblement considérables pour bon nombre de contribuables, ainsi que pour les organismes gouvernementaux qui accordent des prêts concessionnels dans le but d’atteindre divers objectifs d’ordre public et commercial. En mai 2023, les préoccupations à cet effet se sont accrues lorsque la Cour suprême du Canada a rejeté la demande déposée par CAE Inc. auprès de cette dernière pour obtenir l’autorisation d’interjeter appel de la décision rendue dans cette affaire.
Autre point d’intérêt, le tableau des impacts des mesures fiscales sur les revenus (soit le Tableau 1) n’indique aucun changement au chapitre des rentrées d’impôt sur le revenu des sociétés qui serait apporté en raison des modifications proposées à l’égard des prêts concessionnels. Les raisons précises ne sont pas claires dans les notes explicatives fournies. Toutefois, une explication possible serait que le ministère des Finances reconnaît que ces prêts n’étaient pas considérés comme de l’aide gouvernementale dans le passé, et donc qu’aucun impact sur les revenus ne devrait résulter de cette modification dans la mesure où ces prêts ne devaient pas être initialement assujettis à l’impôt.
La modification proposée constitue donc une bonne nouvelle et il y a lieu d’espérer qu’elle lèvera les incertitudes découlant des décisions judiciaires rendues dans le cadre de l’affaire CAE ou reflétées dans celles-ci. Il est proposé que la modification législative visant les prêts concessionnels considérés comme de l’« aide gouvernementale » entre en vigueur le 21 novembre 2023. Il est à espérer que les notes explicatives accompagnant le projet de loi visant à mettre en œuvre cette proposition, ainsi que les déclarations futures de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »), permettront d’atténuer les préoccupations selon lesquelles les ententes de prêts concessionnels conclues avant le 21 novembre 2023 poseraient problème à la lumière de l’affaire CAE.
Les contribuables qui ont des questions au sujet de la portée de l’allègement qui pourrait être offert à l’égard de leurs ententes de prêt concessionnel existantes, ou qui prévoient conclure de telles ententes à l’avenir, sont invités à communiquer avec notre groupe Fiscalité pour discuter plus en détail de ces questions.
Déduction des dividendes reçus par des institutions financières
Dans le Budget 2023, le gouvernement fédéral proposait de refuser la déduction des dividendes intersociétés pour les actions de sociétés canadiennes détenues par des institutions financières à titre de biens évalués à la valeur du marché. Les actions sont généralement considérées comme étant des biens évalués à la valeur du marché d’une institution financière, sauf si l’institution financière possède des actions représentant au moins 10% des droits de vote et de la juste valeur marchande de l’émetteur, ou si elle est liée à l’émetteur. Pour connaître notre analyse de cet aspect du Budget 2023, consultez notre Bulletin Blakes intitulé Budget fédéral 2023 : Présentation de certaines mesures fiscales.
L’ÉÉA propose d’exclure les « actions privilégiées imposables » de la proposition prévue au Budget 2023, de sorte que les institutions financières détenant de telles actions à titre de biens évalués à la valeur du marché pourraient possiblement déduire les dividendes versés sur ces actions privilégiées. L’ÉÉA ne fournit pas de libellé législatif précis à cet effet. Il est prévu que ce libellé sera inclus dans le projet de loi sur l’exécution du Budget 2023, lequel devrait être déposé sous peu au Parlement. L’ÉÉA confirme que la mesure éliminant la déduction des dividendes intersociétés, en sa version modifiée par la proposition prévue dans l’ÉÉA, s’appliquerait aux dividendes reçus à compter du 1er janvier 2024.
