Le Canada, comme d’autres grands pays, a établi une vaste gamme de sanctions économiques et financières qu’il peut appliquer à des États étrangers et à leurs ressortissants, de même qu’à diverses organisations terroristes.
Puisqu’à plusieurs titres, le Canada est un pays commerçant, et que nombre d’entreprises canadiennes ont des liens ailleurs dans le monde, les lois prévoyant des sanctions ont des répercussions importantes non seulement sur les pays ciblés, mais également sur les entreprises canadiennes. Bien que ces lois canadiennes soient généralement harmonisées avec celles des partenaires internationaux du Canada (comme les États-Unis et l’Union européenne), elles présentent aussi des différences notables. La conformité au réseau complexe de lois prévoyant des sanctions fait donc partie intégrante de la gestion des risques juridiques, réglementaires et d’atteinte à la réputation de chaque entreprise et doit être prise en considération dans toute opération économique.
Les lois canadiennes sur les sanctions s’appliquent à toute personne ou entreprise au Canada ainsi qu’à l’ensemble des citoyens canadiens et des sociétés constituées sous le régime canadien exerçant des activités à l’étranger. Elles interdisent toute opération avec des personnes désignées ou dans des secteurs ciblés de certains territoires étrangers, et imposent des processus de filtrage de même que des obligations de déclaration et de blocage des biens aux institutions financières réglementées et autres entreprises. En outre, les lois canadiennes sur les sanctions comprennent des résolutions adoptées par les Nations Unies (l’« ONU »), ainsi que d’autres mesures restrictives que le Canada, seul ou en collaboration avec ses partenaires internationaux, a imposé à des pays ou des groupes étrangers.
La présente introduction offre un aperçu des exigences clés prévues aux lois et aux règlements du Canada en matière de sanctions en date de mars 2023.
SANCTIONS ÉCONOMIQUES
Le gouvernement du Canada impose des sanctions économiques et des restrictions commerciales aux termes de cinq lois fédérales.
La partie II.1 du Code criminel interdit toute opération portant sur des biens appartenant à des groupes terroristes, notamment certaines entités nommées dans le Règlement établissant une liste d’entités. Sécurité publique Canada publie une liste des entités visées par ce règlement sur son site Web. Le Code criminel établit des obligations de déclaration et de blocage relativement aux biens appartenant à des groupes terroristes, ainsi que plusieurs infractions en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme.
Le gouvernement du Canada donne force de loi à des sanctions adoptées par le Conseil de sécurité des Nations Unies au moyen de règlements sous le régime de la Loi sur les Nations Unies (la « LNU »). Actuellement, des règlements pris en vertu de la LNU imposent des sanctions aux pays suivants :
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Deux autres règlements pris en vertu de la LNU mettent en œuvre les sanctions de l’ONU relativement à la lutte contre le terrorisme et contre le Taliban, EIIL (Daech) et Al-Qaïda. Les autorités canadiennes ne maintiennent pas une liste récapitulative de toutes les personnes et entités visées par les règlements pris en vertu de la LNU. Cependant, l’ONU publie une liste récapitulative des personnes et entités visées par les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies sur son site Web.
Les sanctions imposées en vertu des règlements de la LNU varient selon le pays ou le groupe visé, et comprennent habituellement des embargos sur les armes, des restrictions commerciales et des interdictions de fournir des services financiers ou techniques en lien avec les activités visées. Qui plus est, les règlements de la LNU interdisent toute opération avec une personne désignée aux termes des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies ou portant sur ses biens. L’étendue de ces interdictions n’est pas la même d’un règlement à un autre, mais celles-ci englobent généralement :
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toute opération portant sur un bien appartenant à une personne désignée ou étant contrôlé par elle;
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la conclusion ou la facilitation de toute opération financière se rapportant à une telle opération;
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la prestation ou l’acquisition de services financiers ou de services connexes liés à ces biens;
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la mise de biens ou de services financiers à la disposition de toute personne désignée.
En l’absence d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, le gouvernement du Canada a le pouvoir, en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales (la « LMES »), d’imposer des sanctions à des personnes ou des pays étrangers s’il juge qu’une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales est susceptible d’entraîner une grave crise à l’échelle mondiale. La LMES permet également d’adopter des règlements visant à mettre en œuvre une décision d’un organisme international (autre que l’ONU) dont le Canada est membre.
