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Mise à jour – L’activité minière au Québec : gérer les obligations réglementaires et contractuelles face aux répercussions de la COVID-19

15 avril 2020

La pandémie de COVID-19 évolue rapidement, entraînant avec elle des fermetures de mines et de projets d’exploration par suite des restrictions imposées par divers niveaux de gouvernement. La gestion de la santé et de la sécurité de la main-d’œuvre et des collectivités, la réduction au minimum des opérations minières et la gestion des flux de trésorerie à court terme sont des questions qui sont au premier plan pour toutes les entreprises du secteur minier. En cette période de turbulences, les sociétés minières ne doivent pas non plus perdre de vue leurs obligations réglementaires et contractuelles, ainsi que la gestion des conséquences à moyen et à long terme de ces obligations.

Bien que les entreprises du secteur minier doivent s’efforcer d’éviter d’éventuels manquements à leurs obligations contractuelles et toute non-conformité à la réglementation applicable, elles doivent également être prêtes à réagir en cas d’infraction ou de non-conformité. Les questions réglementaires et contractuelles présentées ci-après devraient être prises en compte, mais les sociétés minières devraient aussi garder à l’esprit que des questions propres à leurs activités pourraient s’y ajouter. Cette liste n’aborde pas les questions en matière d’emploi, de santé, de sécurité, de retraite, de fiscalité, de valeurs mobilières et de divulgation publique. 

RENOUVELLEMENT ET MAINTIEN DES DROITS MINIERS

En raison de la situation créée par la COVID‑19, les sociétés minières pourraient éprouver des difficultés à se conformer aux exigences en matière de frais, de travail et d’administration relativement au maintien et au renouvellement de leurs droits miniers. De telles difficultés pourraient d’ailleurs entraîner l’expiration automatique des droits et la perte de ces derniers.

Le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles (le « MERN ») du Québec a annoncé deux mesures exceptionnelles de soutien pour les titres miniers qui sont inscrits au Registre public des droits miniers, réels et immobiliers et qui visent les substances minérales de surface et souterraines autres que le pétrole et le gaz. D’autres mesures pourraient suivre en fonction de l’évolution des circonstances actuelles.

À compter du 19 mars 2020 et jusqu’à nouvel ordre, les baux miniers (« BM »), les concessions minières (« CM »), les baux exclusifs (« BEX ») pour l’exploitation de substances minérales de surface, les baux non exclusifs (« BNE ») pour l’exploitation des substances minérales de surface et les permis de prospection devant expirer pendant la période des mesures d’urgence conserveront leur statut actif. En l’absence de clarifications additionnelles par le MERN, les sociétés minières ne devraient pas voir cette mesure comme constituant une exemption de leur obligation de payer les frais annuels et les frais de renouvellement ou de présenter des demandes de renouvellement relativement à ces droits miniers. En cas de doute, il convient de communiquer avec le MERN ou la municipalité régionale de comté concernée (pour les baux miniers non exclusifs).

En ce qui concerne les claims miniers (« CDC » ou « CL »), la période de validité de tous les claims miniers en vigueur au Québec a été suspendue pour une période de 12 mois à compter du 9 avril 2020. L’annonce de la suspension publiée par le MERN prévoit l’ajout d’un délai de 12 mois suivant la date actuelle d’expiration de chaque claim. Toutefois, cette suspension ne s’applique pas aux claims déjà suspendus à la date de l’annonce (soit le 9 avril 2020) et cette mesure n’est pas rétroactive. Le titulaire qui ne souhaite pas la suspension de la période de validité de ses claims doit demander, par courriel, la levée de la suspension auprès du Centre de services des mines dans les dix jours ouvrables suivant la réception de l’avis de suspension.