L’ÉÉA ne fournit aucun raisonnement à l’appui de cette modification proposée au Budget 2023. Le Budget 2023 énonçait que la déduction des dividendes reçus pour les entreprises était incompatible avec la politique qui sous-tend les règles d’évaluation à la valeur du marché, laquelle politique consiste, selon le Budget 2023, à traiter les biens évalués à la valeur du marché comme générateurs d’un revenu d’entreprise. Le Budget 2023 ne précise pas pourquoi cette déduction, qui fournit une mesure d’intégration et qui permet d’éviter la double imposition ou l’imposition multiple des bénéfices des sociétés, est incompatible avec le revenu d’entreprise. Il n’est pas clair non plus pourquoi les règles d’évaluation à la valeur du marché sont considérées comme génératrices d’un revenu d’entreprise en particulier, plutôt que d’un revenu plus général. Il se peut que le ministère des Finances, peut-être en réponse à des observations de parties intéressées, ait conclu que les actions privilégiées imposables sont plus souvent détenues par des institutions financières à titre de placements relativement passifs plutôt que dans le cadre d’un portefeuille dont les titres sont négociés plus activement. Les notes explicatives du projet de loi qui sera déposé clarifieront possiblement davantage ces considérations de politique générale. Notons que la définition d’« action privilégiée imposable » a été élaborée dans le cadre du régime fiscal prévu aux parties IV.1 et VI.1, lequel établit un impôt spécial applicable aux détenteurs et/ou aux émetteurs d’actions privilégiées imposables (sous réserve de certaines exceptions et d’autres allègements); ce régime fiscal avait été adopté pour répondre à des préoccupations de politique générale différentes de celles qui sous-tendent la proposition présentée dans le Budget 2023. La décision du ministère des Finances d’utiliser la définition d’action privilégiée imposable peut découler d’une volonté d’éviter l’introduction de définitions complexes supplémentaires dans la LIR puisque la définition d’action privilégiée imposable est relativement bien établie et qu’elle s’applique vraisemblablement à la plupart des actions émises; et qu’il pourrait de surcroît être difficile d’utiliser la nouvelle exclusion pour éviter le refus de la déduction pour les dividendes reçus. Enfin, il y a lieu de noter que, selon l’ÉÉA, il est estimé que la modification de la proposition générerait des coûts à hauteur de 21 M$ CA entre 2024-2025 et 2028-2029 pour le gouvernement fédéral, par opposition aux économies à hauteur de 3,15 G$ CA qui avaient été prévues au Budget 2023 pour la période de 2024-2025 à 2027-2028 par suite du refus de la déduction pour les dividendes reçus.
CII pour l’hydrogène propre
Le CII pour l’hydrogène propre a été introduit dans l’Énoncé économique de l’automne de 2022 (l’« ÉÉA de 2022 »), et des renseignements additionnels à son sujet ont été fournis dans le Budget 2023. La date d’entrée en vigueur du CII pour l’hydrogène propre était le 28 mars 2023. Pour une analyse des mises à jour apportées par le Budget 2023 au CII pour l’hydrogène propre, consultez notre Bulletin Blakes intitulé Budget fédéral 2023 : Incitatifs fiscaux pour l’énergie verte.
L’ÉÉA fournit de l’information quant aux éléments structurels du CII pour l’hydrogène propre et indique également que le gouvernement fédéral continuera d’examiner l’admissibilité d’autres modes de production d’hydrogène à faibles émissions de carbone d’ici le dépôt du Budget de 2024 (le « Budget 2024 »).
Équipement de production d’ammoniac propre admissible
L’équipement de production d’ammoniac propre est admissible au CII pour l’hydrogène propre à un taux de 15%, sous réserve des conditions suivantes :
le contribuable qui produit l’ammoniac doit produire son propre hydrogène pour fins de sa production d’ammoniac, et les projets d’hydrogène propre du contribuable qui produisent cet hydrogène doivent être admissibles au CII pour l’hydrogène propre;
les projets d’hydrogène propre doivent avoir une capacité suffisante pour répondre aux besoins de l’installation de production d’ammoniac du contribuable;
le contribuable doit démontrer la faisabilité du transport de l’hydrogène des installations de production d’hydrogène jusqu’à l’installation de production d’ammoniac si elles ne sont pas colocalisées.