Actuellement, il existe des règlements en vertu de la LMES qui imposent des sanctions aux pays suivants :
Les règlements pris en vertu de la LMES varient selon le pays visé, mais interdisent de façon générale toute opération sur un bien, y compris des actifs financiers, appartenant à une personne désignée en vertu des règlements. En outre, ils interdisent la prestation de services financiers ou d’autres services en lien avec des activités interdites. Les règlements pris à l’égard de la Birmanie et du Zimbabwe imposent également des embargos sur les armes. Les sanctions prévues à la LMES relativement à d’autres pays visés comprennent différents embargos visant l’exportation et l’importation de marchandises, de services, de technologies et de matières désignés et sont présentées en détail ci-après.
Venezuela
Le Règlement sur les mesures économiques visant le Venezuela interdit toute activité portant sur un bien, y compris les actifs financiers, qui appartient à une personne figurant sur la liste prévue au règlement susmentionné ou qui est détenu ou contrôlé par elle ou pour son compte. Ce règlement interdit également la conclusion de toute transaction connexe (ou la facilitation d’une telle conclusion) et la prestation de services financiers ou connexes. Actuellement, seuls des ressortissants vénézuéliens figurent sur la liste prévue au règlement susmentionné. Le gouvernement du Venezuela et les entreprises d’État vénézuéliennes ne sont pas visés par les sanctions canadiennes, contrairement aux sanctions établies par le gouvernement des États-Unis. Cependant, bon nombre des personnes désignées sont des membres du gouvernement du Venezuela.
Pour en savoir davantage sur les sanctions contre le Venezuela, consultez notre Bulletin Blakes d’octobre 2017 intitulé Nouvelles sur les sanctions économiques du Canada : nouvelles sanctions contre le Venezuela et autres développements.
Iran
Jusqu’en 2016, le Canada avait en place des restrictions commerciales très complètes envers l’Iran. Le gouvernement du Canada a levé la plupart (mais non la totalité) de ces restrictions en février 2016, lorsque l’Agence internationale de l’énergie atomique a confirmé que l’Iran avait respecté ses engagements au titre du Plan d’action global commun, programme visant à assurer que les activités nucléaires iraniennes ne servent pas à mettre au point des armes nucléaires.
À compter d’octobre 2022, le règlement a été modifié à plusieurs reprises afin de désigner des personnes qui, de l’avis du Canada, ont participé à des « violations graves et systématiques des droits de la personne » en Iran.
Russie et Ukraine
Le gouvernement du Canada, en collaboration avec ses partenaires internationaux, a imposé un large éventail de sanctions contre les entreprises et individus russes, de même que contre les personnes ayant des liens avec certains groupes prorusses en Ukraine. Ces mesures comprennent généralement des interdictions relatives à ce qui suit :
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les opérations visant un bien appartenant à plus de 1 500 personnes désignées, groupes et entreprises figurant sur la liste établie à l’annexe 1 du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Russie (le « Règlement visant la Russie ») et du Règlement sur les mesures économiques spéciales visant l’Ukraine;
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les opérations portant sur des titres de capitaux propres ou sur un nouvel emprunt dont la durée dépasse 30 jours, ou leur financement, en lien avec d’importantes institutions financières russes désignées ou leurs biens;
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les opérations portant sur un nouvel emprunt dont la durée dépasse 90 jours, ou leur financement, en lien avec d’importantes sociétés énergétiques russes désignées ou leurs biens;
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l’exportation, la vente, la fourniture ou l’expédition de diverses marchandises désignées en Russie ou à toute personne qui s’y trouve en vue de l’exploration de schiste bitumineux ou la production d’huile de schiste, de l’exploration pétrolière ou la production de pétrole en mer en eaux profondes, ou de l’exploration pétrolière ou la production de pétrole dans l’Arctique;
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l’exportation, la vente, la fourniture ou l’expédition de diverses marchandises, technologies et matières premières dont il est question dans la Liste des marchandises et technologies réglementées ou à l’annexe 5.1 du Règlement visant la Russie;
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l’importation, l’acquisition, l’exportation, la vente, la fourniture ou l’expédition de diverses marchandises de luxe désignées à l’annexe 6 du Règlement visant la Russie;
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l’exportation, la vente, la fourniture ou l’expédition de diverses marchandises et matières que la Russie pourrait utiliser pour la fabrication d’armes et qui sont désignées à l’annexe 7 du Règlement visant la Russie;
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la fourniture de divers services à certains secteurs, comme des services informatiques, d’architecture et d’ingénierie;
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les investissements, les opérations visant des biens, la fourniture ou l’acquisition de services financiers, l’importation, l’exportation, l’achat ou la vente de quoi que ce soit dans une région occupée de l’Ukraine, y compris la région de Donetsk, la région de Louhansk, la région de Kherson, la région de Zaporijia et la région de la Crimée en Ukraine.