TRAVAUX MINIMUMS OBLIGATOIRES ET RAPPORTS

Dans le but de réduire les délais de traitement des rapports des travaux effectués au titre d’un claim, à compter du 12 mars 2020, les décisions du MERN portant sur le refus des travaux statutaires (travaux d’exploration minimums obligatoires à effectuer pour maintenir les droits miniers actifs) ne seront accompagnées dès lors plus d’avis indiquant la possibilité de faire appel de la décision de refus. Le MERN transmettra plutôt au titulaire de droit minier un projet d’avis de sa décision de refus. Le titulaire disposera d’un délai de 15 jours pour faire part de ses commentaires au MERN avant que ce dernier prenne une décision finale. Les titulaires de droits miniers doivent s’assurer que les coordonnées que possède le MERN à leur sujet sont à jour. De plus, s’ils reçoivent un tel avis, ils doivent y répondre dans les plus brefs délais.

DÉCLARATIONS OBLIGATOIRES QUANT AUX PAIEMENTS PAR LES ENTREPRISES MINIÈRES, PÉTROLIÈRES ET GAZIÈRES

Aux termes de la Loi sur les mesures de transparence dans les industries minière, pétrolière et gazière (la « Loi »), certaines entreprises du secteur minier, pétrolier et gazier sont tenues de fournir à l’Autorité des marchés financiers du Québec (l’« Autorité »), au plus tard le 150e jour suivant la fin de leur exercice, une déclaration indiquant tous les paiements prescrits faits à certains bénéficiaires, si la valeur totale de ces paiements est d’au moins 100 000 $ CA. Le 27 mars 2020, le MERN et l’AMF ont annoncé qu’en raison des perturbations provoquées par la pandémie de COVID-19, les déclarations annuelles devant être produites auprès de l’AMF seront acceptées dans un délai allant jusqu’à 120 jours après le délai prescrit par la Loi.
 
BAUX DE TERRES PUBLIQUES À DES FINS D’ACTIVITÉS MINIÈRES

Les baux de terres publiques délivrés par le MERN pour les bâtiments administratifs et industriels, les sites de résidus et autres infrastructures minières sont souvent renouvelables sur une base annuelle, le loyer étant payé à l’avance. Bien que le MERN envoie généralement un avis de paiement au moins 30 jours avant l’expiration d’un bail, les entreprises souhaitant renouveler leurs baux dans les délais prescrits doivent tenir compte des périodes de traitement plus longues du gouvernement.

QUESTIONS RELATIVES À L’ASSURANCE

Les entreprises devraient examiner les modalités de leurs polices d’assurance pour déterminer si une couverture est disponible pour les pertes liées à une perturbation possible de leurs activités en raison de la COVID-19. Les parties assurées devraient également prendre connaissance des modalités de leurs polices d’assurance relativement aux obligations d’aviser l’assureur, et garder à l’esprit leur obligation d’atténuer les pertes.

SUSPENSION TEMPORAIRE OU PERMANENTE DES ACTIVITÉS MINIÈRES

Alors que les mines au Québec sont maintenant en situation d’entretien et de maintenance, il y a lieu de noter que l’exploitant doit fournir un avis de suspension des activités au MERN et au ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques du Québec (« MELCC ») au moins 10 jours avant le début de toute suspension d’une durée de six mois des activités minières.

Dans les quatre mois suivant la suspension des travaux, l’exploitant doit fournir au MERN et au MELCC une copie des plans des travaux souterrains, des mines de surface, des installations au sol et des dépôts de résidus. Ces plans doivent être homologués par un ingénieur ou un géologue. L’exploitant doit également fournir au MERN des plans indiquant les résultats des évaluations géologiques et géophysiques, un registre de tous les trous de forage et un rapport sur la quantité et la nature des gisements minéralisés non exploités.

