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Entrée en vigueur de modifications clés à la législation canadienne sur les sanctions

19 juillet 2023

Le 22 juin 2023, la Loi no 1 d’exécution du budget de 2023 a reçu la sanction royale. Cette nouvelle loi apporte plusieurs modifications importantes à la législation canadienne sur les sanctions, lesquelles touchent les institutions financières réglementées et les entreprises exerçant leurs activités au Canada et à l’étranger. Le présent bulletin fait un survol des principaux nouveaux développements :

  • de nouveaux critères permettant d’établir si une personne désignée dans les listes en vertu des lois canadiennes sur les sanctions est réputée contrôler une entité donnée (les « critères de contrôle »);

  • une nouvelle obligation de déclarer les biens d’une personne désignée au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (« CANAFE »);

  • l’application de sanctions par le gouvernement fédéral canadien, notamment la saisie d’un aéronef de fret à l’aéroport Pearson à Toronto;

  • diverses modifications à d’autres règlements visant des territoires particuliers.

Nouveaux critères de contrôle

Depuis le 22 juin 2023, de nouveaux critères de contrôle s’appliquent au titre des interdictions énumérées dans les listes en vertu des principales lois sur les sanctions du Canada, soit la Loi sur les mesures économiques spéciales (la « LMES ») et la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitski) (la « LSM »). En particulier, lorsque le gouvernement du Canada désigne une personne en vertu de ces lois, il est généralement interdit d’effectuer une opération portant sur un bien appartenant à cette personne ou sur un bien détenu ou contrôlé par elle ou pour son compte. Une nouvelle disposition déterminative ajoutée à la législation prévoit que si une personne désignée contrôle une autre entité, les biens de cette entité sont réputés appartenir à la personne désignée. Par conséquent, l’entité contrôlée par la personne désignée devient assujettie à la même interdiction d’opération s’appliquant à cette dernière.

La législation introduit donc de nouveaux critères de contrôle. Aux fins de ces critères, une personne désignée sera réputée contrôler une entité si l’une des trois conditions suivantes est remplie :

  • Règle de 50 %. La personne désignée détient, même indirectement, au moins 50 % des actions ou des titres de participation de l’entité, ou encore des droits de vote de celle-ci. Comme c’est le cas pour la règle homologue prévue à la législation en vigueur aux États-Unis, le seuil de contrôle est établi à 50 % et non à la majorité des actions ou des titres de participation.

  • Règle relative à la capacité de modifier la composition ou les pouvoirs du conseil d’administration. La personne désignée peut modifier, même indirectement, la composition ou les pouvoirs du conseil d’administration de l’entité. Le libellé de cette condition est très général et, contrairement aux territoires qui ont un critère de contrôle similaire, ne précise pas le nombre ou le pourcentage minimum de membres du conseil d’administration que la personne désignée peut nommer.

  • Règle relative à la capacité à diriger les activités de l’entreprise. Il est raisonnable, compte tenu des circonstances, de conclure que la personne désignée peut diriger, même indirectement, et par tout moyen, les activités de l’entreprise.

Les critères permettant d’établir le contrôle ne s’appliquent pas au contrôle d’un État étranger par des personnes désignées. Cette exclusion fait en sorte que la désignation de hauts fonctionnaires ne s’applique pas automatiquement à l’ensemble du gouvernement d’un État étranger. Les nouveaux critères permettant d’établir le contrôle en vertu de la législation sur les sanctions ne s’appliquent pas non plus aux scénarios selon lesquels de multiples personnes désignées participent à la propriété et à la gestion d’une entité. En outre, ces critères ne sont pas intégrés dans d’autres lois fédérales qui traitent de sanctions, comme la Loi sur les Nations Unies, la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus ou le Code criminel.

Cette nouvelle définition du contrôle constitue une étape bien attendue quant à la clarification de la question essentielle des seuils relatifs à la conformité aux lois canadiennes prévoyant des sanctions. Toutefois, les deuxième et troisième éléments de ces nouveaux critères poseront, en pratique, des défis au chapitre de la conformité. En particulier, ils nécessiteront que l’analyse pour déterminer le degré de contrôle soit plus approfondie et plus nuancée que le simple établissement de la propriété véritable d’une contrepartie. Les entreprises devraient réfléchir attentivement à la façon d’intégrer cette définition large et nuancée dans leurs programmes de conformité aux sanctions et à la façon de l’exécuter, au cas par cas, lorsque la vérification diligente permet d’identifier une personne désignée ayant un lien avec une opération ou un engagement proposé.