Bélarus
Le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant le Bélarus (le « Règlement visant le Bélarus ») impose des interdictions relatives à ce qui suit :
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les opérations visant des valeurs mobilières et des instruments du marché monétaire émis par le Bélarus ainsi que par des banques et d’autres entités contrôlées par le Bélarus;
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les opérations portant sur un emprunt dont la durée dépasse 90 jours qui ont trait au Bélarus ainsi qu’aux banques et à d’autres entités contrôlées par le Bélarus;
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la fourniture de services d’assurance ou de réassurance au Bélarus ou à une entité contrôlée par celui-ci;
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la fourniture de services d’assurance ou de réassurance à une personne qui se trouve au Bélarus à l’égard de certains produits aéronautiques et aérospatiaux ainsi que de technologies connexes;
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les opérations portant sur des produits pétroliers désignés exportés du Bélarus ou à la fourniture de services financiers ou autres liés à des produits pétroliers désignés exportés du Bélarus;
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les opérations portant sur des produits de chlorure de potassium désignés exportés du Bélarus;
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l’exportation, la vente, la fourniture ou l’expédition au Bélarus ou à une personne qui se trouve au Bélarus de marchandises ou de technologies dont il est fait mention dans la Liste des marchandises et technologies réglementées ou à l’annexe 3 du Règlement visant le Bélarus;
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l’importation, l’acquisition, l’exportation, la vente, la fourniture ou l’expédition de diverses marchandises de luxe désignées à l’annexe 4 du Règlement visant le Bélarus;
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l’exportation, la vente, la fourniture ou l’expédition de marchandises liées à la fabrication d’armes dont il est fait mention à l’annexe 5 du Règlement visant le Bélarus.
Syrie
D’importantes restrictions existent également quant à la Syrie. Le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la Syrie interdit, entre autres, d’importer ou d’expédier, de la Syrie, toute marchandise, à l’exception des denrées alimentaires. En outre, ce règlement contient une interdiction d’exporter vers la Syrie ou toute personne qui s’y trouve, toute marchandise ou donnée employée dans la surveillance des télécommunications, tous articles de luxe, produits chimiques et produits énumérés dans les règlements. D’importantes restrictions visent également les services financiers. Il est notamment interdit :
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d’effectuer toute opération sur un bien détenu par une personne désignée dans les règlements ou pour le compte de celle-ci;
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de fournir des services financiers ou des services connexes concernant le gouvernement de la Syrie ou toute personne qui se trouve en Syrie, sous réserve de quelques exceptions;
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de fournir des services financiers ou des services connexes en vue de faciliter le commerce du pétrole ou de produits pétroliers, à l’exclusion du gaz naturel;
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d’effectuer des investissements en Syrie et d’exercer toute autre activité interdite prévue au règlement susmentionné.
Un certain nombre d’exceptions limitées aux restrictions susmentionnées sont offertes en vertu du règlement.
Corée du Nord
Le Règlement sur les mesures économiques spéciales visant la République populaire démocratique de Corée impose des sanctions en plus de celles prévues aux termes de la LNU. Il est entre autres interdit :
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de fournir des services financiers concernant le gouvernement de la Corée du Nord ou à toute personne qui se trouve en Corée du Nord, sous réserve de certaines exceptions;
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d’effectuer des investissements auprès de toute entité en Corée du Nord;
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d’exporter, de fournir ou d’expédier des marchandises en Corée du Nord ou à toute personne qui s’y trouve et d’effectuer des opérations concernant des marchandises destinées à la Corée du Nord ou à toute personne qui s’y trouve;
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de transférer ou de communiquer des données techniques à la Corée du Nord ou à toute personne qui s’y trouve, et d’exercer toute autre activité interdite prévue au règlement susmentionné.