L’ÉÉA prévoit également que l’équipement qui est utilisé strictement aux fins de la conversion de l’hydrogène propre en ammoniac, ainsi qu’aux fins de la réfrigération et du stockage de l’ammoniac sur place, est admissible. Il fournit également des lignes directrices sur la répartition du coût de l’équipement à « double usage » servant à produire à la fois de l’hydrogène et de l’ammoniac. L’intensité carbonique (« IC ») associée à l’équipement à double usage serait attribuée à l’hydrogène en fonction du ratio d’utilisation attribuable à la production d’hydrogène sur l’utilisation totale (par exemple, l’électricité fournie à l’installation intégrée doit être répartie entre la production d’hydrogène et la production d’ammoniac).
Ententes d’achat d’électricité et autres mécanismes semblables
Les ententes d’achat d’électricité (« EAE ») et d’autres mécanismes semblables qui permettent aux responsables de projets d’acheter de l’électricité propre à partir du réseau électrique sont admissibles aux fins du calcul de l’IC d’un projet, au lieu d’utiliser l’IC du réseau. Cependant, l’électricité achetée doit provenir d’une source hydroélectrique, solaire ou éolienne dont la production a commencé le 28 mars 2023 ou après cette date, et pas plus d’un an avant la présentation de l’analyse initiale de l’IC du projet pour le projet d’hydrogène propre connexe. Cette source doit également se trouver dans la même province ou le même territoire que le projet d’hydrogène propre et être reliée au réseau électrique de cette province ou de ce territoire. De plus, l’énergie achetée par l’intermédiaire de ces mécanismes doit être utilisée aux fins de l’exploitation du projet d’hydrogène propre.
L’ÉÉA présente également des lignes directrices au sujet de la modélisation de l’IC d’un projet.
Gaz naturel renouvelable
L’utilisation du gaz naturel renouvelable (« GNR ») afin de réduire l’IC de la production d’hydrogène est admissible pour calculer l’IC d’un projet, sous réserve des conditions suivantes :
le GNR doit être produit par un fournisseur assujetti au Règlement sur les combustibles propres;
le GNR devrait provenir d’une installation de production dont la production de GNR a commencé pas plus d’un an avant la présentation de l’analyse initiale de l’IC du projet pour le projet d’hydrogène propre connexe;
les producteurs doivent démontrer que le GNR acheté sera utilisé aux fins de l’exploitation du projet d’hydrogène propre.
L’ÉÉA présente aussi des lignes directrices au sujet de la modélisation de l’IC d’un projet.
Analyse initiale, conformité et vérification
L’ÉÉA prévoit que l’analyse initiale de l’IC d’un projet doit être vérifiée au moyen d’un rapport de validation préparé par une firme d’ingénierie canadienne détenant un certificat d’autorisation technique, une couverture d’assurance appropriée et une expertise en modélisation à l’aide du Modèle d’analyse du cycle de vie des combustibles.
Les contribuables devront présenter à Ressources naturelles Canada une analyse initiale de l’IC du projet et un rapport de validation préparé par un tiers, accompagnés de toute documentation requise. Une fois l’IC prévue du projet validée par Ressources naturelles Canada, l’ARC s’occupera d’administrer le CII pour l’hydrogène propre.
Les projets d’hydrogène propre seront assujettis à une vérification unique, sur la base d’une période de conformité de cinq ans. Au cours de cette période, les projets d’hydrogène propre devront calculer et déclarer annuellement l’IC effective de l’hydrogène produit. À la fin de la période, la conformité serait déterminée par l’IC pondérée moyenne sur toute la période. La contribution des mesures annuelles de l’IC à l’IC pondérée moyenne finale serait pondérée selon l’hydrogène produit chaque année. La période de conformité commencerait 120 jours après le début des activités commerciales. Toutefois, les projets auraient la possibilité de repousser d’une année le début de la période. Un deuxième report d’un an est également possible et pourrait être exercé après le premier report d’une année. Ce report a pour but de permettre aux exploitants d’un projet d’apporter les ajustements qui pourraient être nécessaires pour obtenir l’IC prévu de l’hydrogène produit.