Bien que ces nouveaux critères de contrôle cadrent à bien des égards avec les règles homologues établies dans d’autres territoires, notamment au Royaume-Uni et dans l’Union européenne, ces territoires ont quant à eux publié des directives réglementaires sur la façon dont les éléments qualitatifs de ces critères doivent être appliqués. Comme aucune directive n’a été émise par Affaires mondiales Canada quant aux nouveaux critères, il pourrait être utile pour les entreprises canadiennes de consulter le préavis publié par le Bureau du surintendant des institutions financières (le « BSIF »), soit l’organisme de réglementation des institutions financières fédérales au Canada. Ce préavis fournit des lignes directrices sur l’application des critères permettant d’établir le contrôle de fait en vertu des lois régissant les institutions financières fédérales. Il est toutefois important de garder à l’esprit que la définition du contrôle en vertu de ces lois diffère de celle des critères permettant d’établir le contrôle en vertu de la LMES et de la LSM. Par conséquent, ce ne sont pas tous les éléments du préavis du BSIF qui sont appropriés dans le contexte de la législation sur les sanctions.

Tel qu’il est noté précédemment, les nouveaux critères permettant d’établir le contrôle en vertu de la LMES et de la LSM sont en vigueur depuis le 22 juin 2023.

Obligation de déclaration relative aux sanctions (CANAFE)

La Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (la « LRPCFAT »), soit la loi canadienne sur la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité, a également été modifiée afin d’obliger les institutions financières réglementées et d’autres entités assujetties à la LRPCFAT à déclarer au CANAFE tout bien détenu par celles-ci appartenant à une personne désignée en vertu de la LMES ou de la LSM, ce qui s’ajoute à l’obligation de déclaration des biens appartenant à des groupes terroristes déjà en vigueur. La nouvelle obligation de déclaration n’est pas encore en vigueur et sa prise d’effet se fera aux termes d’une ordonnance du gouvernement fédéral. Il est prévu que le CANAFE publiera une ligne directrice ainsi que des instructions sur la transmission des déclarations une fois que la nouvelle obligation sera en vigueur.

Application des sanctions

En raison du conflit qui persiste en Ukraine, le gouvernement canadien s’appuie sur la législation fédérale sur les sanctions pour exercer une pression auprès de la Russie afin que cette dernière cesse son agression contre l’Ukraine. Par suite de modifications apportées à la LMES en 2022, le gouvernement fédéral canadien a l’autorité de saisir, de confisquer et de redistribuer les actifs appartenant à des personnes désignées en vertu de la LMES ou de la LSM, ainsi que de disposer de tels actifs. Les deux premières mesures d’application prises en vertu de la LMES ont eu lieu le 19 décembre 2022 et le 10 juin 2023, respectivement. La première mesure, prise par décret, a bloqué une somme de 26 M$ US d’une société qui, selon le gouvernement fédéral, appartenait à une personne désignée. La deuxième mesure consistait en la saisie d’un aéronef de fret russe à l’aéroport Pearson à Toronto. Il s’agit du premier exemple de saisie d’un actif physique en vertu des dispositions modifiées de la LMES concernant l’application des sanctions.

Autres développements en matière de sanctions

En mai 2023, le gouvernement du Canada a adopté le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Moldova lequel désigne plusieurs personnes liées à la Russie.

En juin 2023, le gouvernement du Canada a ajouté plusieurs personnes aux listes respectives des personnes visées par le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant Haïti et le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Iran.
Le gouvernement du Canada a pris le Règlement modifiant certains règlements pris en vertu de la Loi sur les Nations Unies, lequel est entré en vigueur le 19 juin 2023. Ce règlement modifie 14 règlements existants pris en vertu de la Loi sur les Nations du Canada pour que ces derniers cadrent avec des résolutions récentes du Conseil de sécurité des Nations Unies. Les modifications en question viennent supprimer l’exigence pour les organismes humanitaires d’obtenir une autorisation ministérielle pour mener leurs activités dans les territoires visés par ces règlements. Des modifications ont également été apportées à certaines dispositions du Code criminel en vertu du projet de loi C-41 pour faire en sorte de ne pas interdire l’aide humanitaire en Afghanistan.
 
Pour obtenir un aperçu de la législation canadienne en matière de sanctions, consultez notre Bulletin Blakes intitulé Introduction aux lois canadiennes sur les sanctions.
 
Pour en savoir davantage sur l’un des sujets abordés dans le présent bulletin, communiquez avec :
 
Bureau de Montréal

Annick Demers          +1-514-982-4017
Patrick Lapierre         +1-514-982-4105

Bureau de Toronto
 
Vladimir Shatiryan      +1-416-863-4154
Alan Fraser                 +1-416-863-3172
John Fast                    +1-416-863-4270
 
Bureau de Calgary
 
Michael Dixon            +1-403-260-9786
Mark Morrison, c.r.     +1-403-260-9726
 
Bureau de Vancouver
 
Roy Millen                   +1-604-631-4220
Brady Gordon             +1-604-631-5255
 
ou un autre membre de nos groupes Réglementation des services financiers ou Commerce international.

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