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Revue de l’année 2023 du droit de l’emploi au Canada

1 février 2024

Le droit de l’emploi au Canada a continué d’évoluer en 2023. Partout au pays, des tribunaux ont abordé un éventail de questions relevant de ce domaine de droit, y compris les périodes de préavis, les ententes à terme fixe d’entrepreneurs, le délit de harcèlement et le vol de temps. Bien qu’un bon nombre de décisions soient intéressantes, voici un survol de quelques-unes des décisions les plus notables de 2023.

Les petites dépenses d’affaires frauduleuses peuvent justifier un congédiement avec motif valable

Dans l’affaire Mechalchuk v. Galaxy Motors (1990) Ltd., la Cour suprême de la Colombie-Britannique (la « CSCB ») a déterminé que le demandeur, M. Mechalchuk, avait été congédié avec motif valable car il avait soumis à des fins de remboursement des dépenses d’affaires frauduleuses totalisant 250 $ CA. M. Mechalchuk avait présenté des reçus pour frais de repas en alléguant que les repas en question avaient eu lieu à des fins d’affaires alors qu’en réalité, il s’agissait de reçus pour des repas personnels qu’il avait partagé avec son épouse. La CSCB a conclu que M. Mechalchuk avait fait preuve de malhonnêteté à l’égard de son employeur et avait abusé de la confiance de ce dernier. Il n’avait pas non plus avoué sa faute lorsqu’on lui a donné l’occasion de le faire. Ces déterminations étaient suffisantes pour justifier le congédiement avec motif valable de M. Mechalchuk. Cette décision établit que les actions frauduleuses d’un employé peuvent constituer un motif valable pour le congédiement de ce dernier, même lorsque le coût financier lié à de telles actions est peu élevé.

Les périodes de préavis ne peuvent être prolongées que dans des circonstances exceptionnelles

En 2023, des tribunaux de l’Ontario ont confirmé que les périodes de préavis de plus de 24 mois ne sont justifiées que dans des circonstances exceptionnelles. Dans l’affaire Milwid v. IBM Canada Ltd., le tribunal a accordé au demandeur des dommages-intérêts tenant lieu de préavis correspondant à une période de préavis de 27 mois, en soulignant que cette détermination se fondait sur des circonstances exceptionnelles, dont le fait que le congédiement avait eu lieu deux mois après le début de la pandémie. De façon similaire, le tribunal saisi de l’affaire Lynch v. Avaya Canada Corporation a accordé au demandeur des dommages-intérêts tenant lieu de préavis correspondant à une période de préavis de 30 mois, en statuant que le prolongement d’une période de préavis au-delà de 24 mois n’est justifié que dans des circonstances exceptionnelles.

Un nouveau délit de harcèlement est créé en Alberta

La Cour du Banc du Roi de l’Alberta (la « Cour ») a créé un nouveau délit de harcèlement en common law dans le cadre de l’affaire Alberta Health Services v. Johnston. La Cour a statué que le défendeur avait commis un délit de harcèlement, lequel naît lorsque les critères suivants sont satisfaits : 1) la personne s’est livrée, de façon répétée, à des communications, à des menaces, à des insultes, à des traques ou à d’autres comportements de harcèlement en personne ou par d’autres moyens; 2) la personne savait ou aurait dû savoir qu’un tel comportement n’était pas opportun; 3) le comportement en question a porté atteinte à la dignité du plaignant et ferait craindre à une personne raisonnable pour sa sécurité ou celle de ses proches, ou pourrait vraisemblablement leur causer une détresse émotionnelle; et 4) le comportement a causé préjudice. Il y a lieu de noter que le droit relatif à cette question demeure incertain dans les autres provinces canadiennes. Pour en savoir davantage au sujet de cette affaire, consultez notre Bulletin Blakes d’août 2023 intitulé Alberta’s New Tort of Harassment (disponible en anglais seulement).

