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Guide de Blakes

Litige et règlement des différends au Canada

Chapitre IX : Jugements étrangers


1. Choix des lois applicables et exigence de prouver les lois étrangères

Les lois applicables à l’égard d’une poursuite donnée dépendront du type de réclamation. Par exemple :

  • une action délictuelle (un délit civil ne découlant pas d’une rupture de contrat) est régie par les lois de l’endroit où le délit a eu lieu. Toutefois, un tribunal canadien peut décliner compétence ou refuser d’appliquer une loi étrangère dans certaines circonstances. Par conséquent, le choix des lois applicables pour une action délictuelle dépend des faits particuliers de l’affaire et d’une étude des doctrines concurrentes;
  • la compétence à l’égard d’une action contractuelle peut être établie par des dispositions contractuelles expresses, ou un tribunal établira les lois qui devraient s’appliquer après avoir déterminé le ressort qui a les liens les plus étroits avec l’opération. À cette fin, le tribunal examinera des facteurs tels que l’endroit où le contrat a été passé, l’endroit où celui-ci devait être exécuté, le lieu de résidence des parties, la forme juridique du contrat, la langue du contrat et les modalités d’arbitrage ou les clauses de compétence exclusive;
  • en ce qui concerne les biens, les lois applicables aux fins du conflit de lois dépendront de la question de savoir si le bien est meuble ou immeuble. Généralement, les biens immeubles constituent des biens réels, et les biens meubles constituent des biens personnels. Les biens immeubles sont assujettis aux lois du ressort où ils sont situés. Les lois applicables aux biens meubles dépendront des circonstances de l’action.

Les tribunaux canadiens traitent les lois étrangères comme une question de fait plutôt que comme une question de droit. Ainsi, la partie qui s’appuie sur une loi étrangère doit plaider et prouver l’existence de cette loi. Une loi étrangère est prouvée par le témoignage d’experts. Si la loi étrangère n’est pas prouvée à la satisfaction du tribunal, celui-ci appliquera les lois de son propre ressort. Un tribunal n’appliquera pas les lois d’un ressort étranger dans certaines circonstances, notamment si ces lois seraient contraires à l’ordre public de la province ou du territoire.

2. Exécution de jugements étrangers

Pour faire exécuter un jugement étranger au Canada, une partie doit obtenir une ordonnance d’un tribunal canadien. Les tribunaux canadiens ont adopté une approche souple et libérale en ce qui concerne la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers. Entre autres, le tribunal étranger devait avoir compétence. La compétence du tribunal étranger est établie en examinant s’il existait un lien réel et substantiel entre le défendeur et le ressort étranger au moment où l’action a été intentée. Si le défendeur résidait dans le ressort étranger lorsque l’action a été intentée, ou si le défendeur a reconnu ou accepté de reconnaître volontairement la compétence du tribunal étranger, celui-ci sera reconnu comme compétent. Les règles régissant l’exécution d’un jugement étranger en vertu du régime de droit civil du Québec sont légèrement différentes.

Même si un jugement étranger respecte les critères aux fins de reconnaissance et d’exécution au Canada, il existe certaines défenses à son exécution qu’un défendeur peut soulever. Notamment, un jugement étranger ne sera pas exécuté s’il a été obtenu par une fraude de la partie qui tente de le faire exécuter, si les procédures en vertu desquelles le jugement étranger a été obtenu étaient contraires aux principes de justice naturelle, ou si la cause d’action sous-jacente sur laquelle le jugement étranger est fondé est contraire à l’ordre public de la province ou du territoire en question. 


De plus, les tribunaux canadiens ne feront pas exécuter de jugements fondés sur les lois criminelles/quasi criminelles, fiscales ou publiques d’un territoire étranger.

En plus de la common law, plusieurs provinces et territoires ont adopté des lois régissant l’exécution réciproque des jugements. Les lois permettent à un créancier en vertu d’un jugement, dans certaines circonstances, de demander au tribunal de cette province ou de ce territoire une ordonnance aux fins d’enregistrement du jugement étranger. Il n’est possible de le faire que si le jugement étranger provient d’une autorité pratiquant la réciprocité, tel qu’il est établi dans la loi sur l’exécution réciproque des jugements. Un jugement étranger, s’il est reconnu dans une province canadienne ou un territoire canadien en vertu de la règle de common law, peut être exporté d’un ressort d’exécution réciproque au Canada vers d’autres en vertu d’une loi sur l’exécution réciproque des jugements. Une fois qu’un jugement étranger est enregistré, il a le même effet qu’un jugement rendu par le tribunal d’enregistrement. En outre, le tribunal d’enregistrement aura les mêmes pouvoirs et la même compétence à l’égard du jugement étranger qu’il a à l’égard de ses propres jugements. Les lois visant l’exécution réciproque des jugements dans les diverses provinces et les divers territoires ne modifient pas les règles du droit international privé. Elles prévoient simplement l’enregistrement de jugements comme procédure plus commode que l’ancienne, qui constituait à intenter une action pour faire appliquer un jugement.