Des exceptions limitées à ces restrictions sont offertes en vertu du règlement.
Le ministre des Finances a également publié des directives ministérielles à l’égard de la Corée du Nord et de l’Iran en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (la « LRPCFAT »). Ces directives obligent les entités déclarantes en vertu de cette loi à considérer toutes les opérations en provenance ou à destination de la Corée du Nord et de l’Iran comme présentant un risque élevé, quel que soit le montant de l’opération. La directive ministérielle visant l’Iran, qui s’applique aux banques, aux coopératives de crédit et aux entreprises de services monétaires sous réglementation fédérale, exige que ces entités prennent des mesures spécifiques à l’égard des opérations qui émanent de l’Iran ou sont destinées à l’Iran, notamment la vérification de l’identité et de la propriété effective de toute personne qui demande à une telle entité d’effectuer l’opération ou qui en bénéficie, de même que la vérification de l’origine des fonds ayant servi à l’opération et de l’objet de l’opération.
La Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus (la « LBBDEC ») autorise le gouvernement du Canada à ordonner qu’un bien au Canada appartenant à un étranger politiquement vulnérable (un « ÉPV ») soit saisi, bloqué ou mis sous séquestre s’il y a des troubles internes ou une situation politique incertaine dans l’État étranger. La LBBDEC permet également au gouvernement de rendre des ordonnances visant à restreindre les opérations avec tout ÉPV désigné. La désignation dure cinq ans, à moins qu’elle soit prorogée par le gouvernement du Canada. Les pouvoirs en vertu de la LBBDEC s’ajoutent, de manière très distincte cependant, aux dispositions de la LRPCFAT relatives à la diligence raisonnable accrue vis‑à‑vis des ÉPV.
Des règlements ont été introduits en vertu de la LBBDEC à l’égard d’individus associés aux anciens régimes de l’Ukraine et de la Tunisie.
La Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitsky) (la « LSM »), adoptée en octobre 2017, autorise le gouvernement du Canada à désigner des étrangers qui, du point de vue du gouvernement, sont responsables ou complices de violations graves des droits de l’homme reconnus à l’échelle mondiale. Une désignation en vertu de la LSM peut également s’appliquer aux agents publics étrangers (ou à des personnes qui leur sont associées) qui, de l’avis du gouvernement, sont responsables ou complices d’actes de corruption importants. Les désignations en vertu de la LSM sont établies dans le Règlement relatif à la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus.
À l’heure actuelle, les désignations en vertu de la LSM visent des étrangers provenant de la Russie, du Venezuela, du Soudan du Sud, du Myanmar et de l’Arabie Saoudite.
Pour en savoir davantage sur la LSM, consultez notre Bulletin Blakes de novembre 2017 intitulé Nouvelle législation canadienne sur les sanctions en vigueur : loi de Sergueï Magnitsky.
Facilitation
Les lois canadiennes sur les sanctions interdisent généralement de faire quoi que ce soit qui, de façon directe ou indirecte, occasionne, facilite, favorise ou soutient la perpétration d’un acte interdit. Cela peut comprendre l’aide financière ou technique, des services de conseil ou d’autres activités. Lorsqu’une société élabore un cadre de conformité et de contrôle relatif aux sanctions, elle doit s’assurer de détecter et de prévenir toutes activités commerciales qui peuvent indirectement contrevenir aux lois prévoyant des sanctions.
Permis et licences
Les lois canadiennes sur les sanctions comprennent des mécanismes qui confèrent au ministre des Affaires étrangères le pouvoir de délivrer des permis ou des certificats autorisant certaines activités ou opérations précises qui sont autrement interdites. Un permis peut être accordé à titre exceptionnel pour des activités interdites en vertu des règlements de la LMES ou de la LSM. Les règlements aux termes de la LNU permettent également au ministre des Affaires étrangères de délivrer un certificat autorisant une partie précise à exercer une activité par ailleurs interdite.