Les entrepreneurs indépendants sont tenus de limiter leur préjudice

Dans l’affaire Monterosso (c.o.b. Truck Leasing Canada) v. Metro Freightliner Hamilton Inc., la Cour d’appel de l’Ontario (la « CAO ») a statué que les entrepreneurs indépendants sont tenus de limiter leur préjudice à la suite de la violation d’une entente à terme fixe. Dans cette affaire, un entrepreneur indépendant avait conclu une telle entente avec une société, laquelle entente prévoyait un terme fixe de 72 mois. La société a mis fin aux services de l’entrepreneur alors qu’il restait 65 mois au terme de l’entente. Dans des affaires précédentes, des employés à durée déterminée se sont vu octroyer un paiement correspondant à la période restante de leur contrat de travail lorsque ce dernier ne comportait aucune disposition exécutoire sur la cessation d’emploi et ce, sans qu’il ne soit nécessaire pour l’employé de tenter d’atténuer son préjudice. Or, dans cette affaire, bien que le tribunal ait attribué à l’entrepreneur indépendant un montant à titre de paiement pour le reste du terme fixe prévu à l’entente, ce paiement était néanmoins assujetti au devoir de l’entrepreneur de limiter son préjudice.

Les enregistrements clandestins effectués par un employé au travail constituent un motif valable de congédiement

Dans sa décision rendue en 2023 dans le cadre de l’affaire Shalagin v. Mercer Celgar Limited Partnership, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique (la « CACB ») a confirmé une décision de première instance selon laquelle un employé ayant enregistré clandestinement des collègues avait été congédié avec motif valable. La CACB a conclu que les enregistrements étaient malhonnêtes et seraient considérés par la plupart des employeurs comme une inconduite qui mine la relation de confiance entre l’employeur et l’employé. La CACB a également déterminé que les enregistrements violaient les intérêts en matière de protection de la vie privée des personnes enregistrées, ainsi que de celles dont il était question dans les enregistrements. En s’appuyant sur ces facteurs et les circonstances dans leur ensemble, la CACB a confirmé la décision de première instance selon laquelle il s’agissait d’un congédiement avec motif valable.

Une employée est sommée de verser un montant à son employeur pour « vol de temps » 

Dans l’affaire Besse v. Reach CPA Inc., le Civil Resolution Tribunal de la Colombie-Britannique (le « Tribunal ») a ordonné à Karlee Besse de dédommager son ancien employeur pour les pertes encourues par ce dernier en raison du vol de temps qu’elle avait perpétré. Ayant déterminé que le logiciel utilisé par l’employeur pour enregistrer les activités de travail de Mme Besse l’avait vraisemblablement fait avec justesse, le Tribunal a donc conclu que Mme Besse avait comptabilisé 50,76 heures de travail inexistantes dans ses feuilles de temps. Le Tribunal a confirmé que le congédiement de Mme Besse avait été pour un motif valable et a ordonné à Mme Besse de verser à son ancien employeur, à titre de dette et de dommages-intérêts, un montant de 2 603,07 $ CA pour vol de temps.

La Ville du Grand Sudbury est tenue responsable à titre d’employeur pour le décès d’une piétonne

Dans l’affaire R. c. Grand Sudbury (Ville), la Cour suprême du Canada (la « CSC »), a statué que la Ville du Grand Sudbury (la « Ville ») peut, à titre d’« employeur » en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité au travail (la « LSST ») de l’Ontario, être tenue responsable du décès d’une piétonne, et ce, même si la Ville a retenu les services d’un tiers pour entreprendre le chantier de construction concerné en tant que « constructeur ». Dans sa décision, la CSC a été partagée également (soit 4 contre 4), ce qui arrive assez rarement. Comme la majorité est requise pour infirmer la décision d’un tribunal inférieur, l’appel a été rejeté et la décision de la CAO a été confirmée. Pour en savoir davantage, consultez notre Bulletin Blakes de novembre 2023 intitulé Élargir la portée de la responsabilité : décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Grand Sudbury (Ville)

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