Les projets doivent faire vérifier l’IC de l’hydrogène au moyen de rapports de vérification préparés par une firme d’ingénierie canadienne détenant un certificat d’autorisation technique ainsi qu’une couverture d’assurance appropriée, et possédant une expertise en analyse du cycle de vie des émissions de gaz à effet de serre. La firme d’ingénierie qui vérifie les rapports sur l’IC effective durant la période de conformité doit être différente de celle ayant validé l’analyse initiale de l’IC du projet.
Les contribuables doivent également présenter à Ressources naturelles Canada les rapports de vérification préparés par un tiers, accompagnés de toute documentation requise.
Recouvrement
Les projets dont l’IC vérifiée est inférieure à 0,25 kilogramme (kg) d’équivalent dioxyde de carbone (éq. CO2) par kilogramme d’hydrogène par rapport à l’IC validée originale ne sont pas assujettis au recouvrement des montants du CII pour l’hydrogène propre, même si l’IC vérifiée dépasse la limite supérieure du palier d’IC déterminé à l’origine. Les montants du CII pour l’hydrogène propre demandés relativement à l’équipement de production d’ammoniac sont assujettis à un recouvrement complet si le projet de production d’hydrogène qui fournit l’hydrogène utilisé pour la production d’ammoniac a une IC vérifiée de 4 kg ou plus d’éq. CO2 par kilogramme d’hydrogène. Les projets dont l’IC vérifiée est à un palier d’IC inférieur à celui déterminé par l’analyse initiale du projet ne sont pas admissibles à des montants de CII pour l’hydrogène propre supplémentaires relativement à ce palier d’IC inférieur. L’intérêt sur tout recouvrement du montant du CII pour l’hydrogène propre serait calculé à compter du moment où le crédit est demandé.
CII pour les technologies propres et CII pour l’électricité propre
Le CII pour les technologies propres a été introduit dans l’ÉÉA de 2022 et des renseignements additionnels ont été fournis à son sujet dans le Budget 2023. Sa date d’entrée en vigueur est le 28 mars 2023. Des propositions législatives concernant le CII pour les technologies propres ont été publiées le 4 août 2023. Pour une analyse de ces propositions législatives, consultez notre Bulletin Blakes intitulé Le Canada propose des modifications aux incitatifs fiscaux pour l’énergie verte.
Le CII pour l’électricité propre a été introduit dans le Budget 2023. Sa date d’entrée en vigueur sera celle du dépôt du Budget 2024. Ce crédit d’impôt sera disponible à compter de cette date pour les projets dont la construction s’est amorcée après le 27 mars 2023. Pour une analyse des mises à jour apportées par le Budget 2023 au CII pour l’électricité propre, consultez notre Bulletin Blakes intitulé Budget fédéral 2023 : Incitatifs fiscaux pour l’énergie verte.
L’ÉÉA propose d’élargir l’admissibilité au CII pour les technologies propres et au CII pour l’électricité propre afin de soutenir la production d’électricité, de chaleur, ou d’électricité et de chaleur, à partir de déchets de la biomasse. Aux fins de cette admissibilité, les déchets de la biomasse sont, généralement, les déchets de bois, les résidus végétaux, les déchets municipaux, les boues provenant d’une installation de traitement des eaux usées admissible, les liqueurs résiduaires, les déchets alimentaires et animaux, le fumier, les sous-produits de pâtes et papier et les matières organiques séparées, aux termes de la définition des « déchets déterminés » pour les catégories 43,1 et 43,2 de la déduction pour amortissement accélérée.
L’élargissement de l’admissibilité au CII pour les technologies propres s’applique aux biens qui sont acquis et sont prêts à être mis en service à compter du 21 novembre 2023 pourvu que ces biens n’aient pas été utilisés à une fin quelconque avant leur acquisition. L’élargissement de l’admissibilité au CII pour l’électricité propre serait disponible à compter de la date du dépôt du Budget 2024 pour les projets dont la construction n’était pas amorcée après le 27 mars 2023, conformément à l’application générale proposée de ce crédit.