En outre, le ministre de la Sécurité publique et le ministre de la Protection civile peuvent émettre une autorisation en vertu du Code criminel permettant à une personne de se livrer à toute opération ou activité qui serait par ailleurs contraire à l’interdiction d’effectuer une opération sur des biens d’un groupe terroriste ou de fournir des services liés à de tels biens.
Filtrage
Les lois canadiennes sur les sanctions imposent un processus de filtrage aux institutions financières réglementées, dont les banques, coopératives de crédit, sociétés de fiducie et de prêt, sociétés d’assurance, courtiers en valeurs mobilières et entreprises de services monétaires ouvrant des comptes pour des clients. Ces institutions doivent vérifier de façon suivie si elles ont en leur possession ou sous leur contrôle des biens qui appartiennent à une personne désignée ou sont contrôlés par elle ou pour son compte, ou qui appartiennent à une personne pour le compte de la personne désignée, en vertu d’une des cinq lois canadiennes sur les sanctions.
Pour ce qui est des institutions financières fédérales, le Bureau du surintendant des institutions financières (le « BSIF ») a publié un Guide d’instructions dans lequel il énonce ses attentes à l’égard du processus de filtrage, notamment la fréquence et l’étendue du filtrage exigé. Plus précisément, le BSIF s’attend à ce que le filtrage soit effectué une fois par semaine ou plus fréquemment, selon le contexte; il s’attend aussi à ce que les grandes institutions financières fédérales contrôlent leurs dossiers sur une base quotidienne. Les noms des nouveaux clients doivent être comparés à ceux des personnes désignées au moment de l’ouverture du compte ou de l’établissement d’une nouvelle relation d’affaires, ou dès qu’il est raisonnablement possible de le faire. De plus, le BSIF s’attend à ce que les institutions financières fédérales assujetties à la LRPCFAT appliquent les mesures de contrôle susmentionnées aux propriétaires effectifs enregistrés de clients et à d’autres tiers. Les mesures de filtrage doivent également être intégrées au processus de surveillance des opérations.
Accès aux listes des sanctions
Au cours des dernières années, le gouvernement du Canada a accompli des progrès au chapitre de la consolidation des listes de personnes sanctionnées désignées en vertu de la législation canadienne. La Liste consolidée des sanctions autonomes canadiennes établie par Affaires mondiales Canada répertorie désormais de manière exhaustive les personnes et les entités désignées en vertu des règlements de la LMES ou de la LSM. Sécurité publique Canada maintient une liste de personnes liées aux activités terroristes en vertu des règlements pris en vertu du Code criminel. Les Nations Unies ont également une liste consolidée de toutes les personnes désignées au titre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, laquelle devrait présumément contenir toutes les personnes désignées en vertu de la LNU. Les personnes désignées en vertu de la LBBDEC ne figurent actuellement dans aucune des listes consolidées ci-dessus; le nom de ces personnes figure dans le Règlement sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus (Tunisie) et le Règlement sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus (Ukraine). Veuillez noter que le BSIF ne maintient plus de liste de personnes désignées.
Puisqu’il n’existe pas de liste regroupant toutes les personnes canadiennes désignées, les institutions financières doivent consolider elles-mêmes les listes ou avoir recours à un tiers fournisseur de services de filtrage commercial afin de se conformer à leur obligation continue en matière de filtrage. Lorsque les services de tels fournisseurs sont utilisés, il est de la responsabilité de l’institution financière de s’assurer que le processus de filtrage est appliqué à toutes les listes canadiennes et que ce processus est mis à jour en temps opportun pour qu’il tienne compte des nouvelles désignations.
Les désignations en vertu de la législation canadienne sur les sanctions entrent souvent en vigueur avant la publication officielle du règlement d’application dans la Gazette du Canada. Les institutions financières devraient s’assurer d’avoir en place un processus efficace leur permettant d’ajouter les nouvelles désignations à leurs listes avant la publication officielle du règlement, par exemple en surveillant les avis et les nouvelles d’Affaires mondiales Canada.
Déclaration
La législation canadienne sur les sanctions impose des obligations de communication, notamment les suivantes :
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Tout bien d’une personne désignée, ou liée, identifiée au moyen d’un processus de filtrage ou autrement, doit être bloqué et déclaré sans délai aux autorités canadiennes chargées de l’application de la loi. Ces obligations s’appliquent non seulement aux institutions financières réglementées, mais également à tous les Canadiens, y compris ceux qui résident à l’étranger.