3. Obtention de témoignages dans le cadre de procédures à l’étranger

3.1 Cueillette de témoignages au Canada dans le cadre de procédures à l’étranger

Une partie à une poursuite à l’extérieur du Canada peut requérir l’aide d’un tribunal canadien pour obtenir des témoignages de témoins au Canada aux fins d’utilisation dans le cadre du procès à l’étranger. Habituellement, cette aide est demandée par voie de lettre de demande ou de lettre rogatoire, c’est-à-dire une demande officielle d’un tribunal étranger adressée à un juge d’une cour supérieure canadienne qui demande la cueillette d’un témoignage d’un particulier résident du Canada.

Le justiciable étranger obtient d’abord la lettre de demande auprès du tribunal étranger où l’action est en instance. La procédure du tribunal étranger prévaudra à cette étape. La lettre de demande devrait nommer le témoin à interroger, décrire la nature du témoignage désiré et indiquer pourquoi le témoignage du témoin est pertinent et nécessaire. Après avoir obtenu la lettre de demande, le justiciable étranger doit présenter une demande au tribunal dans la province canadienne ou le territoire canadien où réside le témoin afin d’obtenir une ordonnance pour faire exécuter la lettre de demande.

Il n’est pas nécessaire que le pays où le tribunal à l’origine de la demande est situé soit partie à un traité avec le Canada. Toutefois, un tribunal canadien n’accordera pas d’ordonnance si celle-ci violait la souveraineté canadienne ou était contraire à l’ordre public canadien.

Selon l’objet du différend, la Loi sur la preuve au Canada ou la loi sur la preuve de la province ou du territoire où réside le témoin régira généralement la procédure en vertu de laquelle la lettre de demande est exécutée. Le tribunal canadien a le pouvoir d’ordonner, aux fins d’utilisation dans un procès tenu à l’étranger, l’interrogatoire d’un témoin ou la production d’un document, ou les deux, peu importe que le témoin soit partie à l’action étrangère ou simplement une personne qui détient des renseignements pertinents. Les tribunaux canadiens font généralement exécuter les lettres de demande afin de recueillir des témoignages qui seront utilisés au cours d’un procès. Selon l’autorité en vertu de la loi pertinente et les règles de procédure du tribunal visé par la demande, ils ont également le pouvoir de faire exécuter des lettres de demande pour des étapes préalables au procès dans les circonstances appropriées. La cour supérieure locale peut limiter la portée des questions ou des documents à produire. Ce faisant, le tribunal se fonde sur les règles de preuve et de procédure locales. 

3.2 Cueillette de témoignages à l’étranger dans le cadre de procédures au Canada

Un tribunal canadien peut ordonner la nomination d’un commissaire pour obtenir le témoignage d’un témoin qui se trouve à l’extérieur du Canada. La transcription de l’interrogatoire peut ensuite être utilisée au procès sans que le témoin doive être présent au Canada.

Les tribunaux canadiens peuvent émettre des lettres de demande afin de demander à une autorité ou à un tribunal étranger de les aider à forcer un témoin à comparaître devant un commissaire dans le ressort étranger pour répondre à des questions aux fins de constitution préalable de la preuve. L’exécution de la lettre de demande du tribunal canadien est à la discrétion du tribunal étranger et régie par les règles de procédure de ce ressort. Par conséquent, il pourrait être prudent de demander, dans la lettre de demande, qu’un serment soit prêté et qu’un contre-interrogatoire du témoin soit effectué. 

3.3 Conventions relatives à la procédure civile

Contrairement aux États-Unis, le Canada n’est pas partie à la Convention relative à la procédure civile de La Haye, mais est partie à la Convention relative à la signification et la notification à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale de La Haye. Par conséquent, sauf lorsque le témoignage est offert volontairement, l’obtention d’un témoignage au Canada en vue de son utilisation dans une procédure civile à l’étranger, et vice versa, s’effectue au moyen de lettres de demande. Le Canada a conclu environ 25 conventions bilatérales qui indiquent comment les lettres de demande devraient être transmises à l’autorité canadienne appropriée.

 

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