Sauter la navigation

Une mine de bitcoins exploitée sur une concession de pétrole et de gaz fait l’objet d’une injonction permanente

1 avril 2025

Dans Roy Flowers v. Persist Oil and Gas Inc., la Cour du Banc du Roi de l’Alberta (la « Cour ») a prononcé une injonction permanente interdisant à la défenderesse d’exploiter une entreprise de minage de bitcoins parce que le bail sous-jacent ne permettait pas une telle activité.

Contexte

La demanderesse était la propriétaire en fief simple d’un terrain visé par un bail cédé à la défenderesse  comprenant un site de compression de pétrole et de gaz de 3,14 acres et une voie d’accès. Le bail permettait l’utilisation des lieux loués [Traduction] « pour toutes les fins et tous les usages nécessaires à l’exploration, à la mise en valeur et à la production de pétrole, de gaz, d’hydrocarbures connexes ou de substances produites en association avec ceux-ci […] ». La durée initiale du bail était de 10 ans et comprenait une période de renouvellement qui a pris fin le 12 novembre 2019. La défenderesse a tenté de négocier un renouvellement de bail additionnel, mais sans succès, et les parties n’ont jamais convenu d’un tel renouvellement.

En avril 2021, la défenderesse a apporté de l’équipement sur les lieux loués, dont deux génératrices au gaz de 1 mégawatt et des ordinateurs, afin d’effectuer du minage de bitcoins en utilisant le gaz naturel passant par le compresseur (le « minage »). La défenderesse a effectué du minage de façon intermittente lorsque les prix du gaz naturel étaient bas.

Décision

En fin de compte, la Cour a établi que le bail n’avait pas expiré en vertu de l’article 144 de la loi albertaine intitulée Environmental Protection and Enhancement Act, selon lequel le bail demeurait valide et utilisable jusqu’à ce qu’un certificat de remise en état soit délivré. Elle a également précisé que le droit de la défenderesse de conserver la possession des lieux loués était complété par une ordonnance d’accès aux terres accordée préalablement par le Land Property Rights Tribunal.

Cela étant, la Cour a noté que, compte tenu du sens littéral ordinaire des dispositions du bail relatives à l’utilisation permise, celui-ci ne permettait pas le minage de bitcoins, et ce, notamment parce qu’une telle activité ne faisait pas partie de la même catégorie ou du même genre qu’une activité produisant du pétrole, du gaz, des hydrocarbures connexes ou des substances produites en association avec ceux-ci. Elle a rejeté l’argument de la défenderesse selon lequel le minage était l’une des nombreuses options pouvant être utilisées afin de réaliser des profits à partir de sa production de gaz naturel et que cette activité était donc permise. La Cour a expliqué qu’en utilisant le paramètre de toute activité produisant un profit, la culture du cannabis serait autorisée, ce qui n’était évidemment pas le cas.

Bien que les réclamations de la demanderesse pour intrusion et nuisance aient été rejetées, la Cour a déterminé que le recours approprié dans cette affaire était l’injonction permanente. Elle a conclu que les droits de la demanderesse avaient été violés étant donné sa conclusion que le minage n’était pas une utilisation permise aux termes du bail et qu’une injonction était appropriée puisqu’un recours en dommages-intérêts ne serait pas adéquat en l’espèce. Pour en arriver à cette conclusion, la Cour a notamment tenu compte du fait que l’autorité du comté a exprimé son avis selon lequel le minage n’était pas conforme au règlement sur l’utilisation du sol applicable et que, par conséquent, des procédures pourraient être intentées à l’encontre de la demanderesse pourtant innocente.

La Cour a par ailleurs rejeté la demande de la demanderesse concernant la remise des profits tirés du minage. Elle a toutefois déclaré que, puisque la défenderesse avait contrevenu au bail, la demanderesse avait droit à des dommages-intérêts correspondant au montant que la demanderesse aurait pu raisonnablement demander afin de lui permettre de faire du minage sur ses terrains, et ce, jusqu’au moment où cette activité a cessé. La Cour a souligné que la preuve quantifiant ces dommages-intérêts ne lui avait pas été présentée, de sorte qu’un procès serait nécessaire si la demanderesse souhaitait aller de l’avant avec cette réclamation.

Conclusion

Il est intéressant de noter que cette affaire a été instruite parce que les deux parties ont convenu qu’un procès n’était pas nécessaire et que les questions pouvaient être tranchées de façon sommaire. Bien que la décision se soit fondée sur le libellé précis du bail, elle illustre les nombreuses questions juridiques qui se posent relativement au minage de cryptomonnaies sur des concessions de pétrole et de gaz.

Pour en savoir davantage, communiquez avec l’un des auteurs du présent bulletin ou un autre membre de notre groupe Litige et règlement des différends.

Plus de ressources