Production d’électricité et cogénération à partir de déchets de la biomasse
L’ÉÉA propose d’élargir l’admissibilité au CII pour les technologies propres et au CII pour l’électricité propre afin d’inclure les systèmes qui utilisent des « déchets déterminés » exclusivement pour produire de l’électricité ou de l’électricité et de la chaleur (c.-à-d., cogénération). Les systèmes admissibles sont ceux qui utilisent des matières premières, dont la totalité, ou presque, du contenu énergétique (exprimé comme pouvoir calorifique supérieur de la matière première) provient de déchets déterminés, établi sur une base annuelle. Les systèmes qui utilisent un combustible dont la production ne fait pas partie intégrale du système, même s’il est produit à partir de déchets déterminés, ne sont pas admissibles.
S’ils font partie d’un système intégré admissible, les biens admissibles comprennent le matériel générateur d’électricité (p. ex. les générateurs à turbine à vapeur), le matériel de production de chaleur qui sert principalement à produire de l’énergie thermique pour faire fonctionner le matériel générateur d’électricité (p. ex. les chaudières à la vapeur utilisées pour produire de la vapeur destinée au fonctionnement de générateurs à turbine à vapeur), le matériel qui produit à la fois de l’énergie électrique et de l’énergie thermique (p. ex. les générateurs à turbine à gaz et les générateurs à moteur à pistons), le matériel de récupération de chaleur (p. ex. les générateurs de vapeur à récupération de chaleur) le matériel servant à valoriser ou à améliorer la combustibilité de déchets déterminés (p. ex. les gazéifieurs) et le matériel auxiliaire (p. ex. les systèmes de commande, d’eau d’alimentation et de condensat).
Les biens admissibles ne comprennent pas les bâtiments ou d’autres constructions, le matériel de rejet de la chaleur (p. ex. les tours de refroidissement), le matériel de transmission et de distribution d’électricité, le matériel de stockage et de manutention du combustible ou des matières premières (p. ex. les convoyeurs et les chargeuses montées sur roues), l’équipement de réseau énergétique de quartier ou le matériel utilisé pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone (« CUSC »). Conformément au traitement de systèmes semblables sous les catégories 43,1 et 43,2, les systèmes admissibles ne comprennent que les systèmes qui n’excèdent pas le rendement thermique de 11 000 unités thermiques britanniques par kilowattheure. Le rendement thermique serait calculé d’une manière semblable à celle qui sera utilisée après 2024 pour les systèmes de production d’électricité à partir de combustible résiduaire déterminé qui seraient admissibles à l’inclusion sous les catégories 43,1 et 43.2.
Production de chaleur à partir de déchets de la biomasse
L’ÉÉA propose d’élargir l’admissibilité au CII pour les technologies propres et au CII pour l’électricité propre afin d’inclure les systèmes qui utilisent des « déchets déterminés » (à l’exception de la liqueur résiduaire) exclusivement pour produire de l’énergie thermique. Comme c’est le cas pour les restrictions applicables à la production d’électricité et à la cogénération, les systèmes admissibles sont ceux qui utilisent des matières premières, dont la totalité, ou presque, du contenu énergétique (exprimé comme pouvoir calorifique supérieur de la matière première) provient de déchets déterminés (sauf la liqueur résiduaire), établi sur une base annuelle. Les systèmes qui utilisent un combustible dont la production ne fait pas partie intégrale du système, même s’il est produit à partir de déchets déterminés, ne sont pas admissibles.
S’ils font partie d’un système intégré admissible, les biens admissibles comprennent le matériel de production de chaleur (p. ex. les brûleurs et les chaudières), sauf celui servant au fonctionnement du matériel de production d’électricité, le matériel servant à valoriser ou à améliorer la combustibilité de déchets déterminés (p. ex. un gazéifieur) et le matériel auxiliaire (p. ex. les systèmes de commande, d’eau d’alimentation et de condensat). Les biens admissibles n’incluent pas les bâtiments ou d’autres constructions, le matériel de rejet de la chaleur (p. ex. les tours de refroidissement), le matériel de stockage et de manutention du combustible ou des matières premières (p. ex. les convoyeurs et les chargeuses montées sur roues), l’équipement de réseau énergétique de quartier ou le matériel utilisé pour le CUSC.