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Les institutions financières réglementées doivent déclarer à l’organisme principal de réglementation provincial ou fédéral dont elles relèvent, si elles sont ou non en possession ou si elles ont sous leur contrôle des biens visés appartenant à une personne désignée aux termes des règlements pris en vertu du Code criminel ou des règlements de la LSM. Le nombre de personnes ou de contrats en cause et la valeur totale des biens doivent également être déclarés. En vertu du Code criminel, les déclarations doivent être produites chaque mois. Un rapport négatif doit être produit auprès de l’organisme principal de réglementation si aucun changement n’a été constaté. En vertu des règlements de la LSM, un rapport est requis uniquement lorsqu’une institution financière désignée constate l’existence d’un tel bien. Par la suite, des rapports concernant ce bien doivent être produits tous les trois mois.
Pour les institutions financières sous réglementation fédérale, ces rapports doivent être déposés auprès du BSIF conformément aux instructions du BSIF concernant l’utilisation des formulaires BSIF-525 ou BSIF-590.
Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières ont également publié un guide à l’intention des courtiers en valeurs mobilières qui doivent déposer ces rapports auprès de l’autorité en valeurs mobilières provinciale considérée comme l’autorité principale dont ils relèvent. L’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (l’« OCRCVM ») a publié aussi des instructions à ce sujet à l’intention de ses courtiers membres.
Pour en savoir davantage sur l’obligation de déclaration mensuelle imposée aux institutions financières sous réglementation fédérale, consultez nos Bulletins Blakes d’août 2021, intitulé Nouvelles sanctions contre le Bélarus et modifications à l’obligation de déclaration mensuelle relative aux sanctions, et de mai 2019, intitulé Modifications à l’obligation de déclaration mensuelle relative aux sanctions.
Les institutions assujetties à la LRPCFAT doivent déclarer toute correspondance à la liste établie en vertu du Code criminel et aux personnes et entités visées par le Règlement d’application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme auprès du Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (le « CANAFE ») conformément à la ligne directrice du CANAFE relative à la production d’une déclaration de biens appartenant à un groupe terroriste.
Les lois canadiennes sur les sanctions prévoient généralement l’immunité contre des poursuites civiles pour toute déclaration transmise de bonne foi en vertu de ces lois. Les dispositions portant sur l’immunité propres à chaque règlement doivent être consultées afin de répondre à cette question.
Sanctions et infractions
Au Canada, contrevenir de son propre gré aux lois canadiennes sur les sanctions constitue une infraction criminelle entraînant d’importantes amendes ou des peines d’emprisonnement, ou les deux. Qui plus est, la violation d’une loi sur les sanctions, ou même une simple allégation de violation, peut entacher considérablement la réputation de toute organisation, particulièrement une institution financière.
REFUS D’EMBARGO ET ANTIBOYCOTTAGE : LÉGISLATION
En vertu de la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères (la « LMEE »), le gouvernement du Canada a le pouvoir de rendre des ordonnances afin de protéger les intérêts canadiens contre l’exercice extraterritorial de lois étrangères au Canada. Il existe actuellement deux ordonnances de blocage aux termes de la LMEE :
Arrêté de 1992 sur les mesures extraterritoriales étrangères (États-Unis)
L’Arrêté de 1992 sur les mesures extraterritoriales étrangères (États-Unis) (l’« arrêté de 1992 ») empêche l’exercice extraterritorial au Canada de l’embargo des États-Unis à l’égard de Cuba. L’arrêté de 1992 interdit à toute société canadienne ainsi qu’à ses administrateurs, dirigeants et employés, relativement au commerce ou aux échanges entre le Canada et Cuba, de se conformer aux mesures extraterritoriales américaines.
L’arrêté de 1992 interdit également à toute entreprise canadienne de se conformer à toute directive ou communication relative à une telle mesure reçue d’un tiers en situation de diriger ou d’influencer les activités de l’entreprise canadienne.
En outre, il prévoit une obligation d’avis transmis au procureur général du Canada de toute communication de ce genre.