QUESTIONS ENVIRONNEMENTALES

À mesure qu’évoluera la crise de la COVID-19, la conformité aux exigences de la réglementation environnementale présentera des défis pour les entreprises. Bien que des systèmes de gestion environnementale conçus pour maintenir la conformité réglementaire puissent être en place dans le cadre d’activités liées aux ressources naturelles, le respect rigoureux de toutes les exigences prévues par la loi pourrait, à un certain moment, se révéler ardu en raison des obstacles juridiques et pratiques associés aux mesures d’urgence prises en réponse à la pandémie de COVID‑19. Pour en savoir plus à ce sujet, veuillez consulter notre Bulletin Blakes intitulé Conformité à la réglementation environnementale durant la pandémie de COVID-19.

INEXÉCUTION CONTRACTUELLE ET DIFFÉRENDS ÉVENTUELS

À la lumière des diverses répercussions de la pandémie de COVID-19, comme la suspension temporaire des activités minières, les perturbations aux chaînes d’approvisionnement, la baisse des prix des matières premières et la réduction des réserves de liquidités des sociétés minières, on peut s’attendre à un nombre accru de réclamations pour rupture de contrat. De plus, les entreprises pourraient être confrontées à des avis de défaut et de proposition qui pourraient nécessiter une réponse rapide. Plus important encore, les défauts et manquements à l’exercice des droits dans les délais prescrits pourraient entraîner la perte de ces droits.

Les entreprises devraient d’abord repérer les contrats qui peuvent être touchés par la situation de la COVID-19 et accorder la priorité à ceux qui sont d’importance sur le plan financier et qui sont essentiels aux opérations commerciales de l’entreprise. Les relations contractuelles verbales doivent également être prises en compte.

Ces contrats clés devraient ensuite faire l’objet d’un examen dans le but de repérer les dispositions pertinentes dans les circonstances, telles que les clauses de force majeure, les clauses relatives aux effets défavorables importants, les droits de priorité, les conditions de paiement, les périodes ou dates d’exécution fixes, les clauses relatives à la durée et au renouvellement, les exigences en matière d’assurance, les clauses relatives à l’inexécution, les droits de résiliation, les indemnités, les mécanismes de règlement des différends et les avis.

Nous vous proposons un outil de planification pour le suivi des obligations contractuelles. Les entreprises devant passer en revue un nombre important de contrats auraient avantage à avoir recours à des outils d’intelligence artificielle pour une efficacité accrue.

Une entreprise qui fait l’inventaire de ses contrats aura ainsi l’occasion :

  • de repérer et de comprendre les secteurs où son exposition est plus importante (exploitation; finances; etc.);

  • d’anticiper l’inexécution possible d’une obligation contractuelle (par l’entreprise elle-même ou une contrepartie) ou d’autres circonstances pouvant entraîner la résiliation anticipée du contrat ou la perte de droits et de recours;

  • de passer en revue ses droits de priorité (options, droits de premier refus, droits d’achat, etc.).

En ce qui a trait aux relations contractuelles clés, les résultats de cette analyse seront essentiels à l’élaboration et à la mise en œuvre d’un plan de continuité et de reprise des activités, lequel devrait contenir :

  • un plan de communication avec les contreparties, ayant notamment pour but de consolider les relations commerciales importantes et de limiter le risque d’inexécution;

  • des solutions de rechange pour les relations existantes lorsque la contrepartie est plus susceptible d’être gravement touchée par la crise;

  • des stratégies d’atténuation à mettre en œuvre si l’entreprise se trouve en défaut de ses obligations contractuelles;

  • un plan permettant à l’entreprise de conserver ses droits et recours légaux;

  • une stratégie permettant à l’entreprise de gérer de multiples différends possibles en tenant compte de ses intérêts commerciaux, de ses priorités d’affaires, de ses moyens financiers anticipés et de son pouvoir de négociation, ainsi que des stratégies individuelles pour les différends possibles à traiter en priorité.

Si vous avez des questions concernant les sujets abordés dans le présent article, ou si vous avez besoin d’aide pour l’examen de vos obligations légales et de vos contrats, veuillez communiquer avec Viorelia Guzun, Charles Kazaz ou un autre membre de notre groupe Mines.

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