En 2023, le paysage législatif de la publicité au Canada a continué d’évoluer et de se transformer. Dans le présent bulletin, nous résumons certains développements notables. Selon nous, les entreprises qui font de la publicité ou de la promotion pour leurs produits ou leurs services au Canada auront à composer avec les incidences de ces nouveaux développements en 2024.
Modifications proposées à la Loi sur la concurrence, dont un droit d’action privé
Le 30 novembre 2023, le projet de loi C-59 : Loi portant exécution de certaines dispositions de l'énoncé économique de l'automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023 (le « projet de loi C-59 ») a franchi l’étape de la première lecture.
La modification proposée la plus notable concernant la publicité est l’élargissement considérable des droits d’action privés à l’égard des pratiques commerciales trompeuses. Le projet de loi C-59 modifierait l’article 103.1 de la Loi sur la concurrence (la « Loi ») afin de permettre aux parties privées de présenter une demande devant le Tribunal de la concurrence (le « Tribunal ») concernant un comportement susceptible d’examen d'une partie en vertu des dispositions civiles sur les pratiques commerciales trompeuses à l’article 74.1 de la Loi. Le Tribunal peut faire droit à une demande de permission de présenter une demande s’il est convaincu que cela servirait l’intérêt public. C’est donc dire que les parties privées (y compris les concurrents et les consommateurs) se verraient conférer un nouveau droit leur permettant de demander que soient rendues des ordonnances visant des pratiques commerciales trompeuses, lesquelles ordonnances pourraient comprendre des paiements pécuniaires en guise de réparation, ce qui augmente les risques liés à la publicité trompeuse auxquels s’exposent les organisations. Si le projet de loi C-59 est adopté, les droits d’action privés élargis entreraient en vigueur un an après la date à laquelle ce projet de loi aura reçu la sanction royale.
Le projet de loi C-59 ajouterait par ailleurs une précision expresse dans la Loi selon laquelle l’écoblanchiment constitue de la publicité trompeuse. Si elle est adoptée, la disposition modifiée s’appliquerait explicitement à toute déclaration visant les avantages d’un produit pour la protection de l’environnement ou l’atténuation des effets environnementaux et écologiques des changements climatiques qui ne se fondent pas sur une épreuve suffisante et appropriée. La décision d’inclure un tel libellé dans la Loi laisse entendre que l’importance accordée à l’information en matière d’environnement et de durabilité est là pour de bon.
Le projet de loi C-59 apporterait également d’autres changements liés aux mesures d’application de la loi, dont les suivants :
- élargissement de la capacité d’un tribunal de prononcer une injonction provisoire en se fondant sur une demande présentée par une personne autorisée en vertu de l’article 103.1 de la Loi en vue de contester une pratique commerciale trompeuse;
- ajout de sanctions administratives pécuniaires maximales pouvant aller jusqu’à 10 000 $ CA pour chaque jour de non-conformité, et de possibles ordonnances d’interdiction ou autres en cas d’omission par une personne de se conformer à un consentement lié à des pratiques commerciales trompeuses en vertu de l’article 74.12 de la Loi.
Les entreprises devraient mettre à jour leurs programmes de conformité et de formation pour tenir compte du risque accru que des parties privées présentent des demandes et obtiennent des dédommagements.
Pour en savoir davantage au sujet du projet de loi C-59, consultez notre Bulletin Blakes de novembre 2023 intitulé Refonte des règles : Mise à jour de la Loi sur la concurrence du Canada.
Application de la loi par le Bureau de la concurrence
En 2023, le Bureau de la concurrence (le « Bureau ») a pris un certain nombre de mesures d’application de la loi à l’encontre de pratiques commerciales trompeuses, dont les mesures suivantes :
- En mai 2023, une importante société de divertissement a été poursuivie par le Bureau pour avoir annoncé des billets à des prix présumés trompeurs. À la suite de son enquête, le Bureau a conclu que des consommateurs n’avaient pas pu acheter de billets au prix annoncé sans devoir payer des frais de réservation en ligne obligatoires de 1,50 $ CA et que cette pratique constitue une indication de prix partiel.
- En septembre 2023, une enquête du Bureau a conclu qu’un détaillant multi-marques offrait certains produits à des prix habituels gonflés et les annonçait ensuite avec des rabais importants. Le Bureau a également conclu que le détaillant donnait aux consommateurs des indications commerciales qui créaient l’impression fausse ou trompeuse que les aubaines ne seraient plus offertes après un certain temps, alors que ce n’était pas le cas. Le détaillant a accepté de payer une sanction de 3,25 M$ CA et de verser 100 000 $ CA pour couvrir les frais d’enquête engagés par le Bureau relativement à l’entente par voie de consentement conclue.