Conformité
Un bien admissible doit remplir sur une base annuelle toutes les conditions pour être compris dans les catégories 43.1 et 43.2. De rares exceptions sont prévues pour des biens qui faisaient partie d’un système admissible et qui fonctionnaient précédemment de la manière admissible. Un tel bien serait considéré comme fonctionnant de la manière admissible pendant la durée d’un défaut, d’une défectuosité ou d’un arrêt du système qui est indépendant de la volonté du contribuable si ce dernier s’applique raisonnablement à rectifier la situation ou le problème dans un délai raisonnable. Des règles similaires s’appliqueraient au CII pour les technologies propres et au CII pour l’électricité propre relativement aux systèmes qui produisent de l’électricité, de la chaleur, ou de l’électricité et de la chaleur à partir de déchets déterminés.
Certains biens décrits aux catégories 43,1 et 43,2 ne peuvent être inclus dans ces dernières que s’ils sont conformes aux lois, aux règlements administratifs et aux règlements en matière d’environnement au moment où le bien devient prêt à être mis en service. L’ÉÉA propose de cibler uniquement la non-conformité importante. Il propose également d’élargir cette règle pour qu’elle s’applique à tous les biens décrits aux catégories 43,1 et 43,2, ainsi qu’aux biens qui seraient admissibles au CII pour les technologies propres et au CII pour l’électricité propre.
Fiducies collectives des employés
Le Budget 2023 a introduit le concept de « fiducie collective des employés » (« FCE ») afin de favoriser la propriété collective des entreprises par les employés de ces dernières. Bien que l’ajout du concept de FCE à la LIR ait été un changement bien accueilli, le seul avantage fiscal réel pour les propriétaires ayant disposé d’actions d’une société privée sous contrôle canadien (« SPCC ») admissible en faveur d’une FCE (ou d’une SPCC contrôlée par une FCE) a été le prolongement de la période du calcul de la provision pour gains en capital de cinq ans, telle qu’elle est prévue au paragraphe 40(1) de la LIR, à dix ans (un minimum de 10 % du gain devant être inclus dans le revenu chaque année. Comme les propriétaires cherchant à se départir de leur entreprise ne semblent bénéficier que très peu des règles relatives aux FCE, il avait été soulevé qu’en pratique, le recours aux FCE ne serait que très limité.
Il semble que le ministère des Finances ait pris en compte les préoccupations au sujet de l’absence de raisons sur le plan fiscal qui convaincraient un propriétaire de vendre son entreprise à une FCE. L’ÉÉA propose un élargissement considérable des avantages fiscaux applicables à la vente d’actions d’une SPCC admissible à une FCE. Plus précisément, l’ÉÉA propose d’exempter d’impôt la première tranche de 10 M$ CA de gains en capital réalisés sur la vente d’une entreprise à une FCE, sous réserve de certaines conditions. Les conditions relatives à cette exemption ne sont pas précisées. De plus, cette exemption serait assujettie à un délai prescrit. Selon l’ÉÉA, elle ne s’appliquerait qu’aux années d’imposition 2024, 2025 et 2026. L’ÉÉA précise toutefois que le ministère des Finances surveillera l’adoption des FCE et leurs effets sur l’économie et la population canadienne, ce qui laisse entendre que l’exemption relative aux gains en capital pourrait être prolongée, voire devenir permanente.
