Le 9 mai 2024, la ministre des Transports et de la Mobilité durable Geneviève Guilbault a déposé le Projet de loi no 61 – Loi édictant la Loi sur Mobilité Infra Québec et modifiant certaines dispositions relatives au transport collectif (le « Projet de loi »). Le Projet de loi institue « Mobilité Infra Québec » (« MIQ »), qui aura pour mission principale, dans une perspective de mobilité durable et lorsque le gouvernement lui en confie la responsabilité, l’analyse d’opportunité, la planification ou la réalisation de projets complexes de transport.
Compétence de MIQ
Le Projet de loi précise que seule MIQ aura compétence à l’égard d’un projet complexe de transport pour lequel la planification ou la réalisation lui est confiée par le gouvernement. Le concept de « projet complexe de transport » n’est pas clairement défini dans le Projet de loi, si ce n’est que pour décrire, de manière non limitative, les objectifs qu’il pourrait viser. On peut donc supposer que la détermination de la nature « complexe » d’un projet sera assujettie à la décision du gouvernement. En outre, malgré ce qu’auraient pu laisser croire les nombreuses informations qui circulaient avant le dépôt du Projet de loi, les projets complexes de transport ne se limiteront pas au transport collectif. Ainsi, pour les projets qui lui seront confiés, MIQ aura préséance sur les autres agences ayant compétence en matière de transport, notamment l’Autorité régionale de transport métropolitain (l’« ARTM »).
Le Projet de loi précise aussi que MIQ n’aura pas la responsabilité de l’exploitation d’un système de transport collectif dans le cadre d’un projet complexe de transport collectif qui lui serait confié. Cette activité devra faire l’objet d’une entente entre le ministre et, selon le cas, une municipalité, une société de transport en commun, le Réseau de transport métropolitain (le « RTM »), l’ARTM ou tout autre organisme. Par ailleurs, le Projet de loi précise que la responsabilité financière de l’exploitation d’un tel système de transport collectif relèvera de l’exploitant.
Toutefois, bien que la responsabilité de l’exploitation d’un système de transport collectif ne soit pas dévolue à MIQ, le Projet de loi précise que cette dernière aura la responsabilité d’acquérir tous les biens requis à l’exploitation d’un tel système, comme le matériel roulant, soulignant ainsi l’intention de confier à MIQ la mission de réaliser un projet intégré. On peut donc s’attendre à ce que l’entente entre le ministre et un exploitant, évoquée ci-dessus, soit conclue tôt dans le processus afin d’éviter des enjeux d’interface et d’intégration.
Selon les principes de développement durable et de diminution de l’empreinte carbone, MIQ pourra planifier la coordination des différents services de transport ainsi que le maintien, l’amélioration et le remplacement d’équipements et d’infrastructures de transport. Toutefois, le Projet de loi n’aborde pas la question du financement de ces activités.
Dans le cadre de l’exercice de sa mission et de ses fonctions, MIQ pourra aussi conclure une entente avec un ministère, un organisme du gouvernement ainsi qu’avec toute autre personne. Elle pourra aussi conclure une entente avec un autre gouvernement que celui du Québec ou une organisation internationale, conformément à la loi, notamment aux termes des dispositions de la Loi sur le ministère du Conseil exécutif.
Le Projet de loi est silencieux quant au rôle de MIQ dans le cadre de l’application de la Loi concernant les partenariats en matière d’infrastructures de transport, bien que les dispositions de cette dernière visent des projets d’infrastructure complexes.
Organisation de MIQ
MIQ sera administrée par un conseil d’administration composé de neuf membres, dont le sous-ministre des Transports ou son représentant. Le gouvernement pourra nommer des vice-présidents au nombre qu’il fixe.
Aux termes du Projet de loi, la nomination des employés par MIQ se fera selon le plan d’effectifs qu’elle établit. Les unités de négociation des conventions collectives sont prédéterminées. À noter aussi que les premiers membres du conseil d’administration de MIQ ne seront pas assujettis aux dispositions des articles 3.1 et 3.3 de la Loi sur la gouvernance des sociétés d’État relatives aux profils de compétence et d’expérience des membres du conseil d’administration.
Statut de propriétaire de MIQ
Conformément au Projet de loi, MIQ pourra acquérir, par expropriation, les immeubles qu’elle juge nécessaires dans le cadre de sa mission. Cette acquisition peut être faite pour son compte, ou encore pour celui du gouvernement, d’une municipalité locale, d’une société de transport en commun, du RTM ou de l’ARTM.
Ultimement, les biens construits ou reconstruits par MIQ seront la propriété de la municipalité locale, de la société de transport en commun ayant compétence, du RTM ou de l’ARTM, selon la nature du bien. Toutefois, le gouvernement se réserve le droit de s’attribuer la propriété de ce bien, ou de l’attribuer à toute autre personne qu’il aura déterminée.
Coordination avec les municipalités
Le Projet de loi prévoit qu’aux fins de la planification ou de la réalisation d’un projet complexe de transport, MIQ et une municipalité concernée pourront prévoir par entente certains éléments afférents à l’occupation temporaire, à la modification ou au réaménagement de voies publiques. À défaut d’entente, une procédure d’avis préalable est prévue, aux termes de laquelle MIQ disposera du pouvoir d’effectuer l’occupation, les modifications ou les réaménagements projetés.
Conclusion
La création de MIQ n’est pas singulière : la création d’un organisme agile regroupant des expertises dédiées à la planification et à la mise en œuvre de projets a été retenue dans plusieurs provinces et territoires, y compris au Québec dans le cadre de la réalisation fructueuse d’infrastructures complexes, comme la Maison Symphonique de Montréal et le pont de l’autoroute 25. Il reste à voir quelles seront les répercussions de cette nouvelle agence sur les projets de transport collectif si le Projet de loi est adopté.
Nous vous invitons également à lire notre Bulletin Blakes complémentaire intitulé Projet de loi n° 62 : Vers une grande réforme du secteur des infrastructures.
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