- Une société exerçant des activités sur le marché de la revente de billets a suscité des préoccupations selon lesquelles cette dernière annonçait des billets à des prix inatteignables, une pratique connue sous le nom d’« indication de prix partiel ». Le Bureau a également allégué que cette société avait recours à d’autres pratiques commerciales trompeuses qui donnaient aux consommateurs de fausses impressions au sujet des billets qu’ils achetaient. En novembre 2023, la société a conclu une entente par voie de consentement et a convenu de payer une sanction de 825 000 $ CA, de cesser toutes ses pratiques commerciales trompeuses en cause et de mettre en place un programme de conformité.
- Une société offrant une application permettant d’amplifier le son de la musique a suscité des préoccupations selon lesquelles des indications fausses ou trompeuses concernant le caractère « gratuit » de son application mobile et l’achat de critiques positives de tierces parties au sujet de l’application en question. En décembre 2023, la société a accepté de payer une sanction partielle de 310 000 $ CA en satisfaction de la sanction imposée de 1,5 M$ CA. S’il s’avère que la société n’a pas divulgué la totalité de ses actifs, le montant intégral de la sanction s’appliquera.
- En décembre 2023, le Bureau a obtenu une ordonnance judiciaire pour faire avancer son enquête sur certaines pratiques commerciales trompeuses présumées d’une importante société de télécommunications concernant les prétendues données illimitées de l’un des forfaits de téléphonie sans fil offerts par cette dernière.
Ces mesures d’application de la loi témoignent du fait que les indications fausses ou trompeuses concernant le prix d’un produit ou d’un service demeurent une des priorités du Bureau dans le cadre de ses activités de mise en application de la loi.
Développements relatifs aux Normes de la publicité
En 2018, les Normes de la publicité ont élaboré les Lignes directrices sur la divulgation du marketing d’influence (les « lignes directrices ») dans le but d’aider les influenceurs et les annonceurs à comprendre et à respecter les exigences de divulgation du Code canadien des normes de la publicité. En 2023, les lignes directrices ont été mises à jour afin d’y ajouter des exemples qui illustrent ce qu’est une divulgation suffisante ou insuffisante dans une variété de types de publication (c’est-à-dire des publications statiques, avec limitation de caractères, ou vidéo, etc.), en comparaison de la version de 2020 de ces lignes directrices, laquelle version présentait des exemples concernant différentes plateformes publicitaires (comme Snapchat, Twitter, etc.).
En juin 2023, le Code des pratiques responsables en matière de publicité sur les aliments et les boissons destinée aux enfants (le « Code ») est entré en vigueur. Le Code établit de nouvelles restrictions applicables à la publicité sur certains aliments destinée aux enfants. Aux termes de ce code, la publicité ne peut être destinée principalement aux enfants à moins que le produit alimentaire ou la boisson en question ne satisfasse à des critères nutritionnels spécifiques. Cette restriction principale s’applique à toute publicité qui « présente » un produit alimentaire ou une boisson et qui est destinée aux résidents du Canada, quel que soit le média, y compris les médias sociaux, les plateformes de diffusion en continu, les applications et les jeux. Dans le Code, un « enfant » s’entend de toute personne âgée de moins de treize ans.
Pour en savoir davantage au sujet de ces nouvelles restrictions, consultez notre Bulletin Blakes de juillet 2023 intitulé Nouvelles restrictions relatives à la publicité sur les aliments et les boissons destinée aux enfants.
Législation québécoise en matière de concours publicitaires
Dans un revirement étonnant, les dispositions législatives québécoises imposant des exigences uniques en leur genre en matière de concours publicitaires ont été abrogées. Concrètement, ces abrogations ont eu pour effet d’abolir le régime réglementaire distinct du Québec qui régissait les concours tenus dans la province.
En octobre 2023, le projet de loi no 17, Loi modifiant diverses dispositions principalement aux fins d’allègement du fardeau réglementaire et administratif a reçu la sanction royale. Ce projet de loi a notamment abrogé certaines dispositions de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement, et supprimé intégralement les Règles sur les concours publicitaires, avec prise d’effet immédiate. Tous les renvois aux concours publicitaires dans la loi susmentionnée, y compris dans l’intitulé de celle-ci, ont été supprimés.
Les promoteurs de concours publicitaires ne sont désormais plus assujettis à l’obligation d’obtenir une autorisation pour la tenue de leurs concours au Québec et aux autres exigences relatives aux concours prévues à la législation du Québec.
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Ressources connexes
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