En vertu de la nouvelle loi canadienne sur l’esclavage moderne, la Loi sur la Lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaines d’approvisionnement (la « Loi »), les sociétés ouvertes et les entreprises privées canadiennes qui atteignent certains seuils quant à leur taille seront tenues de déposer des rapports publics sur les mesures qu’elles auront prises au cours de l’exercice qui précède pour lutter contre le travail forcé et le travail des enfants dans leurs chaines d’approvisionnement, ainsi que pour prévenir et atténuer les risques relatifs au recours au travail forcé ou au travail des enfants. La Loi entrera en vigueur le 1er janvier 2024 et les entités visées devront fournir un premier rapport (le « rapport ») au plus tard le 31 mai 2024. Pour un survol de la Loi, y compris un aperçu de son champ d’application et des obligations de déclaration qui en découle, veuillez consulter notre Bulletin Blakes intitulé Projet de loi S-211 : Obligation de faire rapport sur le travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement (le « bulletin antérieur »). Le présent bulletin donne des précisions supplémentaires sur les responsabilités et engagements en vertu de la Loi ainsi que sur les mesures que les entités visées devraient prendre pour se préparer en vue de la remise du premier rapport.
Responsabilités et engagements
La Loi exige que le conseil d’administration de l’entité visée approuve le rapport, qui doit par ailleurs être signé par un ou plusieurs membres du conseil. La Loi comprend des dispositions en matière de responsabilité visant quiconque omettrait de se conformer à la Loi ou ferait une déclaration trompeuse. En cas d’infraction, l’entité contrevenante pourra se voir infliger une amende, faire l’objet d’une perquisition (sans mandat) ou être visée par une ordonnance d’exécution, sans parler du fait qu’elle s’exposera à un risque d’atteinte à sa réputation. Il est important de noter que la responsabilité personnelle des administrateurs et des dirigeants pourra être engagée.
Une déclaration fausse ou trompeuse faite dans un rapport pourra non seulement faire naître une responsabilité en vertu de la Loi, mais aussi aux termes du régime de responsabilité sur le marché secondaire en cas de déclaration fausse ou trompeuse par une société ouverte dans certaines circonstances. Si une responsabilité délictuelle devait être engagée, on peut penser que la logique qui serait adoptée serait celle appliquée dans le cadre de requêtes fondées sur des allégations d’« écoblanchiment » intentées contre des sociétés soupçonnées d’avoir publié de l’information fausse ou trompeuse sur les mesures qu’elles prennent pour soutenir la durabilité et lutter contre les changements climatiques.
Pour réduire le plus possible leur exposition aux risques en matière de responsabilité civile ou de responsabilité prévue par la loi, les entités visées devraient s’assurer de l’exactitude des déclarations contenues dans leur rapport, étayer l’information fournie au moyen de documents sous-jacents et mettre en place des processus de diligence raisonnable. Par conséquent, les entités devraient se préparer dès maintenant à fournir des renseignements exacts.
Êtes-vous prêt à déposer un premier rapport?
À ce jour, le gouvernement n’a donné aucune indication quant aux mesures particulières qu’une société devrait prendre pour se conformer à la Loi. Le premier rapport est attendu dans un peu plus de six mois. Il devra rendre compte des mesures prises en 2023 par une entité donnée pour prévenir et réduire le risque de recours au travail forcé ou au travail des enfants dans sa chaine d’approvisionnement, et inclure absolument sept types de renseignements supplémentaires que nous avons décrits dans notre bulletin antérieur.
Sur le marché canadien, des entreprises se préparent déjà à se conformer aux nouvelles exigences en mettant notamment en œuvre les mesures suivantes :
Évaluation des risques et cartographie de la chaine d’approvisionnement. La Loi exige que les entités visées identifient et signalent les parties de leurs activités et de leurs chaines d’approvisionnement qui comportent un risque de recours au travail forcé ou au travail des enfants. Lorsqu’elles déclarent publiquement les risques associés à leur chaine d’approvisionnement et à leurs activités, les entités devraient se fonder sur une source sous-jacente pour caractériser les risques qu’elles mentionnent dans le rapport. En vue de se préparer à s’acquitter de leurs nouvelles obligations en matière de déclaration, de nombreuses entreprises ont commencé à évaluer les risques auxquels elles sont exposées et à cartographier leur chaine d’approvisionnement dans le contexte de la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants afin d’aider leur conseil d’administration à examiner et à approuver ce volet du rapport à fournir.
Rédaction et révision des politiques. La Loi exige que les entités fassent rapport sur les politiques en place qui traitent du travail forcé et du travail des enfants. Par conséquent, de nombreuses entreprises ont commencé à mettre à jour leurs politiques, y compris leur code de conduite et le code de conduite des fournisseurs, afin de s’assurer que tout sera en règle au moment de fournir les renseignements exigés sur leurs politiques.
Contrôle diligent du fournisseur, et modalités et conditions. La Loi exige que les entités fassent rapport sur les processus de diligence raisonnable relatifs au travail forcé et au travail des enfants, ainsi que sur les mesures prises pour évaluer et gérer ces risques. De nombreuses entités ont donc commencé à passer en revue leurs processus de contrôle diligent des fournisseurs de même que les modalités et conditions de leurs contrats avec eux dans le cadre de leurs efforts visant à mieux gérer ces risques.
Formation. La Loi oblige les entités à rendre compte de la formation donnée aux employés sur le travail forcé et le travail des enfants. En conséquence, certaines entreprises travaillent à élaborer un programme de formation sur le travail forcé et le travail des enfants à offrir à leurs employés ou à réviser celui en place.
Évaluation de l’efficacité. La Loi exige que les entités fassent rapport sur la façon dont elles évaluent l’efficacité des efforts qu’elles déploient pour éviter le recours au travail forcé ou au travail des enfants dans le cadre de leurs activités et dans leurs chaines d’approvisionnement. Par conséquent, de nombreuses entreprises travaillent à adopter des indicateurs de rendement clés mesurables qu’elles pourront surveiller d’une année à l’autre, et modifier au besoin, afin d’appuyer l’information qu’elles devront fournir dans leurs rapports sur la façon dont elles évaluent leur efficacité à ce chapitre.
Chacune des mesures décrites précédemment peut soutenir les entités visées dans la préparation des rapports qu’elles devront déposer auprès du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et publier sur leur site Web. La prise de telles mesures ou de mesures similaires, selon les circonstances, pourra aider à faire en sorte que le conseil d’administration de ces entités aura la confiance dont il a besoin pour approuver le contenu du rapport, d'autant plus que la responsabilité personnelle de chacun des membres pourrait être engagée en cas de déclarations trompeuses.
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