Arrêté de 2014 sur certaines mesures extraterritoriales étrangères (États-Unis)
L’Arrêté de 2014 sur certaines mesures extraterritoriales étrangères (États-Unis) empêche toute personne se trouvant au Canada de se conformer aux exigences Buy America des États-Unis au sujet du redéveloppement de lieux loués par l’État de l’Alaska dans le nord de la Colombie-Britannique.
La province de l’Ontario a adopté la Loi sur les pratiques de commerce discriminatoires, qui interdit aux personnes de cette province de s’adonner à certaines pratiques discriminatoires. Cette loi a été introduite dans les années 1980, en réponse au boycottage d’Israël par la Ligue des États arabes.
Elle défend à une personne de refuser d’exercer toute activité commerciale avec une autre personne en se fondant, entre autres, sur la nationalité ou la situation géographique de la contrepartie.
Il existe également une interdiction de conclure un contrat qui contient une clause portant qu’une des parties au contrat refusera de faire du commerce avec une autre personne en raison d’un attribut de celle-ci. La loi prévoit des exigences visant à obliger une personne qui reçoit une demande de se livrer à des activités interdites de rapporter la demande.
CONTRÔLES À L’EXPORTATION ET À L’IMPORTATION
La Loi sur les licences d’exportation et d’importation impose des contrôles à l’exportation et à l’importation pour des marchandises précises ou des marchandises provenant de certains lieux. Ces contrôles ont des répercussions sur une large gamme d’opérations et d’expéditions transfrontalières et sont principalement mis en place au moyen des trois listes suivantes :
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la Liste des pays visés (la « LPV »);
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la Liste des marchandises et technologies d’exportation contrôlée (la « LMTEC »);
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la Liste des marchandises d’importation contrôlée (la « LMIC »).
La LPV est une liste des pays à l’égard desquels le gouvernement estime nécessaire de contrôler l’exportation de toute marchandise. Actuellement, seule la Corée du Nord se trouve sur cette liste; une licence est requise pour exporter des marchandises vers ce pays.
La LMTEC et la LMIC sont des listes de marchandises que le gouvernement estime nécessaire de contrôler pour diverses raisons énumérées. Par exemple, le Canada contrôle étroitement l’exportation de marchandises et technologies militaires vers des pays qui posent une menace pour le Canada ou ses alliés, qui sont sous la menace imminente d’hostilités ou qui y sont mêlés, ou qui sont visés par des sanctions du Conseil de sécurité des Nations Unies. La LMTEC contrôle également l’exportation de toute marchandise d’origine américaine, que celle-ci soit ou non contrôlée par la LMTEC. Une licence, générale ou spécifique, est requise pour exporter ou importer des marchandises qui figurent sur la LMTEC ou la LMIC.
En outre, en vertu de la Loi sur les licences d’exportation et d’importation, il est interdit d’aider ou d’encourager quiconque à enfreindre la loi. Par conséquent, les institutions financières de même que d’autres entreprises qui prennent part à des activités de financement d’opérations commerciales internationales doivent prendre des mesures pour s’assurer qu’elles n’enfreignent pas indirectement les lois canadiennes en matière de contrôles à l’exportation et à l’importation lorsqu’elles fournissent des services à un importateur ou un exportateur.
La Loi interdisant les armes à sous-munitions met en œuvre les engagements du Canada dans le cadre de la Convention sur les armes à sous-munitions, soit un traité international portant sur les conséquences humanitaires de certaines munitions explosives. En vertu de cette loi, il est interdit de posséder, de déplacer, d’importer et d’exporter des armes à sous-munitions, des sous-munitions explosives et des petites bombes, ou d’aider toute personne à commettre l’un de ces actes. Les entreprises doivent s’assurer qu’elles ne contreviennent pas indirectement à cette loi en fournissant des services à un importateur ou à un exportateur.
