Récemment, des jeunes âgés de 10 à 19 ans ont intenté une action relative aux changements climatiques contre le gouvernement du Canada et le procureur général du Canada. Ils accusent ces derniers d’avoir violé leurs droits en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.
Dans la poursuite qu’ils ont déposée le 25 octobre 2019, les demandeurs allèguent que les émissions anthropiques de gaz à effet de serre (« GES ») dans l’atmosphère entraînent une multitude de conséquences néfastes, dont le réchauffement planétaire, et causent des torts aux enfants d’une manière disproportionnée.
Entre autres choses, les demandeurs avancent que le gouvernement du Canada a activement participé et accordé son soutien au développement, à l’expansion et à l’exploitation des industries et des activités liées aux combustibles fossiles, ce qui a généré, selon eux, un niveau d’émissions de GES incompatible avec un système climatique stable. Ils demandent à la cour de déclarer que la conduite alléguée du gouvernement a violé, de manière injustifiée, leurs droits et ceux de tous les enfants canadiens en vertu des articles 7 et 15 de la Charte canadienne des droits et libertés. De plus, ils demandent à la cour d’ordonner aux défendeurs d’élaborer et de mettre en œuvre un plan contraignant qui tiendrait compte de la prétendue juste part du Canada par rapport au budget mondial du carbone qui est nécessaire à la réduction des émissions de GES.
Une poursuite presque identique, l’affaire Juliana v. United States, a été déposée aux États-Unis, affaire que nous avons commentée dans notre Bulletin Blakes de septembre 2019 intitulé Augmentation des litiges environnementaux au Canada et ailleurs dans le monde. Le gouvernement américain a vigoureusement contesté les allégations des demandeurs et, le 22 octobre 2018, le juge en chef John G. Roberts Jr. a ordonné la suspension de l’instance. Les procédures se sont poursuivies devant la cour d’appel du 9e circuit en 2019 et les parties sont en attente des décisions sur les appels interlocutoires. Par ailleurs, des actions en justice similaires ont également été intentées dans d’autres territoires.
L’émergence d’une jurisprudence dans ce domaine reflète les nombreux moyens par lesquels les poursuites liées au climat cherchent à influencer les politiques publiques et à obtenir des dédommagements.
Les réclamations dans le cadre de poursuites liées au climat se déclinent généralement en trois catégories :
- Atténuation (obtenir une réduction des émissions de GES)
- Imputation (plaider qu’une partie est tenue de payer pour les dommages allégués résultant des émissions de GES)
- Adaptation (remédier aux prétendues conséquences des émissions de GES)
Environ 1 200 poursuites liées au climat ont été déposées aux États-Unis. Le Canada quant à lui se maintient parmi les cinq territoires où ont été intentées le plus grand nombre de poursuites de cette nature. Les actions relatives aux changements climatiques aux États-Unis sont souvent un signe précurseur d’actions similaires au Canada.
Les répercussions possibles des litiges relatifs aux changements climatiques sont multiples. Par exemple, une nouvelle tendance dans ce domaine est le nombre croissant de poursuites liées aux déclarations des risques d’entreprise associés aux changements climatiques et des plans visant à gérer ces risques. Aucune affaire de cette nature n’est en cours au Canada, mais nous en avons relevé aux moins deux en Australie et un nombre croissant aux États-Unis. Dans le cadre de ces affaires, des actionnaires, dont des caisses de retraite et d’autres types de fonds d’investissement, ont intenté des recours contre des sociétés et des banques pour omission de déclarer les risques d’entreprise associés aux changements climatiques. Dans l’affaire McVeigh v. Australian Retail Employees Superannuation Trust, par exemple, un participant à une caisse de retraite australienne a déposé une poursuite à l’encontre de la caisse de retraite des employés de détail, alléguant que la caisse a enfreint la Corporations Act 2001 en omettant de communiquer l’information sur les risques d’entreprise associés aux changements climatiques et sur tout plan visant à gérer ces risques. Cette affaire traitait notamment de l’obligation de la caisse d’informer ses participants au sujet des risques et des plans liés aux changements climatiques.
À la lumière de ces développements récents, les émetteurs canadiens, et tout particulièrement ceux du secteur pétrolier et gazier, devraient veiller à présenter de façon exacte l’information sur ces risques importants pour leurs activités, le cas échéant, et à en rendre compte dans leurs déclarations, en ce qui a trait aux changements climatiques et aux éventualités connexes, comme la réglementation accrue. Récemment, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (les « ACVM ») ont publié l’Avis 51-358 du personnel des ACVM, Information sur les risques liés au changement climatique, qui fournit des indications détaillées pour les émetteurs quant à la présentation de l’information sur les risques importants associés aux changements climatiques. Comme le notent les ACVM : « Les risques liés au changement climatique sont un enjeu courant du monde des affaires. Les émetteurs devraient évaluer ces risques dans leur processus de gestion des risques et de communication de l’information, et doivent indiquer ceux qui sont importants pour leur entreprise. » Par conséquent, les émetteurs canadiens devraient se tenir au fait des avis et de l’orientation des ACVM relativement aux seuils d’importance, à l’horizon temporel, aux mesures du risque et aux autres facteurs applicables aux déclarations des risques associés aux changements climatiques.
Il reste à voir de quelle façon les tribunaux canadiens traiteront les complexités juridiques et politiques des litiges relatifs aux changements climatiques. Un bon nombre de stratégies et de moyens de défense peuvent permettre d’atténuer les risques découlant de cette tendance émergente dans le domaine du litige. Des groupes de pression ne cachent aucunement que les poursuites liées au climat visent en partie à contraindre les sociétés à divulguer des documents qui justifieraient leurs allégations. Par conséquent, les émetteurs canadiens auraient sans doute intérêt à prendre rapidement des mesures énergiques en vue de contrer le risque de s’exposer à de telles actions.
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