Mesures visant les taxes de vente
Choix visant une coentreprise en matière de TPS/TVH
Le ministère des Finances a publié pour consultation les nouvelles règles proposées (et tant attendues) relativement au choix visant une coentreprise en matière de TPS/TVH. Ces propositions ont pour but d’élargir la disponibilité de ce choix en remplaçant la condition selon laquelle les activités de coentreprise doivent être des activités admissibles par une condition selon laquelle « la totalité ou la presque totalité des activités sont commerciales ». À l’heure actuelle, ce choix (qui permet effectivement aux coentrepreneurs de produire une seule déclaration de TPS/TVH comme s’ils étaient une société de personnes) est principalement utilisé dans les secteurs immobilier et minier. Il reste à voir si, et dans quelle mesure, le choix visant une coentreprise, en sa version élargie proposée, sera adopté dans d’autres secteurs.
Cela étant dit, les règles proposées ne font pas qu’élargir la disponibilité de ce choix, elles prétendent apporter des modifications aux règles existantes et limiter ces dernières. Par exemple, les nouvelles règles relatives au choix visant une coentreprise modifient les règles de présomption existantes, lesquelles peuvent, dans certains cas, permettre généralement de présumer qu’il n’existe aucune fourniture taxable et remplacer ces règles par des règles de présomption qui sont plus axées sur la « comptabilité fiscale ». Bien que l’« opérateur » désigné de la coentreprise comptabilise la totalité de la TPS/TVH et demande des crédits de taxe sur les intrants pour le compte des coentrepreneurs, le corollaire de ce changement est que tous les participants à un choix visant une coentreprise devront être inscrits aux fins de la TPS/TVH, ce qui n’est pas le cas actuellement. À la suite d’un examen préliminaire de ces propositions, il n’est pas clair pourquoi le ministère des Finances a choisi d’ajouter ce fardeau administratif à certains coentrepreneurs qui devront désormais produire des déclarations de TPS/TVH sans rien avoir à déclarer. De plus, les nouvelles règles viennent codifier la position administrative de l’ARC permettant de déterminer qui peut être un « opérateur » d’une coentreprise, avec des restrictions additionnelles. Bien que l’ARC prévoit que toute personne ayant une participation dans les biens de la coentreprise, ou toute personne responsable de la gestion ou des opérations de la coentreprise, puisse être opératrice, la définition proposée d’« opérateur admissible » dans l’ÉÉA prévoit que la personne visée doit avoir une participation non nominale dans les biens de la propriété, ou doit assumer la responsabilité principale du contrôle opérationnel de la coentreprise. Ces modifications pourraient avoir d’importantes répercussions sur les coentreprises. Les mesures législatives proposées ne précisent aucune règle transitoire, mais l’ÉÉA indique cependant que la consultation prévue portera sur des règles transitoires relativement aux règles existantes applicables au choix visant une coentreprise. Il est attendu que la période de consultation prendra fin le 15 mars 2024.
Autres mesures ficales
Taxe sur les logements sous-utilisés
Les mesures relatives à la taxe sur les logements sous-utilisés (la « TLSU ») visent les non-résidents qui sont propriétaires de logements vacants au Canada. La TLSU est entrée en vigueur à l’année d’imposition 2022. La législation relative à la TLSU prévoit des obligations de déclaration d’envergure pour les entités canadiennes et d’importantes pénalités pour tout manquement à cet effet, même lorsqu’il n’y a aucune imposition de taxe. Pour l’année civile 2023 et les années civiles suivantes, le ministère des Finances propose d’élargir la définition de « propriétaire exclu », ce qui réduirait de beaucoup les obligations de déclaration des entités canadiennes qui sont exemptées de la TLSU. Cependant, pour l’année civile 2022, la définition actuelle des propriétaires visés demeure en vigueur et les déclarations de la TLSU devront être produites d’ici le 30 avril 2024. L’ARC a repoussé à deux reprises l’échéance pour la production initiale de ces déclarations. Cela signifie que pour une seule année, bon nombre de propriétaires seront assujettis à cette obligation de déclaration et pourraient être passibles de pénalités. Ces propositions, qui s’appliqueraient à compter du début de 2022, réduiraient également de beaucoup la pénalité minimale et prévoient un allègement pour les immeubles d’habitation unitisés (« en copropriété ») en les excluant de la définition d’« immeubles résidentiels » aux fins de la TLSU. Ces propositions font l’objet d’une consultation qui prendra fin le 4 janvier 2024.