En vertu de la Loi sur les douanes et du Tarif des douanes, il est interdit d’importer des marchandises fabriquées ou produites, en tout ou en partie, par des prisonniers ou du travail forcé. En outre, la 44e législature du Canada a déposé le projet de loi S-211, Loi édictant la Loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaines d’approvisionnement et modifiant le Tarif des douanes, lequel devrait passer à l’étape de la troisième lecture en mars 2023 et entrer en vigueur en 2024. Une fois adoptée, la loi ajoutera le travail des enfants à l’interdiction d’importer des marchandises issues du travail forcé actuellement prévue dans le Tarif des douanes et exigera que les entités désignées dans la loi (c.-à-d. qui possèdent des actifs d’une valeur d’au moins 20 M$ CA, qui ont généré des revenus d’au moins 40 M$ CA et/ou qui emploient au moins 250 employés) présentent un rapport annuel faisant état de leurs efforts pour éviter le recours au travail forcé ou au travail des enfants.
Outre le projet de loi S-211, Affaires mondiales Canada a publié un avis sur la conduite des affaires avec des entités menant des activités à l’étranger ou ayant des liens avec le Xinjiang, en Chine (l’« avis »). L’avis n’impose pas d’exigences de nature juridique, mais établit des attentes claires quant à la conformité des entreprises canadiennes au droit canadien relatif au travail forcé et aux droits de la personne lorsqu’il est question du Xinjiang, notamment l’adoption volontaire de pratiques exemplaires.
Le gouvernement du Canada attend des entreprises canadiennes ayant des liens avec le Xinjiang qu’elles examinent de près leurs chaines d’approvisionnement afin de s’assurer que leurs activités ne contribuent pas à soutenir la répression de minorités ethniques au Xinjiang et partout ailleurs en Chine, notamment les activités de surveillance au Xinjiang, les établissements de détention ou d’internement, et le travail forcé. De même, aux termes de l’avis, les entreprises sont encouragées à bien s’informer sur les utilisateurs finaux de leurs produits et services pour s’assurer que ceux-ci ne sont pas utilisés pour ce genre d’activités. Les entreprises canadiennes qui mènent des activités ou comptent des utilisateurs finaux dans certains domaines de haute technologie, tels que les caméras, les capteurs et les dispositifs biométriques, devraient faire preuve de prudence et de la plus grande diligence lorsqu’ils font des affaires en Chine, car ces produits pourraient être utilisés pour suivre arbitrairement les déplacements des Ouïghours et d’autres personnes au Xinjiang.
Étant donné la vaste portée de cet avis et l’importance attribuée à l’examen des chaines d’approvisionnement et des utilisateurs finaux des services, les institutions financières canadiennes et les investisseurs canadiens (y compris les investisseurs institutionnels) devraient envisager l’application de mesures de diligence raisonnable pour s’assurer que les entreprises qui reçoivent du financement ou du capital de leur part ne se livrent pas aux types d’activités décrits dans l’avis ou ne dirigent pas les fonds reçus à de telles fins.
Aux termes de cet avis, il est également recommandé aux sociétés de prendre des mesures afin de s’assurer que leurs chaines d’approvisionnement ne contreviennent pas à l’interdiction d’importation de biens en provenance de pays où ils sont issus, en tout ou en partie, du travail forcé qui est établie dans la Loi sur le Tarif des douanes du Canada. En vertu de la Loi sur les licences d’exportation et d’importation, les marchandises et technologies contrôlées ne peuvent être exportées du Canada s’il existe un risque important qu’elles soient utilisées pour commettre ou faciliter des violations graves des droits de la personne. L’avis précise que chaque demande de licence d’exportation visant des marchandises et des technologies contrôlées sera examinée afin de déterminer le risque que celles-ci puissent être utilisées pour commettre ou faciliter de telles violations.
Pour en savoir davantage au sujet de cet avis, consultez notre Bulletin Blakes de janvier 2021 intitulé Le gouvernement du Canada établit des attentes sur la conduite des affaires avec des entités liées au Xinjiang, en Chine.
Pour en savoir davantage au sujet du projet de loi S-211, consultez notre balado Volume d’affaires de Blakes, intitulé Canada’s Modern Slavery Act: What’s in Store for Canadian Companies (en anglais).
Pour en savoir davantage sur les sanctions commerciales, communiquez avec :
Patrick Lapierre +1-514-982-4105
Roy Millen +1-604-631-4220
Brady Gordon +1-604-631-5255
Alison Burns +1-604-631-3390
ou un autre membre de notre groupe Commerce international.
Pour en savoir davantage sur tout autre aspect du présent bulletin, communiquez avec :
Vladimir Shatiryan +1-416-863-4154
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