Le Groupe de travail sur la modernisation relative aux marchés financiers de l’Ontario (le « groupe de travail ») a récemment publié son rapport final (le « rapport final »), qui énonce plus de 70 recommandations visant à moderniser le régime de réglementation des marchés financiers de l’Ontario. Faisant suite au rapport de consultation initial du groupe de travail, le rapport final marque l’aboutissement des consultations entreprises en février 2020 dans le but d’améliorer la structure réglementaire de l’Ontario, de veiller à ce que les règles du jeu soient équitables, de favoriser l’innovation, de renforcer l’application de la loi et d’améliorer la protection des investisseurs. Les recommandations du groupe de travail relatives à l’application de la loi, soit les recommandations en la matière les plus exhaustives que nous avons vues depuis plusieurs décennies, prévoient notamment des modifications importantes proposées à la structure de gouvernance actuelle de la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (« CVMO »), de même que l’élargissement et le renforcement des pouvoirs de la CVMO en matière d’application de la loi et de recouvrement.
CHANGEMENTS À LA GOUVERNANCE
L’une des recommandations clés du groupe de travail est de scinder les fonctions réglementaires et juridictionnelles actuelles de la CVMO. Le groupe de travail propose de créer un tribunal d’arbitrage distinct (le « tribunal ») dont le fonctionnement s’inscrirait dans le cadre de la structure actuelle de la CVMO. Le tribunal se chargerait des procédures judiciaires, à la lumière des directives d’orientation énoncées par le volet de réglementation de la CVMO. Les membres du tribunal seraient nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre des Finances, et la durée maximale de leur mandat initial serait de cinq ans. De plus, les membres du tribunal ne siègeraient pas au conseil d’administration de la CVMO (le « conseil d’administration »), comme c’est le cas des commissaires à l’heure actuelle. Le conseil d’administration se chargerait pour sa part de superviser le mandat de réglementation de la CVMO.
Conformément à ces changements, le groupe de travail recommande de séparer les fonctions actuellement combinées de président du Conseil et de chef de la direction afin de créer deux postes distincts. Le chef de la direction serait responsable des questions d’application de la loi et conserverait le pouvoir de rendre des ordonnances d’enquête et de déléguer ce pouvoir, tandis que le président du Conseil assumerait un rôle de gouvernance plus traditionnel.
POUVOIRS ACCRUS : APPLICATION DE LA LOI, AMENDES ET RECOUVREMENT
En ce qui a trait aux pouvoirs d’application de la loi de la CVMO, certaines propositions notables consistent notamment à élargir la responsabilité civile pour des déclarations trompeuses dans les notices d’offre, afin que celle-ci s’applique aussi aux principaux acteurs responsables de la divulgation de l’émetteur (tels que ses administrateurs, ses promoteurs, ses personnes influentes et ses experts). Il est également question de conférer à la CVMO le pouvoir d’adapter la responsabilité des prospectus afin de combler les lacunes réglementaires découlant des structures de financement nouvelles et en évolution. De plus, le groupe de travail recommande d’habiliter les tribunaux provinciaux à émettre des ordonnances de production qui obligeraient des tiers qui ne font pas l’objet d’une enquête par la CVMO, mais qui possèdent ou contrôlent des renseignements pertinents, à remettre de tels renseignements à un enquêteur autorisé.
En outre, le groupe de travail propose une augmentation considérable des amendes maximales pour une infraction à la Loi sur les valeurs mobilières (Ontario) (la « Loi »). Plus précisément, il suggère une hausse, de 1 M$ CA à 5 M$ CA, de la sanction administrative pécuniaire maximale par infraction à la Loi, ainsi qu’une hausse, de 5 M$ CA à 10 M$ CA, de l’amende maximale pour les infractions quasi criminelles.
Pour surmonter les obstacles au chapitre du recouvrement des sanctions pécuniaires, il est proposé par le groupe de travail de conférer à la CVMO des pouvoirs plus étendus pour geler, saisir ou protéger autrement des actifs, y compris des actifs transférés à des membres de la famille ou à des tiers à une valeur inférieure à leur juste valeur marchande. D’après ces propositions, la CVMO serait autorisée à demander au tribunal de rendre une ordonnance afin de tenir les parties solidairement responsables à l’égard de tels actifs, de même que d’enregistrer un privilège pour tout montant qui est dû à la CVMO afin de donner la priorité à celle-ci par rapport aux autres réclamations.
HARMONISATION ET SIMPLIFICATION DES MESURES D’APPLICATION DE LA LOI
Le groupe de travail suggère d’harmoniser les efforts de la CVMO avec ceux d’autres entités gouvernementales, dont les organismes gouvernementaux et les ministères de la province, afin de simplifier et d’améliorer les capacités de la CVMO en matière d’application de la loi et de recouvrement. Le groupe de travail encourage également la coopération entre les tribunaux et les ministères, par l’intermédiaire de leurs bases de données, afin de pouvoir recouvrer davantage les sommes dues à la CVMO, y compris en restreignant l’accès aux permis de conduire et aux plaques d’immatriculation pour défaut de paiement des amendes ou des pénalités.
Par ailleurs, le groupe de travail recommande de rendre automatiquement réciproques les ordonnances de sanction découlant des audiences de contestation et des règlements d’autres organismes canadiens de réglementation des marchés financiers. Il recommande également de donner au tribunal le pouvoir discrétionnaire de rendre réciproques des ordonnances rendues par des tribunaux étrangers, sans devoir tenir une audience comme c’est le cas dans le système actuel, lequel requiert une audience de la commission à toutes les fois qu’une réciprocité est demandée.
PERSPECTIVES
Maintenant que le rapport final a été publié, il incombe au gouvernement de l’Ontario d’examiner et d’évaluer les recommandations du groupe de travail, notamment en ce qui a trait aux changements structurels fondamentaux susmentionnés et aux questions relatives à l’application de la loi. Il reste à voir de quelle façon ces recommandations seront accueillies par le gouvernement et les intervenants des marchés des capitaux.
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