Taxe sur les services numériques
L’ÉÉA confirme l’intention du ministère des Finances d’aller de l’avant avec la taxe sur les services numériques (la « TSN »), laquelle s’appliquera aux revenus touchés à compter de 2022. De plus, l’ÉÉA annonce que l’entrée en vigueur de la TSN, qui devait avoir lieu en août, sera fixée à une date ultérieure. La TSN s’applique à un large éventail de revenus que tirent des résidents et non-résidents du Canada et qui proviennent de sources « numériques » associées à des utilisateurs au Canada. Les règles d’attribution devant être appliquées pour calculer les revenus imposables aux fins de la TSN ne sont pas particulièrement simples, notamment pour ce qui est des revenus non opérationnels tirés par des non-résidents (p. ex. les frais d’abonnement, le revenu provenant de services de publicité en ligne, etc.). Les entreprises pourraient ainsi devoir recueillir des renseignements au sujet de leurs publics cibles en ligne qu’ils ne recueillent pas actuellement aux fins de l’impôt canadien. Pour en savoir davantage au sujet de ces propositions législatives, consultez nos Bulletin Blakes intitulés Propositions législatives du 4 août 2023 : Présentation de certaines mesures fiscales et Budget fédéral 2021 – Présentation de certaines mesures fiscales.
Mesures annoncées antérieurement
L’ÉÉA confirme l’intention du gouvernement fédéral d’aller de l’avant avec plusieurs mesures fiscales annoncées antérieurement, dans leurs versions modifiées afin de tenir compte des consultations et des délibérations qui ont eu lieu depuis leur publication. Ces mesures comprennent notamment les suivantes :
Propositions législatives publiées le 4 août 2023 : Ces propositions législatives comprennent des propositions concernant le régime de l’impôt minimum de remplacement pour les particuliers à revenu élevé, une taxe sur le rachat de capitaux propres, la modification de la règle générale anti-évitement, l’impôt minimum mondial (Pilier Deux) et les dépenses excessives d’intérêts et de financement. Pour en savoir davantage sur ces propositions législatives, consultez notre Bulletin Blakes intitulé Propositions législatives du 4 août 2023 : Présentation de certaines mesures fiscales.
Modifications législatives pour la mise en œuvre des changements exposés dans le document de consultation sur les prix de transfert publié le 6 juin 2023 : Dans le Budget 2021, le gouvernement fédéral avait annoncé son intention de tenir une consultation au sujet des règles canadiennes sur les prix de transfert. La consultation sur la réforme et la modernisation des règles canadiennes sur les prix de transfert a pris fin le 28 juillet 2023.
Mesures fiscales annoncées dans le Budget 2023 : Le Budget 2023 comprenait des propositions concernant la déduction des dividendes reçus par des institutions financières, le CII pour l’hydrogène propre, le CII pour la fabrication de technologies propres et le CII pour l’électricité propre. Pour en savoir davantage au sujet des mesures fiscales proposées dans le Budget 2023, consultez notre Bulletin Blakes intitulé Budget fédéral 2023 : Présentation de certaines mesures fiscales.
Propositions législatives publiées le 9 août 2022 : Ces propositions législatives comprennent des propositions concernant une nouvelle règle qui assujettira les sociétés privées sous contrôle canadien en substance à l’impôt remboursable sur le revenu de placement total qui s’applique actuellement aux sociétés privées sous contrôle canadien, ainsi que diverses modifications techniques.
Propositions législatives publiées le 29 avril 2022 : Ces propositions législatives concernent les dispositifs hybrides. Pour en savoir davantage au sujet des propositions relatives aux dispositifs hybrides énoncées dans le Budget 2021, consultez notre Bulletin Blakes intitulé Budget fédéral 2021 – Présentation de certaines mesures fiscales.
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