Comme le mentionne le budget du Québec du 21 mars 2019, le gouvernement du Québec a renforcé les exigences en matière de divulgation s’appliquant aux contrats de prête-nom (la « mesure »). Cette initiative s’inscrit dans la visée du gouvernement de protéger l’intégrité et l’équité de son régime fiscal. La mesure fait partie du bulletin d’information 2019-5 (le « Bulletin ») publié par le ministère des Finances du Québec (le « ministère des Finances ») le 17 mai 2019. La législation fiscale du Québec sera modifiée en conséquence.
Au moment de la rédaction du présent article, la mesure serait pertinente pour tout contribuable qui est assujetti aux lois fiscales du Québec et qui a conclu un contrat de prête-nom.
CONTRATS DE PRÊTE-NOM
La mesure vise les contrats de prête-nom conclus dans le cadre d’une opération ou d’une série d’opérations entraînant des « conséquences fiscales » au Québec. Les contrats de prête-nom sont des formes légales de mandats qui, en vertu du droit civil québécois, permettent à un mandataire d’agir pour le compte d’un mandant tout en se présentant aux yeux de tiers comme agissant en son propre nom. De tels contrats sont utilisés habituellement, mais non exclusivement, dans le cadre d’opérations immobilières qui impliquent plusieurs parties et où il existe un désir commercial légitime de souplesse et d’anonymat.
OBLIGATION DE DIVULGATION
Avant l’introduction de la mesure, la divulgation d’un contrat de prête-nom à Revenu Québec était nécessaire pour garantir sa reconnaissance aux fins de l’impôt. Revenu Québec a adopté une position administrative selon laquelle cette divulgation devait figurer dans les déclarations de revenus des parties pour l’année d’imposition durant laquelle ces parties ont conclu le contrat. Ainsi, bien que la mesure ne soit pas totalement inattendue, elle vient élargir les obligations fiscales de divulgation actuelles en y ajoutant un formulaire prescrit, des échéanciers et des pénalités.
La divulgation doit être faite à Revenu Québec au moyen d’une déclaration de renseignements prescrite, laquelle n’a pas encore été publiée. Le Bulletin indique toutefois qu’une telle divulgation doit comprendre les renseignements suivants :
- la date du contrat de prête-nom;
- l’identité des parties au contrat de prête-nom;
- une description factuelle complète de l’opération ou de la série d’opérations à l’égard de laquelle le contrat de prête-nom se rapporte, ainsi que l’identité de toute partie à l’égard de laquelle ladite opération ou série d’opérations entraîne des conséquences fiscales;
- tout autre renseignement demandé dans le formulaire prescrit.
PRODUCTION DE DÉCLARATION DE RENSEIGNEMENTS
Cette déclaration de renseignements doit être produite auprès de Revenu Québec dans les 90 jours suivant la date de la conclusion du contrat de prête-nom. Il n’est pas nécessaire de produire le formulaire prescrit pour chaque année d’imposition durant laquelle l’entente est en vigueur. De plus, la déclaration ne doit être produite que par une seule des parties.
À défaut de produire le formulaire prescrit dans les délais impartis, les parties au contrat de prête-nom encourront conjointement, jusqu’à concurrence de 5 000 $ CA, une pénalité de 1 000 $ CA et une pénalité additionnelle de 100 $ CA par jour à compter du deuxième jour que dure l’omission.
Le non-respect du délai peut entraîner également la suspension du délai de prescription par ailleurs applicable à une année d’imposition d’une personne prenant part à un contrat de prête-nom relativement aux conséquences fiscales, pour cette année, qui découlent d’une opération ou d’une série d’opérations survenue au cours de cette année et s’inscrivant dans le cadre du contrat de prête-nom.
DATES D’APPLICATION
La mesure s’appliquera aux contrats de prête-nom conclus le 17 mai 2019 ou après cette date. De plus, elle s’appliquera aux contrats de prête-nom conclus avant ce jour lorsque les conséquences fiscales de l’opération ou de la série d’opérations à l’égard de laquelle le contrat de prête-nom se rapporte se poursuivent le 17 mai 2019 ou après cette date. Dans de tels cas, la divulgation devra être produite auprès de Revenu Québec au plus tard le 16 septembre 2019.
OBSERVATIONS
À la suite de discussions préliminaires avec un représentant du gouvernement du Québec, nous avons obtenu certains renseignements supplémentaires au sujet de la mesure. Par exemple, il semble que la mesure ne s’appliquerait pas aux courtiers qui sont inscrits dans un registre de valeurs mobilières à titre de porteurs de titres pour le compte d’une autre personne et au nom de celle-ci.
Or, malgré ces renseignements supplémentaires, plusieurs questions demeurent sans réponse quant à la portée de la mesure. Par exemple, l’étendue du terme « conséquences fiscales » demeure floue. Il pourrait donc être difficile de déterminer si un contrat de prête-nom existant et les opérations y afférentes continuent d’entraîner des conséquences fiscales en date du 17 mai 2019 ou après cette date. En outre, aucune information n’a été fournie quant au moment où un délai de prescription suspendu serait rétabli. Les contribuables auraient avantage à prendre connaissance de ces questions et à obtenir des conseils en conséquence.
Nous espérons que des conseils et des renseignements utiles seront fournis avant la première échéance de divulgation (soit le 15 août 2019) afin que les contribuables puissent s’acquitter adéquatement de leurs obligations conformément à la mesure.
Nous continuerons de suivre l’évolution de la mesure et poursuivrons nos discussions avec le ministère des Finances afin de communiquer à nos clients tout nouveau développement en la matière.
Pour en savoir davantage, communiquez avec :
John Leopardi 514-982-5030
ou un autre membre de notre groupe Fiscalité.